Au cours d'une de ces soirées thématiques dont Arte, typiquement, raffole, les pires abominations des totalitarismes communiste et nazi étaient mises en scène. Près de cinq heures d'horreur au total au rythme des documentaires se succédant. Jusqu'ici rien à dire. Ces grandes messes audiovisuelles, au cours desquelles les spectateurs français sont invités au "devoir de mémoire", relèvent de l'exercice traditionnel depuis près d'un quart de siècle.
Que la télévision française décide de rappeler que communisme et nazisme sont, comme le soulignait Vassili Grossman, égaux dans l'inhumanité en présentant une série de documentaires sur Staline, parfait. Une piqûre de rappel n'est jamais superflue alors que l'extrême-gauche, en France, s'imagine toujours être en position de donner des leçons de morale. En revanche, que vient faire en plein milieu de cette soirée "spéciale bourreaux" un documentaire —par ailleurs plus qu'orienté- traitant de Vladimir Poutine? Qu'on en juge:
1. Première partie de soirée: "Apocalypse Staline". Goulag, purges sanglantes, famines sciemment provoquées, mégalomanie et paranoïa… les grandes lignes de l'action et de la personnalité du "petit père des peuples" sont rappelées.
2. Deuxième partie de soirée: "Poutine pour toujours?". Nous y reviendrons.
3. Troisième partie de soirée: "Einsatzgruppen". Un documentaire brillant, faisant appel aux meilleurs spécialistes français (Christian Ingrao…) et internationaux de la Shoah par balles. Deux heures d'images d'archives insoutenables relatant le génocide commis en Ukraine, en Biélorussie et dans les pays Baltes par les SS et leurs auxiliaires locaux en 1941. Un vrai travail historique, rigoureux, pédagogue, enrichissant, lui.
Bien entendu, France 2 se défend d'avoir eu une telle attention, soulignant qu'il s'agissait simplement d'une suite logique de documentaires sur des "personnalités fortes". On appréciera l'usage de ce qualificatif, plutôt élogieux, vis-à-vis de Staline et des SS… Evidemment, oser accuser la télévision publique française de basse visée propagandiste dans un contexte international tendu vaudra à tous ceux qui ont relevé le caractère pour le moins maladroit de cette grille de programmation un petit brevet de complotiste. Pro-russe, cela va de soi. Mais on ne peut passer sous silence les étranges pratiques de la télévision publique française, qui seraient condamnées si elles étaient le fait des médias russes. Complotisme? Christine Ockrent a dirigé le pôle audiovisuel public français, destiné à assoir l'influence française à l'étranger, alors qu'elle était l'épouse de Bernard Kouchner, ministre français des affaires étrangères. Que ne dirait-on pas si Madame Lavrov dirigeait l'agence Rossia Segodnya? Complotisme? Le chef du service météorologie de France 2 vient d'être licencié parce qu'il a exprimé un avis différent des autorités françaises sur le réchauffement climatique à l'approche de la COP 21… Bel exemple d'indépendance éditoriale des médias publics.
Les opinions exprimées dans ce contenu n'engagent que la responsabilité de l'auteur.