Nous proposons à votre attention le deuxième article de l'expert du Centre d'analyse des stratégies et des technologies Vassili Kachine qui évoque pour le site Sputnik certains détails de cette transaction retentissante. Dans son premier article l'auteur a signalé que la Chine aurait pu acheter le Varyag à l'époque de l'URSS, mais les négociations n'ont pas abouti à cause d'une pénurie de finances.
L'intérêt pour le porte-avions s'est réveillé quand le financement de sa construction avait été définitivement arrêté. Les Chinois n'étaient pas seuls à vouloir acheter le Varyag. Valéri Babitch, ancien chef d'études des porte-avions au chantier naval Tchernomorski (le chantier naval de la ville ukrainienne de Nikolaev qui a construit le Varyag), en a parlé dans une de ses interviews. Cependant la Chine en la personne de Xu Zengping était la plus persévérante et chanceuse.
Les Etats-Unis étaient peut-être prêts à débourser pour empêcher la vente du navire à la Chine, mais ils ne sont pas parvenus à déjouer la transaction. Il faut retenir que dans les années 1990 et plus tard aussi un système efficace de contrôle des exportations faisait défaut en Ukraine. Avec l'argent à sa disposition chacun pouvait acheter en Ukraine n'importe quelle arme ou documentation soviétique même si les Etats-Unis tentaient de l'empêcher au niveau politique.
Etant donné que Nikolaev était un grand centre soviétique de construction navale militaire et qu'au moment de la désintégration de l'URSS plusieurs navires y étaient en cale, les Chinois avaient toutes les possibilités d'acheter également divers types d'armes et d'équipements électroniques. Il est possible que ces ventes seront déclassifiées dans l'avenir.
L'information sur les tentatives des Chinois de transférer le Varyag à Macao ne faisait pas de doute sur l'objectif véritable de son achat. Les grands plans de la Chine relatifs à la création de sa flotte de porte-avions et son intérêt pour le Varyag étaient connus depuis longtemps. C'est qu'il était construit en Ukraine et que son projet a été développé par le bureau d'étude Nevskoïé de Saint-Pétersbourg. La Russie produisait également ses nombreux systèmes et les avions navalisés Soukhoï Su-33. A ce qu'on peut comprendre, de longues négociations ont été menées à la fin des années 1990 et au début des années 2000, mais elles sont restées sans résultat. Pékin a préféré achever la construction lui-même. Outre le Varyag, la Chine a acheté à l'Ukraine les prototypes des Soukhoï Su-33 et Su-25UTG et s'est mise à la tâche.
En Crimée qui appartenait à l'époque à l'Ukraine il y avait un polygone unique destiné à l'entraînement des pilotes de l'aviation embarquée. Les Ukrainiens ont autorisé aux spécialistes chinois l'accès de ce site doté d'un grand nombre d'équipements uniques utilisés sur les porte-avions, des brins d'arrêt compris.
L'accès aux échantillons du matériel soviétique resté en Ukraine a permis à la Chine de construire son propre porte-avions sans recourir aux importations officielles des technologies et des équipements depuis la Russie. Cela a permis évidemment d'économiser les finances, mais il est peu probable que l'économie fût considérable. D'autre part, les tentatives pour étudier indépendamment des systèmes aussi compliqués et de construire ses propres équivalents demandent de grosses dépenses et beaucoup de temps. Le porte-avions n'est entré en service qu'en 2012 et il est considéré plutôt comme un navire expérimental ou d'entraînement. Si sa construction et la création d'un chasseur navalisé spécial avaient été réalisées avec l'aide officielle de la Russie, un porte-avions chinois apte au combat aurait été prêt dès le milieu des années 2000.