Le "Game of drones" aux couleurs américaines

© Flickr / US Air Force / Michael QuiboloyFor the first time ever, the 163rd Reconnaissance Wing flies the MQ‐9 Reaper in the airspace over the Southern California Logistics Airport in Victorville
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La France s'engage de nouveau dans le "Game of drones" avec la commande d'encore trois appareils américains Reaper annoncée par le ministre de la Défense Jean-Yves Le Drian le 30 janvier.

Faute d'avoir lancé une production nationale de MALE (c'est-à-dire les drones qui volent à moyenne altitude et ont une longue endurance), la France est obligée de combler ce vide militaire à l'étranger. Il ne faut pas être Madame Soleil pour deviner les drones de prédilections de l'Hexagone: les Predator américains, les Heron israéliens ou les appareils chinois, chat en poche pour un prix intéressant. Les trois oiseaux qu'il va acheter chez les Etats-Unis porteront son armada de drones à quinze appareils.

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Les drones américains volent vers le futur
Il semble que la transaction actuelle pèse sur la souveraineté du pays. L'eurodéputé du Front National Aymeric Chauprade nous a partagé ses idées sur ce sujet sensible dans le domaine militaire. "Pourquoi le choix des Américains est dommageable pour notre indépendance dans ce domaine-là? D'abord, parce qu'avec l'acquisition de cette quantité (15 drones au total), on tue toute possibilité du développement national sérieux. C'est valable non seulement en France, mais dans toute l'Europe, malheureusement: les Reaper américains sont déjà en service au Royaume-Uni et en Italie, maintenant ils sont en France et demain, certainement, ils seront en Allemagne.

On voit une nouvelle fois ce club européen qui va être aux couleurs américaines. Paradoxalement, ce sont les promoteurs d'Europe de la défense — Messieurs Hollande et Le Drian — qui sont à l'origine de cette décision. En plus, comme l'acquisition se fait en urgence, les systèmes ne sont pas francisés, ne sont pas adaptés, notamment sur les questions de cryptage, aux critères français. Un autre point crucial en termes de perte d'indépendance c'est que les Américains mettent des conditions sur les théâtres d'opération où les drones seront utilisés. Il faut à chaque fois demander la permission quand on veut les utiliser sur tel ou tel théâtre d'opération. Cela concerne également la mise en œuvre: l'assistance technique au sol est encore largement américaine. Il y a un vrai problème d'indépendance et il va falloir que la France puisse développer ses systèmes, mais c'est, quand-même, un peu tard parce que les décisions n'ont pas été prises."

L'argent et la guerre vont toujours de pair. Avec 1,14 milliard d'euros dépensé pour les 15 drones américains, on aurait pu au moins jeter les bases d'une production nationale. Hélàs, c'est impossible dans un pays qui ne respecte même pas la loi de programmation militaire, sans parler du mal qu'il a à arrondir les fins des mois. A ce sujet, Aymeric Chauprade respire le réalisme et l'optimisme: "Nous devons ramener l'effort de défense au minimum à 2% du PIB, on souhaite de le mettre à 2,5% et à 20 milliards d'euros d'équipement chaque année pour pouvoir assurer la performance de nos armées et répondre aux besoins essentiels."

Mais si la France n'a pas le désir politique de produire des drones, elle a les moyens d'en acheter. Et qu'en est-il avec les pays pauvres contre lesquels ces appareils meurtriers vont être utilisés? Tout porte à croire que c'est un passage à un nouveau type de guerre, d'une part, entre les machines insensibles (les pilotes de drone robotisés et les oiseaux infernaux) et, d'autre part, la chair à canon. Le pilote étant extérieur à l'appareil-tueur, le facteur humain sera éradiqué. Les soldats ne seront plus conscients et responsables de leurs actes, ils ne tueront pas par eux-mêmes.

"La façon de faire la guerre évolue toujours avec la technologie. Le drone est un outil qui permet beaucoup de choses mais il ne saurait en rien replacer les armées et les capacités humaines de nos armées", conclut Aymeric Chauprade. Tant qu'il espère un scénario plutôt optimiste dans ce "Game of drones", le ciel européen, africain et proche-oriental est "dronisé" aux couleurs américaines.

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