Un autre mouvement radical — le HAMAS — est reconnu comme terroriste en Israël, au Canada, aux Etats-Unis, au Japon. Mais pas en Europe. La Cour de justice de l'UE a rayé le HAMAS de la liste des organisations terroristes. Qui est donc terroriste et qui ne l'est pas? Quel est ce seuil de tolérance, qui permet de distinguer un groupe légal d'une faction terroriste? Ou bien en ce cas l'utilité politique prévaut?
Un mois à peine après que la Cour de justice de l'UE eut exclu le HAMAS de la liste de « très dangereux » la chef de la diplomatie européenne Federica Mogherini annonçait déjà l'intention de Bruxelles de faire appel de cette décision. Les Européens semblent ne pas pouvoir s'orienter dans leur propre mécanisme de classement des organisations comme terroristes. En Russie il n'y a pas de tels problèmes, remarque Stanislav Ivanov, collaborateur scientifique principal à l'Institut de l'économie mondiale et des relations internationales et à l'Institut de l'Orient auprès de l'Académie russe des sciences:
Le mécanisme permettant de porter un groupe sur la liste des organisations terroristes en Russie est compréhensible et transparent. Les services spéciaux préparent une présentation des preuves au Parquet, lequel saisit la justice qui se prononce. A ce jour une vingtaine d'organisations figurent sur la liste des interdites dans notre pays. Aux Etats-Unis une telle liste comprend 45-50 groupes et mouvements. Celle des Nations Unies en compte plusieurs centaines. On constate la différence des approches et des standards.
D'autre part, de telles approches aussi variables peuvent être attribuées à la politique des autorités européennes de ne pas « brûler les ponts ». Voici l'avis d'Alexandre Demtchenko, collaborateur scientifique du Centre des études arabes et islamiques à l'Institut de l'Orient auprès de l'Académie russe des sciences:
Ils (les politiques) laissent ainsi la porte ouverte à d'éventuels pourparlers et contacts avec le HAMAS. Ils ne rejettent pas la possibilité d'un dialogue à l'avenir. Des recommandations nettes des médiateurs internationaux ont été formulées en 2006 après la victoire du HAMAS aux législatives en Palestine: reconnaître toutes les ententes israélo-palestiniennes précédemment conclues, renoncer aux méthodes de lutte armée et reconnaître le droit d'Israël à l'existence. Le mouvement ne l'a pas fait.
Or l'absence de critères uniques dans la lutte anti-terrorisme pour le moment ne fait qu'aggraver la situation. Alors que les leaders cherchent à élaborer une position concertée, les extrémistes se livrent sans entrave à leurs activités criminelles. Des approches doubles permettent au terrorisme international de garder ses forces, voire les accroître, de propager son idéologie et influence. On ne saura combattre le terrorisme à coups des actions isolées des efforts épars. Des normes juridiques doivent être élaborées sous les auspices de l'ONU, les listes doivent être ramenées à un dénominateur commun. Si quelqu'un est terroriste il doit être considéré comme tel dans le monde entier. Rien de plus simple, paraît-il. Mais la question s'avère trop compliquée, souvent même insoluble pour certains pays occidentaux.
Les opinions exprimées dans ce contenu n'engagent que la responsabilité de l'auteur.