Le ministre de l'intérieur Bernard Cazeneuve s'est rendu, lundi soir, à la paroisse St-Louis de Fontainebleau, profanée et incendiée dans la nuit de samedi à dimanche. Accompagné du Préfet de Seine-et-Marne, du curé du pôle missionnaire de la ville et du maire, de Monseigneur Jean-Yves Nahmias, évêque de Meaux, ainsi que de députés de la région, le ministre a exprimé son émotion vis-à-vis d'un "acte abject" après avoir inspecté les différents foyers d'incendies, comme nous le relate Frédéric Valletoux, maire (DVD) de Fontainebleau:
« Il a été frappé par l'étendue des dégâts, il ne s'attendait pas à constater de tels désordres. Il a bien vu l'étendue des dégâts provoqués par le feu, il a bien vu l'étendue des dégâts provoqués par le vandalisme et donc il a bien vu dans quelle mesure on a voulu souiller cette église ».
L'origine criminelle et la volonté du ou des auteurs à commettre un tel sinistre n'est plus à mettre en doute, dans cette chapelle du XVIIe siècle, où une forte odeur de brulé vous saisit avant même d'en avoir pénétré l'enceinte, il apparait que le mobilier a été rassemblé en trois points distincts afin d'y allumer plusieurs foyers. Des lieux forts de symboles, tels que le chœur dont l'autel classé, du XVIIème siècle, disposé autrefois dans l'imposante chapelle de la Trinité-du-Palais du château de Fontainebleau ainsi qu'un retable du XVIème siècle ou encore un autre autel de St-Joseph, celui-ci plus récent, du XIXème mais dont le tabernacle avait une grande valeur, ont tous été détruits. Quant à la statue polychrome de la Vierge de Notre-Dame-de-Franchard, datant XIVème siècle, son sort demeure incertain. A-t-elle été détruite par les flammes ou a-t-elle été dérobée?
La perte d'un patrimoine « inestimable », pour reprendre le qualificatif employé par le Père José Antonini, curé du pôle missionnaire de Fontainebleau: un homme de foi fortement affecté par l'annonce de la nature criminelle des faits et qui n'est pas resté insensible au déplacement de Bernard Cazeneuve:
« La présence du ministre a été pour moi importante, il était important qu'il vienne étant donné la gravité des faits, pas uniquement pour moi bien entendu, mais pour l'ensemble des bellifontains et pour l'ensemble des paroissiens. La présence de l'évêque était importante, du préfet également mais que le ministre lui-même et les plus hautes autorités soient venues ici est pour moi signifiant de l'intérêt que l'état porte à ce qui s'est passé à Fontainebleau. Donc je suis dans ma peine, car je suis peiné, blessé, mais je suis réconforté ».
Mais au-delà des dégâts matériels, c'est bien sûr l'émotion qui l'emporte face à la portée symbolique de la destruction ou du vol d'objets liturgiques, comme le ciboire de la paroisse, ce vase sacré conservant la réserve eucharistique dans le tabernacle, dérobé et dont les hosties consacrées ont été disséminées sur le sol.
« C'est scandaleux, c'est honteux, ils ont profané, c'est une profanation. Ils ont profané l'autel, ils ont profané un lieu qui est sacré, ils ont profané les hosties. Je ne m'attendais pas à voir autant de dégâts, il y a des dégâts qui sont vraiment considérables. Que dire de plus? Evidemment condamner, mais une fois qu'on a dit ça, on n'a rien dit, je crois qu'il faut que rapidement les forces de police retrouvent ceux qui ont commis un tel crime, parce que c'est un crime, et je crois que ce qu'il faut aussi c'est que le dialogue continue à s'instaurer avec les différentes communautés religieuses, car là nous sommes devant une église catholique mais il y'a aussi des profanations qui se sont passées dans d'autres lieux de culte et je les condamne toutes avec autant de vigueur».
Il faut dire que le déplacement de Bernard Cazeneuve était attendu, si le ministère de l'intérieur avait condamné l'acte dans un communiqué dès dimanche, rappelant « sa détermination à assurer la protection de tous les lieux de culte », le tout dans un contexte national tendu suite aux attentats qui ont frappé la France, sa venue à Fontainebleau n'a été annoncée que Lundi après-midi.
Un contexte difficile ayant apporté son lot d'actes islamophobes et antisémites, largement couverts par les médias et condamnés par l'exécutif: Leur apportant soutient et protection armée. Or cet incendie demeure, quelle qu'en soit l'origine, quelles qu'en soient les motivations, par sa seule forme, la profanation d'un lieu saint — un dimanche d'épiphanie. Un n'acte qui pourtant n'a pas fait l'objet d'une grande couverture médiatique.
Un sentiment d'exaspération, de colère, que tenait justement à éviter le maire de Fontainebleau, pour qui le déplacement d'un membre du gouvernement était primordial:
« Il nous a dit qu'il avait à cœur que les Eglises soient aussi des édifices religieux protégés comme tous les autres édifices et que dans sa conception de la République, bien sûr, il n'y avait pas de hiérarchie dans la protection devant être apportée aux édifices religieux, quelle que soit la religion. C'est important aussi car je ne voulais pas que prospère l'idée, s'il n'était pas venu, que l'Etat quelques soient ses couleurs politiques puisse considérer qu'il y a des lieux de cultes plus sensibles que d'autres».
Si tous s'accordent à dire que la ville de Fontainebleau n'avait jamais été confrontée à de tels actes, la dernière profanation en date remonte à l'incendie de la Synagogue en Avril 1941. En France, où l'on dénonce régulièrement la hausse des atteintes aux sites islamiques et hébraïques, la tendance n'épargne pas les lieux catholiques, pourtant si le ministère de l'intérieur recense depuis 2002 les actes antisémites et depuis 2010 les actes islamophobes via des conventions signées respectivement avec le Services de protection de la communauté juive (SPCJ) crée par le Conseil représentatif des institutions juives de France (CRIF) et l'observatoire de l'islamophobie du Conseil français du culte musulman (CFCM), rien de semblable n'existe dans le cadre du recensement des actes anti-chrétiens. Une différence de traitement que n'avait pas manqué de souligner le député Les Républicains des Côtes-d'Armor, Marc Le Fur, dans une question écrite au ministre de l'intérieur fin 2012.
Espérons que la visite de Bernard Cazeneuve témoigne d'une prise de conscience du gouvernement quant à l'existence d'un réel besoin de reconnaissance par les catholiques et chrétiens de France de ce mal qui les touchent également, et qu'à l'avenir les profanations seront toutes condamnées sans distinction.
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