Non, ce n’est pas une plaisanterie! Riyad possède une armée dont les soldats ne sont ni nécessairement Saoudiens, ni nécessairement arabophones. Mais le sort de l’intervention saoudienne sera vite dévoilé, quand certains médias occidentaux, la chaîne saoudienne Al-Arabiya et son homologue qatarie Al-Jazeera auront diffusé les images des cadavres de cette armée, présentés comme des civils tués par la Russie.
Certes, le territoire syrien est actuellement occupé de facto par de multiples forces étrangères. Mais certaines apparaissent plus justifiées que d'autres, comme l’éradication par la Russie des groupes terroristes, contrairement aux agressions continuelles de la Turquie qui, sous le joug de la dictature quasi-théocratique de Recep Tayyep Erdogan, constituent une atteinte à la souveraineté de la Syrie. L'intervention saoudienne s’inscrit dans cette catégorie d’ingérences illégales, car dépourvues du consentement explicite de Damas. Mais elle s’explique aussi par la panique qui frappe de plus en plus les Al Saoud, qui se rendent compte que l’époque dorée de la rente pétrolière arrive à ses fins, et que l’oncle Sam, le meilleur ami des Saoudiens, tente de remodeler la carte géopolitique du Moyen-Orient.
La mauvaise nouvelle pour Ryad est que, contrairement à ce que certains pensent, Washington ne verrait pas d’inconvénients à ce que l’État saoudien soit désintégré. La fin de l’amitié avec Washington n’a jamais été un « happy end »: le Shah d’Iran a été renversé par Khomeiny, Saddam Hussein a été exécuté, Moubarak a été jeté en prison, et même Kadhafi, qui s'était rapproché de l’oncle Sam, a été renversé, capturé, sodomisé par ses ravisseurs et lynché. Tous ces antécédents représentent un cauchemar à éviter à tout prix pour les Saoudiens, au point d'en venir à faire la guerre à tout le monde et n’importe où.
L’ingérence saoudienne dans le conflit syrien, au nord, après son échec dans le conflit yéménite, au sud, confirme l’impression générale sur ce royaume idéologiquement archaïque: Ryad vit ses derniers moments comme royaume unifié. Les Saoudiens vont s'impliquer militairement dans ce conflit. Ici s'explique une partie du titre de cet article, « la folie », car cette intervention impliquera nécessairement une confrontation avec l’ours de l’Oural, la Sainte- Russie. Cette confrontation semble toutefois mal appréhendée par les Al Saoud, qui croient que les Américains se précipiteront à leur secours, négligeant le fait que la Maison Blanche entretient malgré toutes les tentions apparentes des contacts avec le Kremlin. La chute de la maison Al Saoud ne serait pas une catastrophe pour les Américains. La Syrie sera donc peut-être la première et la dernière véritable guerre pour les Saoudiens.
Dans ce contexte, et à l'opposé, une même rhétorique haineuse se développe contre la Russie et son leadership. Le deuxième événement que j’analyse dans cet article est ici la tribune de l’homme d’affaires américain George Soros, publiée dans le quotidien britannique The Guardian le 11 février 2016 contre le leader russe Vladimir Poutine. Je préférerais cyniquement le nommer George « Sorrows », c’est-à-dire « tristesses » en Anglais, car dès que cet homme décide de se mêler des affaires intérieures d’un pays, il faut s'attendre à des malheurs sociaux, des calamités politiques et des guerres civiles dans ce pays.
Soros a ainsi déclaré que Vladimir Poutine constituait un danger pour l’Europe et pour l’Occident beaucoup plus important que l’État Islamique (EI). Ce « philosophe de la haine » a ajouté que Poutine aurait orchestré le flux des migrants en direction de la vieille Europe en vue de désintégrer l’Union européenne. Ce « faux prophète » a conclu sa théorie en déclarant que non seulement l’Union Européenne, mais aussi la Sainte-Russie se désintégront. Soros précise que la chute de Moscou précéderait celle de l'Union Européenne. Mais Monsieur « Sorrows » révèle ainsi son « wishful thinking », des illusions fantasmagoriques pleines de mauvaises intentions. Car l’action de la Russie contre les terroristes islamistes a sauvé l’Europe d’un désastre encore plus grave que celui des migrants qui l'ont inondée. La puissance de l’EI n’est plus aussi redoutable qu'avant, et les populations locales commencent lentement à regagner leurs anciennes demeures en Syrie, après la libération de nombreuses villes par l’armée syrienne soutenue par les forces aériennes russes.
Mais ces événements positifs représentent de mauvaises nouvelles pour George Soros, lui qui a investi des millions de dollars dans la formation et le soutien des groupes terroristes… Soyons naïfs et croyons qu’il l'a été lui-même… L’éradication des terroristes se déroule qu’il le veuille ou non, et il aurait mieux dépensé ses dollars dans des œuvres de charité. Nous sommes finalement à deux pas de l’embrasement, et la stratégie suicidaire des deux grands perdants du conflit syrien, les Saoudiens et les Turcs, se confirme jour après jour. Lorsque surviendra le moment décisif, la Syrie ne sera donc pas la seule concernée, mais ce sera aussi le cas de Ryad et d'Ankara. Ce seront donc la folie et la haine entretenues au niveau étatique et personnel qui bouleverseront la carte géopolitique du Moyen-Orient.
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