Voyage. Taroussa, âme de la Russie

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« J’habite une petite ville au bord de l’Oka. Toutes ses rues débouchent soit vers le fleuve, soit vers les champs, où le vent fait agiter les épis, soit encore vers la forêt, où au printemps les merisiers à grappes fleurissent entre bouleaux et pins ». C’est ainsi qu’un écrivain soviétique évoque Taroussa. Plusieurs décennies écoulées depuis ne changent rien dans l’aspect de cette petite ville.

Située à 140 km au sud de Moscou, Taroussa est un vrai musée à ciel ouvert. La plupart de ses bâtiments, étagés ou non, datent du 19e siècle. La bourgade se trouve à l’écart du chemin de fer et des autoroutes nationales et n’a pas de grosses entreprises industrielles. En revanche, elle offre à la vue de très beaux paysages, qu’on peut admirer à l’infini.

Taroussa attire de tous temps des créateurs, capables de ressentir vivement une vraie beauté. Le sort des nombreux écrivains, poètes, peintres et compositeurs est lié à celui de cette petite ville. On appelle souvent Taroussa « l’âme de la Russie ». Et on la garde soigneusement : la ville obtient le statut de site naturel et de monument d’architecture, figure sur la liste des villes historiques de Russie.

Ces lieux de félicité sont peuplés depuis des temps immémoriaux : les archéologues trouvent des sites datant du 15esiècle d’avant J.C. Une première mention de Taroussa remonte au 1246 ; à l’époque de morcellement féodal elle est capitale de l’une des principautés. Petit à petit les terres russes sont rassemblées sous l’autorité de Moscou, et privée de son statut d’antan, Taroussa devient l’une des forteresses protégeant les limites méridionales de Rous. A force de contempler ces lieux fascinant il est difficile de croire qu’ils sont jadis l’arène d’âpres batailles, et que les eaux de l’Oka deviennent rouges du sang des guerriers tués. A part des invasions ennemies, Taroussa martyr connaît dans son histoire d’autres malheurs. Au milieu du 17e siècle la peste anéantit presque sa population, et un centenaire plus tard un violent incendie détruit la ville.

En 1779 l’Impératrice russe Catherine II ordonne de reconstruire Taroussa. La ville a de la chance avec les architectes. Le plan des quartiers et des rues s’avère si heureux qu’il se conserve jusqu’à nos jours, devenant un monument de l’art urbanistique russe. La place principale de Taroussa se trouve sur la rive de l’Oka et est dominée par l’église de pierre blanche des apôtres Pierre et Paul. Deux grandes rues, partant de la place, traversent les quartiers d’habitation de l’est à l’ouest. Reconstruite après l’incendie, Taroussa s’inscrit de façon idéale dans le paysage.

A la fin du 19e siècle la petite cité pittoresque au bord de l’affluent de la Volga devient un lieu de repos de prédilection de la bohème de la capitale russe. Bien des artistes connus représentent les paysages envoûtant de Taroussa sur leurs tableaux. La vue qui les séduit le plus est celle qui s’ouvre du haut du mont de Résurrection. Un espace infini de verdure et des près, la bande scintillante au soleil du fleuve, l’azur éblouissant d’un ciel sans fond… Quel peintre renoncera à reproduire cette beauté sur sa toile ?

Les artistes s’adonnent à la peinture sur le mont de Résurrection, tandis que les poètes cherchent leur inspiration dans la Vallée des rêves, ravin peu profond, longeant la banlieue méridionale de Taroussa. Un lieu étonnant, presque mythique. Des ufologues y entrevoient une « zone anomale », exerçant une domination irrésistible sur l’homme. Or cette influence est exclusivement bienfaisante : ici on oublie tous les problèmes et revers de fortune, un sentiment de béatitude vous gagne. En été les pentes du ravin sont recouvertes de fleurs champêtres, le silence n’est rompu que par le chant des oiseaux. La femme poète russe Marina Tsvetaïeva baptise ce coin merveilleux de Valée des rêves. Elle chante sa Taroussa aimée dans bien de ses poésies. Les habitants reconnaissants érigent un monument à Tsvetaïeva sur la rive de l’Oka.

Les citadins adorent leur ville et s’en soucient, parfois au détriment de leurs propres intérêts. Ainsi, ils refusent un projet d’un embranchement de chemin de fer, préférant faire 20 km en bus de la station ferroviaire la plus proche. Les habitants de Taroussa craignent que les biens de la civilisation contemporaine de perturbent le charme fragile, vierge de leur ville natale, si russe.

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