Les élections législatives tenues dimanche en Turquie ont affaibli le président Recep Tayyip Erdogan, contraignant son parti à former un gouvernement de coalition.
Selon les données officielles, le Parti de la justice et du développement (AKP, islamo-conservateur), arrivé en tête du scrutin, n'a recueilli que 40,8% des suffrages et 256 sièges sur 550. Suivent le Parti républicain du peuple (CHP, social-démocrate) et le Parti de l'action nationaliste (MHP, droite), qui ont obtenu 25,2% et 16,5% des voix, soit 133 et 83 sièges respectivement. Le parti kurde HDP (Parti démocratique du peuple) a largement passé la barre des 10% des voix nécessaires, et obtient 78 sièges avec 12,9% des suffrages.
"C'est une démonstration de la fidélité de la population aux principes démocratiques en dépit de toutes sortes d'obstacles antidémocratiques. Des partis politiques représentant tous les segments de la population turque ont obtenu un nombre suffisant de votes et sont entrés à l'Assemblée", s'est félicité le président de l'Association turque de défense des droits de l'Homme, Ozturk Turkdogan.
Selon l'expert, "les résultats des élections ont retiré de l'ordre du jour la question de la transition du pays vers un modèle de gouvernance présidentielle. Les électeurs turcs ont voté contre la transformation du pays en Etat policier autoritaire".
Le Parti démocratique du peuple (HDP), force de gauche proche de la minorité kurde qui a franchi la barre des 10% des suffrages, est selon lui le vrai vainqueur de ces élections.
L'entrée d'un parti pro-kurde au parlement marque un tournant dans l'histoire du pays. La minorité ethnique kurde, qui représente 20% de la population du pays, est pour la première fois représentée sur la scène politique turque.
L'existence du peuple kurde et de sa culture n'étaient pas reconnues par la Constitution depuis la création de la République turque. Les Kurdes se sont soulevés à plusieurs reprises. En 1984, le Parti des travailleurs du Kurdistan a lancé une lutte armée pour la formation d'un Etat kurde indépendant dans le sud-est du pays. Mais de nombreux dirigeants kurdes ont été mis en prison. Les soulèvements ont été violemment réprimés par l'armée turque.