Quel rôle est réservé pour la Russie dans la région Asie-Pacifique ? (Partie 2)

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Quel rôle est réservé pour la Russie dans la région Asie-Pacifique ? (Partie 2) - Sputnik Afrique
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Le chef du département des relations internationales à l’Ecole des Hautes études des sciences économiques de Moscou Alexandre Loukine, qui vient de publier un livre sur la réorientation de la politique extérieure russe sur l’Asie, explique dans un entretien accordé l’Agence d’information internationale Rossiya Segodnya pourquoi la Russie doit interagir avec les pays de la région Asie-Pacifique.

Rossiya Segodnya : Ce n’est plus un secret pour personne : à l’heure actuelle la Russie commence à se rapprocher des pays d’Asie. Mais dans cette région subsistent de nombreux conflits qui n’ont pas été résolus. Comment la Russie doit-elle réagir, par exemple face aux relations tendues entre la RPC et le Japon ?

Alexandre Loukine : Nous devons avoir de bonnes relations avec tous les pays d'Asie. Nous ne devons pas nous impliquer dans leurs conflits ou soutenir un des deux parties. C’est à l’avantage de la Russie de maintenir des relations pacifiques pour la seule raison qu’elle doit entretenir des relations commerciales, économiques et politiques avec tout le monde et ne pas se retrouver dans une situation où elle devrait faire un choix. Il ne faut pas choisir par exemple entre la Chine et le Japon, entre la Chine et le Vietnam, ou entre la Chine et de l'Inde. Ils sont tous nos partenaires. En effet, les améliorations dans les relations, notamment entre la Chine et l’Inde, c’est à l’avantage de la Russie, car cela correspond à ses intérêts. Mais, d'autre part, il faut aussi analyser l’attitude que ces pays ont envers nous. Si le Japon a soutenu les sanctions, nous devons lui montrer que nous ne sommes pas satisfaits par cette décision. Et que nous avons des alternatives en matière de la collaboration commerciale et économique. Par exemple, la Corée du Sud cherche activement à obtenir l’accès aux marchés, en profitant des sanctions. Il faudrait donc acheter plus de voitures sud-coréennes, et construire des usines automobiles en collaboration avec la Corée du Sud.

Nous nous rendons compte que le Japon ne soutient pas entièrement les sanctions envers la Russie. Il le fait sous la pression des Etats-Unis. Mais d’autre part, malgré le fait que la Corée du Sud entretient le même type de relations avec les Etats-Unis, et dépend peut-être même plus de la politique américaine que le Japon, notamment en matière de sécurité, elle refuse de soutenir les sanctions envers la Russie. Il nous faudrait encourager cette attitude.

Rossiya Segodnya : Selon vous, la Russie est-elle capable de jouer un jeu intelligent au sein de la région Asie-Pacifique ?

Alexandre Loukine : Ce sont des diplomates et les dirigeants du pays qui mènent ce jeu. Mais tout ne dépend pas des diplomates. Si la politique qui est menée par notre pays est équilibrée, mais elle n’est pas soutenue par des mesures économiques réelles et le développement économique, la diplomatie en soi ne peut pas faire grand chose. Notre problème principal en ce qui concerne la région Asie-Pacifique – c’est le manque d’implication dans les processus économiques. Du point de vue politique, nous sommes membre de toutes les organisations, nous participons aux grands forums et rencontres du haut niveau. Mais nous sommes toujours perçus comme un participant extérieur, un pays européen, car du point de vue économique nous sommes toujours impliqués dans des processus économiques avec l’Europe. Mais maintenant, la situation géopolitique fait tourner notre économie vers la région Asie-Pacifique. Les produits importés d’Europe sont remplacés peu à peu par les produits que nous produisons, et le reste est compensé par des produits d’Asie. Et je pense que nos élites économiques doivent s’orienter vers l’Orient. Lorsque ce changement va s’opérer, la diplomatie russe pourra agir plus facilement, car tout un pays restera dressé derrière. Quant aux diplomates chinois, toute l’économie chinoise se trouve derrière eux. C’est la raison pour laquelle la Chine ne s’invite dans aucune organisation, et surtout dans des organisations asiatiques. On l’invite à tous les événements, car sans la Chine aucune question ne peut être résolue. La Russie doit adopter la même position. Elle doit avoir un poids économique aussi important en Asie, que sa présence doit être nécessaire pour résoudre tout problème important.

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