- L’OTAN, dans quelle mesure a-t-elle su réorienter sa politique à l’égard de la Russie et des pays d’Europe de l’Est après la dissolution du Pacte de Varsovie ?
- Je ne comprends pas tout à fait la question. Le Pacte de Varsovie n’existe pas depuis longtemps. Les pays membres ont décidé de le dissoudre, c’est un fait historique. En ce qui concerne l’OTAN, elle a envisagé son avenir à la réunion à Londres en 1990 et tous les alliés ont conclu qu’il fallait poursuivre leurs activités.
- N’allons donc pas mettre l’accent sur les conditions historiques. Il n’y a pas eu de changements radicaux dans les activités de l’OTAN. Alors je pose une question concrète concernant la Russie et l’OTAN. L’OTAN, quels actes attend-elle de la Russie ?
- Si l’OTAN s’occupait ces 24-25 dernières années des menaces et de la situation qui s’est créée pendant quarante ans depuis sa fondation, il conviendrait d’évoquer l’histoire. Cependant, l’OTAN s’occupe toujours des menaces et des défis réels. Comme on dit, « modus operandi » : l’OTAN n’invente pas de défis artificiels, un ennemi ou un adversaire. Nous sommes alliés, nous nous occupons des défis qui sont, à notre avis, essentiels. Nous revenons maintenant à la question principale relative aux rapports avec la Russie. Dans les années 1990 les efforts substantiels ont été déployés pour promouvoir les relations sur la base de nouveaux principes, dans une nouvelle forme, avec de nouveaux sujets. Les alliés et la Russie ont investi dans ces relations, c’était tout ce qui se produisait jusqu’aux récents événements qui nous ont conduits au point où nous sommes aujourd’hui. Il n’existe pas de coopération concrète. L’OTAN espère que la Russie reprendra le respect du droit international, qu’elle ne sera pas un pays déstabilisateur pour d’autres Etats, ce qui arrive, malheureusement, de l’avis unanime des membres de l’OTAN, jusqu’à présent. L’exemple de l’Ukraine le confirme. Nous avons sans doute en vue l’emploi de la force pour s’emparer du territoire de l’Ukraine, la Crimée et les récents actes de la Russie liés à l’Est de l’Ukraine.
- Pouvez-vous énumérer les démarches concrètes que la Russie devrait faire pour reprendre la voie dont vous parlez. Ce sont en fait des démarches concrètes, ou c’est pour le moment un plan abstrait ?
- L’OTAN n’est pas une institution abstraite, nous essayons toujours d'être très concrets, nous l’avons réaffirmé plus d’une fois. Vos médias le constatent très rarement et l’on ne saurait que le regretter. Dans l’Est de l’Ukraine il s’agit de la frontière entre l’Ukraine et la Russie qui n’existait pour ainsi dire pas du point de vue de la Russie : on y assiste à une libre circulation des personnes, de l’argent, des armes et des militaires ce qui est, bien sûr, illégal et influe sur la situation dans l’Est de l’Ukraine. Cela est loin de contribuer à réaliser le Traité de Minsk, juste le contraire. Nous souhaitons en premier lieu que la Russie suspende le soutien militaire des séparatistes dans l’Est de l’Ukraine.
- Nous envisageons ce que l’OTAN attend de la Russie, qu’est-ce que la Russie doit faire mais vous êtes en Russie, à Moscou, vous voyez les réalités. Comment sont, à votre avis, les perspectives du développement de nos relations ? Le remplacement de Dmitri Rogozine, personnalité en vue dans la politique russe, par Grouchko moins connu en la matière, ne reflète-t-il pas l’affaiblissement de l’intérêt de la Russie aux activités de l’OTAN ?
- Premièrement, l’une des crises les plus sérieuses sinon la plus grave est la crise dans les relations entre l’OTAN et la Russie, non seulement entre l’OTAN et la Russie. C’est un fait. Deuxièmement, et c’est aussi un fait, je me trouve et je travaille à Moscou, je lis vos médias. Il convient de conclure logiquement que tout ce qui est écrit concernant l’OTAN en Russie et comment cela est écrit – tout cela est désespéré à cent pour cent. L’OTAN est présentée comme une menace effrayante, un monstre qui ne fait que nuire à la Russie. Il n’en est pas sans doute ainsi. Pourquoi j’évoque des sujets anti-OTAN voire anti-Occident ? Ils nous empêchent sérieusement aujourd’hui et diminuent les chances d’assurer une évolution prometteuse des événements. Je suis convaincu, je sais que tous les pays de l’OTAN et l’alliance dans son ensemble voudraient reprendre les relations normales, valables, orientées vers le partenariat entre la Russie et l’OTAN. Ce sont nos souhaits. Nous n’avons pas besoin, nous n’aspirons pas à une confrontation avec la Russie.
En ce qui concerne les questions liées aux personnalités, il serait incorrect de ma part d’apprécier les diplomates russes actuels ou leurs prédécesseurs. Chaque pays désigne son représentant. Quant à moi, je ne comprends pas pourquoi vous dites que l’ambassadeur Grouchko est inconnu. Je le connais depuis plusieurs années, c’est un diplomate expérimenté qui s’occupe des relations entre l’OTAN et la Russie.