A Hanovre tant les manifestants de Hagida, branche locale de Pegida, que leurs opposants ont jeté des bouteilles et des pétards sur les policiers, ou encore utilisé des pulvérisateurs du gaz poivre. Résultat: 24 activistes et cinq policiers ont été blessés, et encore 42 personnes arrêtées. Toutefois, les actions des anti-islamistes en Allemagne ne se limitent pas à des marches avec pancartes et bagarres dans les rues. Les leaders de Pegida se sont pour la première fois entretenus avec un représentant du pouvoir: le ministre de l'Intérieur de la Saxe Markus Ulbig.
Les manifestations de Pegida se déroulent à Dresde, Leipzig, Hanovre, Munich et Magdebourg, et les Anti-Pegida se rassemblent à Francfort-sur-le-Main, Brême, Fribourg, Hanover et Dresde.
Vladislav Belov, chef du Centre des études allemandes de l'Institut de l'Europe auprès de l'Académie des sciences de Russie, est certain que "si nous examinons en détails les exigences de Pegida sans surenchère radicale, nous verrons une volonté active d'intégrer les immigrés dans la culture allemande". "L'autre partie de la société craint que Pegida et ses filiales, visiblement anti-islamistes, évoluent vers un radicalisme de droite et ressuscitent dans la société l'intolérance envers les étrangers. C'est ce qui explique la formation de ces deux opinions contradictoires dans la société", estime-t-il. D'après lui, Pegida suscitera des impulsions positives pour la renaissance d'une politique multiculturaliste optimale en Allemagne. "Nous assisterons encore à la naissance de beaucoup de "filles" de Pegida, ce qui se soldera par de nouveaux programmes politiques des partis établis: les hommes politiques allemands ont toujours su comprendre les humeurs de la société et s'y adapter", fait remarquer Vladislav Belov.
Ce flot de contestations a également mené à la création des Patriotes européens contre l'américanisation de l'Occident (Pegada). Il y a quelques jours, ses activistes sont pour la première fois descendus dans les rues d'Erfurt, rencontrant plusieurs centaines de leurs opposants sur la place de la gare. Les policiers ont surveillé la manifestation sans comprendre qui défendait tel ou tel point de vue. "Ce groupe était très disparate: ils se prononçaient pour le véganisme, protestaient contre la guerre en Ukraine, portaient des drapeaux russes et israéliens, appelaient les Américains à foutre le camp", affirme un représentant de la police.
"De nombreux Allemands considèrent la guerre en Ukraine comme un conflit géopolitique entre la Russie et les États-Unis. L'antiaméricanisme ayant toujours été présent dans la société allemande, les drapeaux russes aperçus dans la foule des manifestants sont plutôt un symbole de la protestation contre la politique américaine plutôt que d'un soutien envers la Russie. En général, la question ukrainienne est débattue principalement par les élites, alors que la société allemande s'inquiète plutôt des réfugiés d'Afrique du Nord et de l'islamisation", conclut Alexander Rahr, directeur de recherches du Forum russo-allemand.