Les demandes françaises de renseignements sur certains membres présumés des attaques terroristes de Paris, adressées aux autorités américaines par le Ministère des Finances seraient restées lettre morte. La source de Bercy, citée par l'agence Reuters, ajoute "Je ne pense pas qu'ils oseront utiliser le même argument pour la dernière demande, qui concerne des personnes clairement identifiées comme étant derrière les attentats du 13 novembre à Paris". Car ce n'est pas la première fois que les autorités américaines n'accèdent pas à ce type de requête.
Des données bancaires afin d'établir des liens entre des individus et leurs complices ou des organisations voire des pays qui auraient pu les financer. Pour François-Bernard Huyghe, directeur de recherche à l'IRIS et expert en cyber stratégie ainsi qu'en intelligence économique, suivre ces mouvements peut s'avérer intéressant, malgré quelques réserves:
« Encore que, on avait vu par plusieurs exemples, les Kouachi et Coulibaly en France, que les groupes terroristes qui passent à l'action n'ont pas besoin de budgets énormes et souvent ils s'autofinancent par un peu de criminalité ou tout simplement en allant emprunter de l'argent à leurs banques ».
Alors pourquoi le Trésor américain refuse-t-il la demande de Bercy? D'autant plus que la source au Ministère insiste sur l'importance pour les enquêteurs d'obtenir ces données dans les plus brefs délais. Pour François Bernard Huyghe, les relations entre les services de différents états reflètent la complexité des relations qu'il peut y avoir entre les nations elles-mêmes:
« Évidemment ce sont des rapports très ambigus, parce que d'un côté on participe à des mêmes programmes, on échange des données sur des terroristes, sur leurs déplacements etc. et de l'autre, nous savons très bien que les Etats-Unis par les systèmes de la NSA surveillent et pas seulement les apprentis djihadistes mais surveillent des acteurs économiques en France, voire mêmes plusieurs présidents de la république ».
D'autant plus que tout aurait pu mal finir pour le Trésor américain, du moins officiellement… En 2013, suite au tôlé provoqué par les révélations d'Edward Snowden, l'Union Européenne a, brièvement, pensé à reconsidérer sa participation au programme de surveillance du financement du terrorisme (TFTB). Car il apparaissait plus que probable que ce n'était plus seulement le Trésor américain qui avait accès aux données bancaires de SWIFT, mais aussi la NSA…
Pour notre expert, c'est une nouvelle occasion pour les pays européens de montrer leur manque d'unité face notamment aux Etats-Unis:
« La solution, ça serait que l'Europe soit d'abord un peu plus unie, un peu plus européenne, un peu plus décidée à garder le contrôle sur ses données, ses Big-Data. Pour donner un exemple, le fait que les services britanniques d'interception, l'équivalent en anglais de la NSA, le GCHQ travaille beaucoup avec leurs collègues américains, alors que d'autres pays européens le font moins, montre évidemment que l'on ne présente pas du tout un front uni ».
La source du Ministère des Finances, citée par l'agence Reuters, va même plus loin en ajoutant qu'il apparait que parmi les pays européens, certains « plus anglo-saxons » que les français, entretiennent des accords secrets avec Washington afin de faciliter l'accès à ces informations.
Quant à la société SWIFT, l'adoption par le Parlement Européen en Septembre 2014 de la Résolution 2014/284, prenant notamment en considération la déclaration de clôture du sommet de l'OTAN au pays de Galles, « demande à l'Union européenne d'envisager l'exclusion de la Russie du système SWIFT ».
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