Bien que le nouveau Cabinet ukrainien existe depuis moins d’une semaine, les fondements traditionnels de l’Etat craquent déjà sous toutes leurs coutures. Les droits des citoyens à l’enseignement gratuit et à la santé publique gratuite, ces conquêtes du communisme dont les habitants de l’ex-URSS ont profité pendant près d’un siècle, deviennent l’apanage du passé. Il revient trop cher de former et de soigner les Ukrainiens, a décidé la ministre des Finances Natalie Jaresko. Cette citoyenne des Etats-Unis a reçu une carte d’identité ukrainienne avec le portefeuille ministériel le 2 décembre dernier. Deux ou trois jours lui ont suffi pour s’initier à la vie du peuple ukrainien et comprendre quels engagements sociaux de l’Etat étaient « superflus ». Voici le commentaire d’Oleg Nemenski, expert à l’Institut russe de recherches stratégiques.
« L’Ukraine vit maintenant au jour le jour. Le gouvernement ne pense pas comment le pays pourrait subsister sur le plan stratégique, comment préserver le peuple ni comment développer l’Ukraine. Il a pour tâche de trouver des fonds supplémentaires dans le budget. De ce point de vue, les ministres d’origine étrangère conviennent parfaitement. C’est bien sûr une très forte atteinte aux Ukrainiens mais c’est finalement à eux de choisir. »
Les autorités ukrainiennes actuelles sont nées d’un coup de force armé en février 2014. Le Donbass réfractaire a eu droit à des tirs d’artillerie et à des bombardements aériens. L’Ouest et le centre du pays ont soutenu le coup de force et se sont procurés un gouvernement d’étrangers qui se propose de soumettre définitivement l’Ukraine à l’Occident. Une personne instruite peut se forger son propre avis… L’Etat ukrainien n’a donc pas besoin de citoyens instruits. L’enseignement ne doit être que payant. Les parents ont économisé de l’argent pour l’instruction de leur enfant… Qu’il reçoive donc moins de connaissances en faisant ses études secondaires pendant neuf ans et non pas pendant 11 ans comme aujourd’hui. Quant à la science, l’Ukraine n’entend pas la développer du tout : elle renoncera à financer des projets scientifiques, à payer des bourses d’études aux boursiers de thèse et à verser des suppléments de salaire aux chercheurs. Les Ukrainiens seront alors opprimés et ignorants dès la génération suivante. Ils seront aussi défavorisés et peu nombreux parce que rares seront les familles qui oseront mettre au monde un enfant et surtout deux enfants. Comme il n’y aura pas d’allocations de maternité, il n’y aura pas non plus d’aliments gratuits pour bébés. Les emplois manqueront eux aussi : il est prévu de réduire le personnel du secteur public et d’augmenter les impôts pour les milieux d’affaires.
Pour ceux qui n’ont pas compris, tout cela se fait « au nom de l’Ukraine », a déclaré le ministre des Affaires sociales Pavlo Rozenko. Et de promettre que les Ukrainiens apprécieraient les activités du gouvernement dans deux ou trois ans. Les Ukrainiens ne manqueront certainement pas de le faire mais on se demande quelle sera cette appréciation. /N