Pour Fabrice Béaur, administrateur de l'Observatoire eurasienne pour la démocratie et les élections, il n'est question ici que des rapports de force chez les oligarques ukrainiens.
"Porochenko est un oligarque… Iatseniouk est le représentant de certains autres oligarques. Vu que la plupart des oligarques sont avec lui, évidement il se sent fort. Il peut tenir ce langage parce qu'il a gagné la partie au moins pour six mois. On ne peut pas renouveler cette motion de censure pour l'instant. Selon moi, l'appel à la démission d'Iatseniouk fait par Porochenko n'est pas sincère. C'est juste une relation de rapports de force entre oligarques qui se déchirent, se battent, s'allient entre eux pour s'accaparer d'une telle ou telle partie de l'économie qui n'a pas encore été privatisée".
Selon Arseni Iatseniouk, la crise politique actuelle, qui, rappelons-le, a été provoquée en partie par lui-même, est "un pas vers une vie nouvelle". Le premier ministre ukrainien promet de ne pas démissionner et qualifie ceux qui sont partis de la coalition d'irresponsables. Mais selon les sondages, les Ukrainiens ne veulent plus voir ni Iatseniouk ni son gouvernement diriger le pays. Fabrice Béaur revient sur les résultats des derniers sondages.
"L'équipe gouvernementale actuelle subit des défections sur défections, elle est ultra-impopulaire. Si j'ai bien cru comprendre l'institut de sondage ukrainien, on dit que Iatseniouk a été supporté par 8 pour cent de la population. Donc tous les partis politiques retirent leurs billes du gouvernement actuel".
Il est tout de même étonnant que malgré vents et marées, malgré les cotes de popularité du premier ministre mais aussi du président ukrainiens très basses, ils continuent à être à la barre. En janvier 2016, la popularité de Porochenko a été en baisse de 10 pour cent par rapport au mois de juin 2015. D'ailleurs, il est devenu 7 fois plus riche durant sa présidence.
"Sa cote de popularité est très basse, sa légitimité populaire est très faible. Dans les cas où le pouvoir est très peu légitime parce que le pays est divisé contre lui-même, il y aura toujours un pouvoir illégitime. Ce pouvoir sera entre des mains extérieures, il sera sans l'autonomie d'action. Etant donné la situation intérieure assez schizophrénique de l'Ukraine, tout pouvoir à Kiev sera faible surtout s'il veut se braquer contre la Russie qui est son interlocuteur naturel. Il y a des rapports de force obscurs, non-dits qui expliquent le comportement quelquefois irrationnels de quelques acteurs".
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