Contrairement aux promesses, les gagnants des législatives anticipées ukrainiennes n'ont pas réussi à s'entendre rapidement sur la constitution d'une majorité dirigeante et ses principes de travail, écrit vendredi 31 octobre le quotidien Rossiïskaïa gazeta.
Les projets d'accords de coalition publiés par le président et le premier ministre comportent des normes mutuellement exclusives, qui promettent une longue recherche d'un consensus, ainsi qu'une instabilité des pouvoirs législatif et exécutif.
Mercredi dernier, le Bloc de Piotr Porochenko et le Front populaire d'Arseni Iatseniouk ont organisé une sorte de compétition pour savoir qui sera le premier à annoncer les conditions pour former la majorité. La victoire revient au président à tous les niveaux: son administration a préparé le texte avec trois heures d'avance, et le document en soi s'est avéré fondamental – 48 pages contre seulement 3 pages pour le premier ministre. En revanche, Iatseniouk a été le premier à renoncer aux conditions avancées par le président en déclarant que conformément aux traditions européennes le droit de former la coalition et proposer le premier ministre revient au vainqueur, c'est-à-dire au Front national dont il est leader, qui devance le bloc présidentiel sur les listes de parti de 0,4%.
La constitution d'une coalition est requise par la Constitution, mais le processus en soi n'est aucunement formalisé, ce qui contraint les politiciens ukrainiens à le recommencer à zéro à chaque fois. Le litige semble également insoluble étant donné que le Front populaire qui a formellement remporté les élections reçoit de facto au parlement moins de sièges que le Bloc de Porochenko. Selon les premières estimations, la fraction présidentielle comptera au moins 130 députés grâce aux mandats uniques, et la fraction du premier ministre – 90 députés tout au plus.
De ce fait, Porochenko suggère de constituer auprès de la majorité deux organismes dirigeants – un Conseil de la coalition et une Assemblée de la coalition. Sachant que principe proposé pour former le Conseil – un représentant pour chaque quinzaine de députés de la majorité – lui donne la possibilité de contrôler les décisions qui y seraient prises. Celles-ci sont ensuite approuvées par l'Assemblée si les deux tiers des députés de chaque fraction de la majorité ont voté pour.
Le Front populaire estime ces conditions inacceptables et préconise de ne pas bureaucratiser le travail de la coalition et prendre des décisions par une majorité simple parmi tous les députés qui la composent. Selon les experts, ce principe donne cette fois un avantage à Iatseniouk, qui compte sur le soutien du parti Patrie et du Parti radicale d'Oleg Liachko avec Samopomochtch. Par ailleurs, tous ces partis ont reçu les invitations pour participer aux consultations de coalition aussi bien de la part du président que du premier ministre.
Mais bien que les positions des parties divergent, les médias ukrainiens annoncent déjà en se référant à leurs "sources du gouvernement et de l'administration" des ententes dans les couloirs sur la future répartition des fonctions. Selon la presse, le président du parlement
Alexandre Tourtchinov sera remplacé par le vice-premier ministre Vladimir Groïsman, alors que le Bloc d'opposition récupérera le poste de vice-président du parlement et plusieurs comité parlementaires "humanitaires".