Vladimir Poutine a officialisé ce marché, attribué en décembre dernier, aux côtés du Premier ministre italien Matteo Renzi, qui l'a cordialement reçu à Milan mercredi. Et il ne s'agit pas de n'importe quel contrat, mais de la production sur dix ans de 160 hélicoptères moyens AW189 par une coentreprise italo-russe, Helivert, basée à Tomilino, dans la banlieue de Moscou.
Il est dommage que la France, qui est légalement parfaitement en droit de livrer les deux bâtiments de projection et de commandement (BPC) Mistral commandés par la Russie, ne s'affranchisse pas elle aussi des pressions «occidentales» pour régler ce dossier en laissant le Vladivostok et le Sébastopol prendre la route de la Russie. Le patriotisme économique, tellement vanté par les autorités françaises en ces temps de crise, ne consiste pas seulement à arborer une marinière bretonne. Il implique aussi de soutenir les exportations pour sauver l'emploi. Et cela ne concerne pas seulement les chantiers navals français DCNS et STX, constructeurs des BPC. D'autres groupes de la Base Industrielle et Technologique de Défense (BITD) française étaient à l'affût sur le marché russe, ou en phases de négociations, pour des marchés dépassant quelquefois le montant du contrat Mistral, lorsque la France a décidé de geler toute collaboration militaro-industrielle avec la Russie. Thales, Safran, les entreprises de défense les plus efficacement engagées en Russie depuis une quinzaine d'années, partenaires de longue date d'Hélicoptères de Russie, rapatrient aujourd'hui peu à peu leurs personnels expatriés. Les investissements conséquents consentis sur le marché russe par ces entreprises risquent de l'avoir été en pure perte. Car les Italiens ne sont pas les seuls à profiter des opportunités délaissées par les Français.
Les BITD émergentes, de plus en plus concurrentielles, risquent de truster les opportunités en Russie. Alors que les sociétés françaises n'ont pas accès aux deux principaux marchés militaires mondiaux, la Chine et les Etats-Unis, et qu'elles sont par ailleurs confrontées à une compétition sans cesse plus féroce au Moyen-Orient ou en Asie, nous nous privons volontairement du relai de croissance russe, l'un des plus prometteurs. Nous risquons de le regretter rapidement.
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