Les concepteurs de jeux vidéo ne sont pas les seuls à copier le fusil automatique le plus connu de la planète: les fabricants d'armes s'y donnent également à cœur joie. Depuis la création du fusil automatique Kalachnikov, ou AK (pour "Avtomat Kalachnikova"), une centaine de modifications de cette arme ont été élaborées, et la plupart des tentatives de copie ont lamentablement échoué. Les versions les plus intéressantes ressemblent parfois à un fusil hybride ou un lance-roquettes antichar.
Frères de conscience
De nombreux modèles copient l'AK, qui présentent des dizaines de différences par rapport à l'original. Les copies les plus répandues ont été fabriquées à diverses époques dans les pays de l'ex-Pacte de Varsovie: en Roumanie, en Hongrie et en Pologne. Ces pays ont suivi la voie la plus simple de fabrication des armes de série — ils ont pris le meilleur de l'original puis y ont ajouté leurs propres modifications.
Les copies roumaines, par exemple, se distinguaient de l'AK traditionnel par leur forme très originale au niveau du fût et de la taille de la crosse. Cependant, les fabricants roumains éprouvaient et éprouvent encore une passion particulière pour l'installation de poignées supplémentaires comme sur les premières versions de fusils roumains de bois. Cette solution technique très originale n'a aucune autre explication.
La basse qualité de fabrication est devenue la carte de visite des fusils automatiques roumains, notamment AIMS. Ces fusils automatiques ont fait leur "baptême" au cours des guerres contemporaines dans les conflits au Moyen-Orient, où ils étaient généreusement livrés. Il était facile de distinguer le "clone" roumain d'une arme russe authentique — le fusil roumain se désintégrait au bout de trois jours d'exploitation.
Le Tantal, les Polonais et savoir faire des économies
Le Tantal polonais est un autre fusil d'assaut tristement célèbre parmi les nombreuses copies de l'AK. Cette version polonaise de la Kalachnikov, conçue en 1988 par Bogdan Spaderski, devait être plus légère, plus moderne et meilleure que l'AK-74 classique, mais le résultat fut inverse. L'aspiration à concevoir un fusil moins coûteux à la fabrication a joué un mauvais tour aux Polonais: la fiabilité générale des mécanismes par rapport au fusil classique d'origine soviétique était deux fois plus basse. La cartouche de 5,45x39 mm mordait souvent et l'arme s'enrayait.
"La principale erreur commise par les Polonais, comme par les Roumains, est qu'ils ont voulu travailler sur le mécanisme de la culasse. Entre autres, il a soudainement semblé aux Polonais que l'AK ordinaire était lourd, et ils ont commencé à y ajouter des poignées en plastique, à inventer des crosses en tout genre… Au final, entre 1990 et 1994, près de 25 000 pièces de ces modèles ont été produites, après quoi le programme a été fermé. Aujourd'hui, la plupart de ces fusils voyagent à travers le Moyen-Orient, et les Polonais sont passés aux armes de l'Otan", explique l'expert en armes et historien militaire Oleg Radachvili.
L'exotisme perse
Les copies hongroises ou roumaines de l'AK ne surprennent plus personne. On ne peut pas en dire autant de la version irakienne du fusil légendaire. Le fait même de l'élaboration par l'Irak de sa propre version de l'AK est déjà extraordinaire. Le Tabuk, version irakienne de la Kalachnikov, a fini par être une copie du modèle très classique de l'AK avec quelques modifications au niveau de la forme du fût et de la poignée. Mais sa fiabilité était extrêmement basse.
L'expert en armes à feu et instructeur de tir Roman Viaznik décrit ses impressions de la Kalachnikov irakienne: "Une arme très controversée. Hormis avoir copié l'arme, les Irakiens ont décidé, comme les Roumains, de jouer avec les gabarits du fusil — le Tabuk mesure 10 cm de moins. De plus ils ont installé une crosse de jouet pour enfants. Qui plus est, ils ont pris pour base la version inachevée du Zastava M-70 yougoslave. Autre particularité — ils ont supprimé le régime de tir automatique. Les Irakiens sont ceux qui ont échoué le plus dans la copie de l'AK. La dernière goutte était l'utilisation de cartouches chinoises M43, qui se dispersaient une fois sur cinq. Il est inutile de dégrader par des expérimentations ce qui fonctionne au combat".
Le dragon asiatique
Lorsque les relations entre l'URSS et la Chine se sont dégradées, Pékin a décidé de lancer sa propre version de la Kalachnikov, baptisée Type 56. Dans l'ensemble, les Chinois ont réussi non seulement à copier le fusil avec tous ses mécanismes et détails, mais également à conserver une bonne qualité des matériaux de fabrication. La seule différence du Type 56 par rapport à l'AK classique était la baïonnette, qui pouvait être repliée avec un mécanisme spécial. Et le réticule de visée complètement fermé.
La fiabilité globale et le faible coût sont les principaux atouts de la copie chinoise. Grâce à leur habilité à copier, les Chinois ont réussi à produire jusqu'à 15 millions de Types 56. La Chine est certainement passée maître dans l'art de copier les armes soviétiques: aucun autre pays n'a encore réussi à commencer la production de la Kalachnikov sans préjudice pour la qualité. Cependant, les exploits de la Chine dans la production des copies d'armes soviétiques ne s'arrêtent pas là. Par la suite, les usines chinoises ont commencé à fabriquer un nouveau fusil, le Type 86, qui était conçu selon l'architecture bullpup et doté d'un canon allongé. Un peu plus tard apparaît également l'AKS-223, adapté et conçu pour tirer les cartouches 5,56x45 mm de l'Otan.
Un tel nombre de copies de Kalachnikov, depuis des décennies, ne témoigne que d'une chose — la simplicité et la qualité de l'arme soviétique, son coût bon marché et son exploitation simple même pour un soldat sans formation. L'expert militaire américain Phil Carlin n'a même pas réussi à calculer en 2010 le nombre de modifications produites de l'AK dans divers pays. L'expert s'est arrêté à la barre des 100 millions d'unités.
L'AK demeure le fusil d'assaut le plus populaire et le plus demandé au monde, et sa production a été mise en place même aux USA. Cependant, la qualité de l'arme soviétique qui lui a valu sa gloire pendant de longues années n'a pu être préservée dans sa version originale qu'en Russie.