Pour l'instant la situation en Europe, dans le contexte du conflit ukrainien et de la confrontation entre l'Occident et la Russie, ne peut pas être qualifiée de militaire. Mais on peut bien la comparer à une situation d'avant-guerre, souligne le politologue américain Dimitri Simes, président du Centre pour l'intérêt national et éditeur du journal The National interest.
"La situation […] ne ressemble pas à celle de l'Europe en 1914. Mais elle a certaines similitudes avec l'année 1908, avant la guerre, quand les manœuvres des grandes puissances avaient ouvert la voie au conflit mondial. Nous avons encore le temps d'éviter la répétition d'une telle issue catastrophique, pourvu que Washington commence à mener une politique dure, mais intelligente", pense Dimitri Simes, cité par The National interest.
En Russie, deux camps politiques s'opposent sur la situation en Ukraine, l'orientation de la politique étrangère et l'interaction avec l'Occident. Le premier groupe considère qu' à terme, les relations avec l'Occident pourraient être restaurées, le deuxième estime que la Russie doit s'apprêter à un conflit prolongé. Le Président russe est plutôt dans le premier groupe: il ne se laisse pas guider par une idéologie quelconque et a une approche équilibrée. Vladimir Poutine, ainsi que le ministre des Affaires étrangères Sergueï Lavrov, adoptent une position relativement modérée sur la question ukrainienne et les relations avec les États-Unis. Cela est particulièrement évident en comparaison avec les représentants du deuxième camp des politiciens russes, persuadés que la confrontation actuelle se transforme en conflit civilisationnel entre les Russes et les Anglo-Saxons, note le politologue américain.
L'Occident devrait enfin comprendre que la Russie ne veut pas annexer l'Est de l'Ukraine et qu'elle ne va pas s'opposer à une Ukraine unie, dans laquelle serait prévue l'autonomie de l'Est russophone. En outre, Moscou continuera d'insister sur le fait que, dans un proche avenir, l'Ukraine ne doit pas entrer dans l'Otan. Pour les États-Unis il est important de comprendre que le leader russe n'est pas prêt à laisser se rendre les insurgés de l'Est, car il ne veut pas compter parmi les perdants. En même temps, Vladimir Poutine peut accepter un accord avec l'Occident qui prendrait en compte les intérêts de la Russie, déclare Dimitri Simes.
Par contre, la prolongation des sanctions contre la Russie mènera à des conséquences désastreuses. Elle peut forcer le président russe à adopter une position encore plus dure sur la question ukrainienne et provoquer une réaction encore plus vive de la part des partisans de la ligne dure dans les relations avec l'Occident. Tout ce que les États-Unis ont à faire, c'est réaliser que la Russie a ses objectifs bien concrets dans la question ukrainienne et parvenir à un accord global — les sanctions ne pouvant être qu'un moyen, et pas une fin, prévient Dimitri Simes.