Et si Bachar el-Assad était neutralisé

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Et si le président syrien était « neutralisé » comme le furent à l’époque Hosni Moubarak en Egypte, Saddam Hussein en Irak, Mouammar Kadhafi en Libye et Ben Ali en Tunisie?

Au moment où le secrétaire américain John Kerry adoucit sa rhétorique belliqueuse en appelant à coopérer avec Bachar el-Assad dans la lutte contre l'Etat islamique, François Hollande s'isole sur la scène internationale avec une position intransigeante et plus que jamais dure vis-à-vis du régime « dictatorial ».

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Pour rétablir la paix en Syrie, deux conditions sont indispensables, selon le président. « La première, c'est la neutralisation de Bachar el-Assad. La seconde, c'est d'offrir des garanties solides à toutes les forces de l'opposition modérée, notamment sunnites et kurdes, et de préserver les structures étatiques et l'unité de la Syrie», a annoncé le chef de la République mardi. La « neutralisation » du « dictateur », favoriserait-elle le rétablissement de la paix dans la région ou forcerait-elle la porte déjà entrouverte à l'Etat islamique ou Al-Nosra? Didier Billion, directeur adjoint de l'IRIS et spécialiste du Moyen-Orient, a mis les points sur le « i ».

Primo: « parler d'une neutralisation comme si c'était une sortie de la crise est un non-sens. Si Bachar el-Assad devait partir du pouvoir, ce sera la fin du processus de négociations », constate l'expert. Secundo: il n'y a plus d'opposition modérée en Syrie mais une radicalisation de l'ensemble des forces sur place. « Celles qui au départ étaient modérées ou ont totalement disparu ou se sont ralliées à un camp dans une voie de radicalisation, » rappelle Didier Billion.

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Pour Washington, Assad est "responsable de tous les maux"
Changer d'attitude signifierait pour la France de reconnaître que depuis quatre ans, sa politique au Proche-Orient allait d'échec en échec, affirme l'expert. Les Occidentaux, surtout les Etats-Unis et la France, ont commis de graves erreurs en armant la rébellion syrienne qui était faible, corrompue, idéologiquement beaucoup plus proche des salafistes qu'on ne le croyait. La quasi-totalité des armes s'est retrouvée aux mains de l'Etat islamique: les Kurdes se sont emparés des missiles français Milan à Kobané, des missiles Tow ont été retrouvés dans d'autres brigades salafistes de Syrie, Al-Qaïda a repris tous les missiles et tous les armements livrés à la brigade Al-Hazm qui est soutenue par la CIA.

« On a l'impression que les leçons de l'histoire ne sont jamais tirées par les responsables politiques ou une partie d'entre eux, en tout cas », regrette Didier Billion. La Syrie ne doit pas être le troisième pays, après l'Irak en 2003 et la Libye en 2011, qui tombe dans ce type de situation. » Chaque fois qu'un « dictateur » est éliminé, que ce soit en Irak, en Libye, en Egypte ou en Turquie, les populations se font massacrer et ce sont les fanatiques qui prennent le relais pour plonger les pays dans le chaos. Les résultats du printemps arabe ne se font pas attendre: les migrants clandestins affluent en Europe.

Si Assad était « neutralisé », le drapeau noir de Daesh flotterait sur Damas. « S'il part, cela veut dire que le régime s'écroule et qu'on rajoute du chaos au chaos. Car ce seraient l'Etat islamique ou Al-Nosra qui s'installeront en Syrie. Est-ce que cela qu'on veut? » se demande Didier Billon.

La solution de la crise syrienne reste toujours la même: « Il faut relancer les initiatives diplomatiques pour que toutes les parties au conflit ou du moins le maximum d'entre elles puissent se réunir, négocier une forme de compromis et de sortie de crise. Il faut reprendre l'ensemble du dossier syrien avec les acteurs les plus importants du dossier syrien. Je pense aux Etats-Unis, à la Russie et à l'Iran qui est plus que jamais nécessaire. Reprenons les choses méthodiquement, reprenons un scénario politique et arrêtons de nous illusionner sur la possibilité d'une victoire militaire », conclut Didier Billion.

 

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