Tout le monde le dit, entre deux verres ou en rallumant sa cigarette: « Fumer tue. » On achète des paquets avec des propos cruels et lucides: « Arrêter de fumer réduit les risques de maladies cardiaques et pulmonaires mortelles. » Depuis un certain temps, on y a rajouté des photos chocs. Rien à faire, le tabac tue chaque année en France 73 000 personnes, dont 44 000 par cancer.
Autre exemple flagrant: près de deux millions de fumeurs et ex-fumeurs québécois ont réclamé aux cigarettiers canadiens près de 27 milliards de dollars (canadiens) de dommages et intérêts. Le procès qui a débuté en mars 2012 et avait été surnomme « procès-fleuve » a pris fin en décembre dernier. Ce n'est pas pour autant que la sentence est tombée depuis. « Œil pour œil, dent pour dent » Et la monnaie sonnante pour le poumon mis en lambeau? Possible… Mais beaucoup de plaignants sont décédées au cours des procédures qui ont duré 16 ans.
Toutes les études le démontrent (je parle d'études issues de l'Institut Gustave Roussy qui lutte contre le cancer) notre plan anti-tabac qui ne comporte pas de hausse de prix est voué à l'échec. Ce qui n'empêche pas de prendre les mesures qu'il comporte, mais ce ne sont que des appoints.
Dans la fiscalité du tabac, volontairement très complexe, pour que les gens ne comprennent pas, les 80% voués à l'État lui rapportent 14 milliards d'euros. Mais cela lui coûte 47 milliards d'euros par les dégâts sanitaires. C'est un marché de dupes. Cela nous coûte trois fois plus que cela nous rapporte.
Récemment, notre gouvernement a fait voter une modification de la fiscalité du tabac. Et cette modification entraine un bénéfice de 70 à 100 millions d'euros pour les fabricants qui sont les plus coupables dans l'histoire.»
L'ancienne Ministre n'a pas attendu pour faire savoir son opinion: « Le Gouvernement a cédé au lobby des cigarettiers et des buralistes. »
Le président de la confédération des buralistes, Pascal Montredon a informé de son côté que les ventes de cigarettes en France ont baissée de plus de 12% en seulement deux ans. D'après lui, cette baisse ne fait que confirmer le décrochage du marché français des cigarettes et ne peut pas ne pas inquiéter les professionnels. En décembre dernier, sur la décision du gouvernement, les taxes sur les paquets de cigarette ont baissé: les paquets qui coûtent 6,50€ seront taxés à 64,7% au lieu de 65,4%. Cela crée un manque à gagner pour les caisses de l'Etat, environ 70 millions d'euros pour 2015, selon les calculs de l'Institut Gustave Roussy.
Et c'est cette suite d'évènements qui est pointée de doigt par tous ceux qui se soucient du futur de la nation: la différence d'un pourcent ne va pas au renforcement de la santé publique, mais, une fois de plus, à l'enrichissement des cigarettiers. « La lutte contre le tabac est considérée en France comme ringarde, — s'insurge Michèle Delaunay, — bien que ça soit un danger considérable. Ça ne me fait pas plaisir, mais la meilleure manière d'en parler, c'est de parler de lobbys. Pas de pauvres malades qui meurent du cancer. »
Une nouveauté attend les fumeurs français en 2016: ce serait le « paquet neutre », cela veut dire un paquet standardisé avec la même forme, taille, couleur et typographie. Servirait-ce à transformer le tabac en une substance bénéfique? Certainement pas. Cela va donc continuer à rapporter et nuire. L'humoriste Roland Bacri a bien résumé la situation: « Le tabac, c'est mauvais pour l'état général mais, pour l'Etat en particulier, excellent pour le coffre. »