Aujourd'hui, les deux pays sont clairement des partenaires stratégiques. Des alliés peut-être pas encore compte tenu justement d'un certain nombre de questions sur lesquelles les deux nations partagent des points de vue divergents, voire parfois diamétralement opposés. Mais le fait que nous soyons aujourd'hui des partenaires stratégiques, oui, c'est indéniable.
Les principaux points de dissension sont connus. Tout d'abord il s'agit de la Syrie. Moscou soutient le gouvernement légitime de Damas. Ankara avait au contraire adopté une position très dure contre le président syrien Bachar al-Assad. En outre, plusieurs djihadistes allant combattre en Syrie en provenance d'Europe, avaient fait de la Turquie un pays de transit. Aujourd'hui, cette approche est devenue plus modérée: la Turquie ayant commencé à lutter contre le passage des terroristes par son territoire, notamment via des arrestations. Certains diront d'une manière modeste, mais en tout cas la différence commence aujourd'hui à être un peu plus visible.
Puis évidemment reste la question du génocide arménien. La Turquie n'a pas apprécié les mots du président russe Vladimor Poutine lors de la récente cérémonie commémorative de cette tragédie, qui s'est déroulée dans la capitale de l'Arménie, Erevan. La diplomatie turque l'avait commenté comme étant un acte hostile. Mais bien vite, cela a été oublié pour se concentrer sur le renforcement du partenariat stratégique avec la Russie.
Justement, depuis que les pays occidentaux, le tout sous la houlette du maître étasunien, ont lancé la «guerre» des sanctions contre la Russie et son peuple, la Turquie a non seulement pas suivi ces bêtises, mais a au contraire fortement profité de cette situation, en renforçant sérieusement ses positions commerciales sur le marché russe (qui étaient déjà fortes). La pression faite par Washington et le sous-traitant de Bruxelles sur la Turquie pour que cette dernière se joigne aux sanctions, même d'une façon symbolique, n'ont pas abouti. La Turquie a dit: niet !
Plus que cela, les deux pays ont lancé un grandiose projet dans le domaine gazier: la construction du gazoduc Turkish Stream. Un projet qui permettra à la Russie de ne plus utiliser l'Ukraine comme pays de transit du gaz allant vers l'UE et qui donnera à la Turquie la possibilité de jouer un rôle encore plus important sur le plan géoéconomique et géopolitique, notamment face à Bruxelles. Le tout en remplacement du projet South Stream, dont les pays participants n'ont pas pu prouver leur fiabilité.
La Turquie a donc beau être membre de l'Otan (pour l'éternité? Pas si sûr…) et ne pas partager en intégralité un certain nombre de positions avec la Russie, elle a au moins le mérite d'être une nation souveraine et qui sait défendre ses intérêts nationaux. A ce titre, les présidents russe et turc viennent de s'entretenir tout récemment à huit clos à Bakou, capitale de l'Azerbaïdjan, où ils se sont rendu tous deux à l'occasion de l'ouverture des premiers Jeux européens. A l'issue de cette rencontre, les deux leaders ont reconfirmé l'objectif stratégique des deux pays à porter les échanges commerciaux à hauteur de 100 milliards de dollars. Rien que cela…
Pour finir, il serait bon de dire que l'on espère un changement d'approche des dirigeants turcs vis-à-vis de la Syrie. D'autant plus, qu'une grande partie de la population de Turquie comprend les enjeux qui se jouent dans la Syrie voisine. La Russie, elle, continuera à soutenir ce pays martyrisé par le terrorisme international et l'impérialisme occidental. Et concrètement dans le cas syrien, connaissant les valeurs républicaines partagées par une grande majorité des Turcs, tout comme de Syriens, il serait plus que juste de s'éloigner une bonne fois pour toute des wahhabites sponsors des terroristes salafistes et des criminels otanesques. Ce qui est certain, ce que l'on continuera à développer les affaires et les relations avec la Turquie, et ce pour le bien commun.