La découverte a été faite par une expédition internationale organisée par l'Institut extrême-oriental de volcanologie et de sismologie de l'Académie des sciences de Russie. Les échantillons ont été transférés à l'Institut. Les spécialistes espèrent que leur analyse permettra de faire la lumière sur l'énigme des tunnels de lave de l'un des plus beaux volcans du Kamtchatka.
Par sa taille, le Tolbatchik est le deuxième volcan russe en activité derrière le Klioutchevskoï. Il mesure 3 682 mètres. Son cône volcanique a plus de deux kilomètres de long. Les touristes affluent pendant toute l'année pour admirer l'éruption de ce géant dont la durée est sans précédent : le volcan ne s'est calmé qu'en 2013. Il a une autre qualité unique : parmi les autres volcans actifs du Kamtchatka, lui seul émet du magma basaltique. Ce fait est apparemment devenu la cause de la découverte inattendue, estime Alexandre Belooussov, participant à l'expédition du laboratoire du volcanisme actif de l'Institut de volcanologie et de sismologie :
« Pendant un mois, près d'un kilomètre cube de lave basaltique a été émis. C'est une très grande éruption. La lave basaltique est liquide, elle coule à des grandes distances. Elle se solidifie à la surface, mais sa partie intérieure continue de couler, ce qui forme à l'intérieur de grands espaces vides nommés tunnels de lave. »
C'est dans ces tunnels ou cavernes, comme les nomme le chercheur, que les trouvailles ont été faites : des stalactites et des stalagmites formées par des minéraux jamais vus. En tout état de cause leur composition est méconnue, souligne Alexandre Belooussov dans un entretien à La Voix de la Russie :
« En apparence, cela ressemble à la glace. Elles sont à moitié transparentes, légèrement blanchâtres, parfois jaunâtres. Leur taille est suffisamment grande : plus d'un demi-mètre de long et cinq centimètres de diamètre. Cependant nous ne savons pas à partir de quels minéraux elles sont formées. Nous supposons que ce sont des chlorides de métaux. Actuellement nous sommes en train d'étudier leur composition. »
Le chercheur explique le caractère unique de cette trouvaille volcanologique par le fait que d'habitude, les spéléologues étudient des cavernes karstiques. Dans ces cavernes les stalactites et les stalagmites ont une composition différente : elles se forment suite à la dissolution par l'eau des calcaires et des plâtres. Ici les cavernes sont de lave et c'est une toute autre histoire :
« Dans les cavernes de lave il y a aussi des stalactites et des stalagmites, mais elles sont formées par un magma refroidi qui coule depuis le plafond et se solidifie sous forme de chandelle ou au fond de la caverne. Pourtant les cavernes basaltiques sont chaudes et les chercheurs ne peuvent y pénétrer que plusieurs années, voire même des centaines et des milliers d'années, après leur formation. Mais les stalactites et les stalagmites sont composées de minéraux facilement diluables. Si la concentration des sels contenus dans l'eau baisse, l'eau pure commence à couler, détruisant graduellement les stalactites et les stalagmites. »
Si on jette un fragment de ce minéral dans l'eau, il sera dilué presqu'aussitôt, comme le sel de cuisine. Quant aux stalactites et les stalagmites karstiques, il faut un millier d'années pour les diluer. Les chercheurs ont eu de la chance de pénétrer dans les tunnels de lave moins d'un an après la fin de l'éruption du Tolbatchik. « En quelque sorte c'était un record, grâce à quoi nous avons vu ce que personne ne voit d'ordinaire », a souligné le volcanologue. Les spécialistes promettent de découvrir le mystère du Tolbatchik dans deux ou trois semaines. Les échantillons seront soumis à une analyse chimique et aux rayons X et étudiés avec un microscope électronique à balayage. Alors, seulement, l'énigme d'un des plus beaux et étonnants volcans du Kamtchatka sera résolue. /N