La nouvelle agence de notation UCRG créée par la Russie, la Chine avec l'association des Etats-Unis, pourra-t-elle se faire une place sur le marché mondial de la notation financière?
Il y a une réelle difficulté pour tout nouvel acteur de s'imposer sur ce marché. Les trois principales agences Fitch, Moody's et Standard & Poor's (S&P) existent depuis près d'un siècle et possèdent à elles trois 96% du marché mondial.
Ces trois agences ont certes commis des erreurs par le passé qui ont abouti notamment à des poursuites judiciaires. On peut aussi leur reprocher une certaine légèreté dans les procédés de notation. Mais malgré tout, les grands investisseurs institutionnels, tout comme les plus petits fonds d'investissement, continuent à faire confiance à ces trois agences de notation.
A moyen terme, d'ici 2020, ce sera difficile pour UCRG de s'imposer sur ce marché en tant qu'acteur mondial. Elle doit s'attendre au mieux à une percée sur les marchés asiatiques. Je pense qu'UCRG a de vraies perspectives de croissance en Chine, au Vietnam et en Thaïlande.
Cela va être plus difficile. Au Brésil existe une longue tradition de capitalisme. Certaines entreprises brésiliennes ont été créées au 19e siècle. D'autres, plus récentes, sont déjà devenues transnationales (comme Petrobras ou Gol). Ces entreprises sont plus réticentes à utiliser les notations des «nouvelles » agences, surtout qu'elles sont déjà notées par les grandes agences anglo-saxonnes.
En Inde, il pourrait y avoir un peu plus d'opportunités. Les entreprises indiennes sont de plus en plus nombreuses à chercher les capitaux à l'étranger. Et elles peuvent se tourner vers les marchés traditionnels (comme New-York et Londres), mais aussi vers les marchés asiatiques (comme Singapour, Tokyo, Hong-Kong ou Shanghai). En empruntant dans des monnaies autres que le dollar et l'euro (par exemple en yen, mais surtout en yuan), elles seront amenées à être notées par des agences non-occidentales. Et pourquoi pas par UCRG.
En fonction des agences, la Russie est placée soit en bas de la catégorie « investment grade » (la catégorie « sûre ») (c'est le cas pour Fitch), soit en haut de la catégorie « speculative grade » (catégorie « risquée ») (S&P et Moody's). Si elle était notée sur 20, la Russie obtiendrait donc 10/20 et 9/20 respectivement. C'est un niveau de risque qui est intermédiaire, avec une dynamique négative depuis l'année 2014. En revanche, il y a deux ans, la Russie se trouvait dans la catégorie « BBB » (une note équivalente à 11/20).
Pour évaluer la dette souveraine d'un Etat, les agences de notation prennent en considération des éléments d'ordre macroéconomique, mais aussi des éléments d'ordre politique. Au niveau macroéconomique, la Russie a une dette faible, et des réserves importantes, malgré une réduction considérable de celles-ci au cours de l'année 2014.
Ensuite, la Russie a un taux d'inflation à deux chiffres. Il est difficile pour un pays avec un taux d'inflation de plus de 10% d'avoir une note en catégorie investissement.
Les agences s'inquiètent donc d'un ralentissement brutal de l'activité économique dans tout le pays, qui se répercutera sur le système bancaire, conduisant à l'augmentation du déficit budgétaire en Russie car c'est le gouvernement central qui devra soutenir les établissements de crédit; il a d'ailleurs déjà commencé à agir.