Les mémoires de hibakusa
Au Japon, ceux qui ont survécu à l'explosion de la bombe atomique à Hiroshima, le 6 août 1945, sont appelés hibakusa, ce qui signifie "victime de l'explosion". Ils sont de moins en moins nombreux chaque année, et le souvenir de ces évènements tragiques risquent ainsi de se perdre.
"J'avais 20 ans, quand le bombardement a eu lieu….J'étais étudiant, et l'explosion m'a saisi alors que je me rendais à l'institut. J'ai mangé à la cantine et me préparais à sortir quand j'ai croisé trois amis au seuil de la porte", a raconté Sunaï Tsuboï, le président du Conseil japonais des organisations des victimes des frappes nucléaires.
"A l'époque, on recevait des produits moyennant des tickets, et nous avions toujours faim. Mais j'étais gêné pour manger à deux reprises. J'ai donc refusé et je suis allé à l'institut….La bombe atomique est tombée à 8h15. Je me rendais à l'institut. Et mes amis, tous les trois, ont trouvé la mort dans cette cantine. Tous ceux qui étaient dans le réfectoire ont péri ", a expliqué M. Tsuboï, ajoutant qu'il n'oublierait jamais tout ce qu'il avait pu contempler dans la ville après l'explosion.
Keiko Ogura, 78 ans, qui est un autre témoin du bombardement, se souvient qu'elle avait été projetée par la vague d'explosion et qu'elle avait perdu conscience.
"Quand j'ai repris conscience, tout était sombre. Il semblait que la nuit était tombée. La ville était écrasée après l'explosion. Il semblait qu'un pied énorme lui avait marché dessus et l'avait écrasée", a raconté Mme Ogura, ajoutant que les enfants avaient peur de sortir dans la rue tellement les passants ressemblaient à des fantômes.
Le bombardement: vision sociale et historique
Durant plusieurs années après le bombardement, les hibakusa étaient obligés de cacher leur souvenirs tragiques et même le fait qu'ils étaient blessés, à cause de la discrimination sociale.
Mme Ogura s'est mis à raconter son passé quand elle a vu que les nouvelles générations commençaient à oublier la tragédie d'Hiroshima. C'est la mémoire historique qui peut permettre que de tels évènements ne puissent plus se reproduire.
Il y a quelques années, un mouvement de transmission "vivante" de l'expérience des survivants au bombardement a été créé à Hiroshima. Les participants au mouvement rencontrent des hibakusa et évoquent leurs souvenirs tragiques.
"Il n'y avait pas de haine. La peur, l'épouvante et le choc étaient des sentiments les plus forts, ils supplantaient tout le reste", estime Mme Ogura. Et M. Tsuboï se souvient que sa première réaction a été l'envie de vengeance. Il ajoute que plus tard, la réalisation de la force contre laquelle les japonais avaient fait face leur fit prendre conscience que cette vengeance était impossible.
Commémoration
Le Parc de la paix et le musée qui abrite des documents et des pièces liés au bombardement atomique d'Hiroshima se trouvent dans le quartier de l'épicentre de l'explosion. Les pièces de musée reconstituent l'horreur de ce qui s'était passé en 1945. On peut trouver des audioguides dans les langues de tous les pays qui possèdent d'arme nucléaire.
Hiroshima se donne deux objectifs essentiels: sauvegarder la mémoire et ne pas laisser la tragédie de Hiroshima et Nagasaki se répéter.
"Nous ne devons pas suivre la voie de diviser les coupables et les victimes. L'essentiel, c'est que rien de tel ne puisse jamais se répéter. C'est la mission d'Hiroshima", a déclaré aux journalistes le maire d'Hiroshima Kadzumi Matsuï, dont la mère a survécu au bombardement.
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— Sputnik France (@sputnik_fr) 6 августа 2015
Les manifestations pour commémorer les évènements tragiques se poursuivent au Japon. Et le site Internet asahi.com a mis des photos panoramiques de la ville d'Hiroshima après le bombardement de 1945 et aujourd'hui. Une décision qui vient à point nommé pour comprendre que ce passé tragique ne doit jamais se répéter.