Les think tanks américains accusent la Russie de tous les maux

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En janvier 2015, les think tanks américains n'ont pas ménagé leurs efforts pour déclencher une guerre en Ukraine et convaincre l'opinion publique que la Russie n'avait pas de droit de riposter à la progression des forces de l'OTAN vers ses frontières.

Alors que les responsables russes, ukrainiens, français et allemands tentaient de s'accorder sur un cessez-le-feu en Ukraine et des mesures de règlement du conflit, les diplomates américains promouvaient leur vision de la situation par le biais des centres analytiques les plus connus de Washington.

D'après eux Vladimir Poutine élargit rapidement les frontières russes, ce qui menace non seulement l'indépendance de l'Ukraine mais aussi la paix et le bien-être dans le Caucase et les pays baltes. Ils ne faisaient en réalité que justifier l'extension agressive de la zone d'action de la machine de guerre des États-Unis et de l'OTAN, ainsi que le "gonflement des muscles" de l'alliance atlantique.

Steven Pifer, ancien ambassadeur américain en Ukraine, et Strobe Talbott, ancien vice-secrétaire d’État américain, étaient à la tête de cette attaque de propagande au sein de la Brookings Institution.

En évoquant sa carrière, Strobe Talbott a fait remarquer qu'il avait rencontré Vladimir Poutine dans les années 1990. A l'époque, ce dernier lui avait semblé être un agent classique du renseignement russe, qui voulait protéger son pays des services secrets étrangers voulant détruire son État. Une préoccupation tout à fait logique: M. Talbott en sait sans doute beaucoup sur les opérations de ce genre.

Strobe Talbott apprécie la politique d'Eltsine — "un homme d’État très positif du point de vue historique" — mais dénonce la "vision paranoïaque de l'histoire" de Poutine. D'après lui, cela s'explique par  le "ressentiment de la Russie qui est sûre que l'Occident l'humiliait sans cesse, se montrait complaisant et se servait de ses faiblesses".

D'après lui, pour "lutter contre le nationalisme très agressif et intolérant" de Poutine, l'alliance atlantique a besoin de "réanimer la politique d'endiguement", créer des liens avec le secteur privé russe et les "élites au pouvoir" afin de former une alternative politique capable de s'intégrer entièrement aux institutions internationales. Sans la protection de l'OTAN, la Russie aurait déjà envahi l'Estonie et la Lettonie, affirme-t-il.

Mais aujourd'hui, ce sont bien les chars de l'OTAN qui sont dans les pays baltes. L'alliance renforce les positions conquises lors de la guerre froide et Talbott ne voit aucun rapport entre cette tactique et la vision de la Russie, qui est de plus en plus certaine que l'Occident veut profiter de ses avantages.

La Brookings Institution a également publié l'analyse de Steven Pifer intitulée "Le cessez-le-feu dans l'est de l'Ukraine: les sanctions peuvent-elles changer les plans de la Russie?" Ce texte est consacré à l'efficacité des sanctions comme moyen d'obtenir des concessions de la part de la Russie sur la question ukrainienne. Pifer décrit un paysage idyllique selon les maquettes des autorités ukrainiennes et rappelle leurs propositions: "La décentralisation des pouvoirs aux gouvernements régionaux, un statut spécial pour la langue russe, le dialogue entre l'UE, l'Ukraine et la Russie concernant l'allègement des conséquences de l'accord d'association entre l'UE et l'Ukraine pour les relations économiques russo-ukrainiennes, un renoncement temporaire à toute tentative de s'intégrer à l'OTAN".

Puis il accuse Moscou d'adopter une "attitude peu sérieuse envers ces idées", malgré la signature récente par le président Porochenko de la loi sur l'annulation du statut non-aligné de l'Ukraine permettant de lancer le processus d'intégration de Kiev à l'OTAN, qui pourra durer quelques années. Ensuite, il condamne la position de la Russie qui n'est pas d'accord avec la décision qui "permettra à Kiev de reprendre le contrôle total de Lougansk et de Donetsk", une perspective de moins en moins populaire en plein bombardement de ces villes par Kiev.

En conclusion, Pifer fait plusieurs affirmations hypothétiques qui montrent qu'il ne sait rien sur l'efficacité des sanctions en tant que moyen capable de garantir l'adoption de telle ou telle décision ou d'autres options de résolution de la crise.

Mais ce n'est pas seulement la Brookings Institution qui présente une vision si déformée des événements. Ian Brzezinski, fils de Zbigniew Brzezinski et ancien assistent du ministre américain de la Défense pour l'Europe et l'Otan, fait remarquer que janvier 2015 est "un mois important pour former le rôle des Etats-Unis en Europe". Un milliard de dollars pour l'initiative de soutien à l'Europe octroyés en décembre par Obama, un rapport sur la politique russe élaboré par le Conseil de sécurité nationale, une étude de la réorganisation des forces européennes qui a pris deux ans et a été présentée en janvier, la prochaine rencontre des pays de l'OTAN pour évoquer un "plan d'action visant à augmenter l'aptitude au combat"… Tout cela témoigne, selon lui, de la "volonté du président Obama de répondre à l'agression militaire et la pression de la Russie".

Cette peur de l'agression russe pousse Brzezinski à soutenir "l'élargissement de la présence des forces américaines en Europe à l'aide d'entraînements, de manœuvres et de rotation des unités", ainsi que "l'augmentation du nombre et de l'envergure des exercices, le renforcement des patrouilles aériennes de l'OTAN en Baltique, la consolidation des forces de réaction de l'Alliance".

D'après Brzezinski, Pifer et Talbott, les troupes des États-Unis et de l'OTAN ont le droit d'être présentes dans n'importe quelle partie de l'Europe mais, tout de même, c'est bien la Russie qui est la seule source d'une pression militaire défavorable.

Une telle négligence par rapport à la réalité ne fait que pousser l'Ukraine vers la guerre. Les autorités de Kiev, soutenues par l'Occident, savent parfaitement que leurs sympathisants américains continueront d'accuser la Russie de tous les échecs des tentatives d'arrêter la guerre civile en Ukraine.

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