Qu’est-ce qu’on retient du 36e Festival International du Film de Moscou

Qu’est-ce qu’on retient du 36e Festival International du Film de Moscou
S'abonner
Un mélange d’excitation et de sérénité crée un cocktail enivrant des grands festivals d’art.

Hélas… Le Festival est fini. On a enroulé les tapis rouges. On a démonté les bureaux et rendu les plantes vertes aux loueurs… Cette fête du cinéma est finie…

Le Festival international du Film de Moscou crée en 1959, garde une approche traditionnelle de présenter les principales tendances du cinéma international. Il y avait pour tous les goûts : une compétition internationale, un programme compétitif « Perspectives » pour les jeunes réalisateurs, les films expérimentaux et des rétrospectives.

Bien entendu, il y a des résultats officiels. Le Grand Prix, « Saint-Georges d’or » revient au film japonais « Mon homme », réalisé par Kazuyoshi Kumakiri. Le Prix spécial du Jury, « Saint-Georges d’argent» a été attribué au film turque « La prunelle de mes yeux »

Mais il y a aussi des résultats qui ne peuvent pas être mesurés par prix et récompenses. La lumière d’enthousiasme dans les yeux des cinéphiles. Le pas élastique des spectateurs qui ont peur de rater la séance. La banalité exceptionnelle des rencontres des Maîtres du monde du cinéma dans les cafés avant les rencontres avec le public. Le défilée des plus belles actrices dans les robes du soir, sur le tapis rouge des projections exceptionnelles. Tout ce mélange d’excitation et de sérénité qui crée un cocktail enivrant des grands festivals d’art.

Pour revivre l’atmosphère du Festival nous avons rencontré un membre du Jury, producteur du cinéma Laurent Danielou.

La Voix de la Russie. Quel mot choisirez-vous pour déterminer ce Festival à Moscou?

Laurent Danielou. Agréable. Je vois les films toute la journée. Je vois 18 films du monde entier sur le grand écran.

LVdlR. Y a-t-il quelque chose qui qualifie particulièrement le Festival de Moscou? Par rapport à d’autres festivals que vous connaissez…

Laurent Danielou. Je viens au Festival de Moscou depuis vingt ans et il a beaucoup changé. J’ai découvert le Festival pendant la perestroïka, ou c’était politiquement un festival important qui a participé dans la bataille des changements du milieu culturel. Aujourd’hui on est dans le paysage plus calme et assagie de tout le point de vue.

Ce Festival est sans doute moins une fête pour les moscovites qu’il ne l’était avant. Puis que avant c’était la seule possibilité de voir les films moins autorisés. Je pense qu’aujourd’hui, pour les Moscovites qui ont accès à tout, sur Internet ou dans les salles de cinéma, c’est moins central que cela n’a été.

C’est difficile de faire un festival dans une grande ville. Festival de Paris, par exemple, est beaucoup plus petit que celui de Moscou. La seule capitale qui y arrive c’est Berlin.

LVdlR. Avant, c’est la politique et l’idéologie qui avait son chasse garde dans le cinéma. Maintenant, n’y a-t-il pas du joug de l’argent ? Si vous regardez la programmation dans les salles du cinéma moscovite – il y a beaucoup de films américains. Les films du festival sont différents. Pensez-vous que l’argent influence trop la distribution des films en Russie ?

Laurent Danielou. Je ne pense pas que ça soit l’argent. Avant la perestroïka on était dans le système ou il n’y a pas eu de films américains. Aujourd’hui il en a, ils sont très vus… comme en France, comme n’importe où… Heureux que les gens puissent voir les films. Le cinéma est divers. Nous aimons plus les films « art et essai » au sens large, quand la majorité cherche un divertissement. Et c’est le cinéma américain qui divertit le plus grand monde, et c’est plutôt heureux. S’il y a plus de films plus ambitieux pour un public plus exigeant - je ne connais pas plus la situation. A Paris, nous vivons la situation un peu particulière, avec beaucoup de cinémas et un système très bien organisé. Ici le cinéma coute assez cher. En France et en Europe, la majorité du public est âgé, alors qu’ici c’est le public assez jeune. C’est normal que la majorité des spectateurs soit pour les blockbusters que pour les films plus intellos.

LVdlR. Le Festival a été ouvert par un documentaire. Est-ce une tendance ? Le cinéma se rapproche plus de la vie ou la vie commence à ressembler à un film ?

Laurent Danielou. Je ne sais pas… En tous cas, le film d’ouverture (« Red Army » de Gabe Polsky) aurait pu aussi bien faire un film de fiction tout aussi formidable. Ce n’est pas anodin qu’il soit présenté à l’ouverture : il a très peu de films qui traitent de l’histoire de la Russie depuis 50 ans. On est obligé de prendre un documentaire, parce qu’il n’y a pas de fiction qui traite de cette histoire hallucinante et riche dramaturgiquement.

LVdlR. Vous connaissez très bien le cinéma russe. Avez-vous un chouchou ?

Laurent Danielou. Je chouchoute tous les cinéastes intéressants. Je suis très honoré que le président de mon Jury soit Gleb Panfilov, un immense cinéaste. En octobre, j’irai à la Maison du Cinéma, pour voir les nouveaux films russes. Parmi les jeunes réalisateurs, j’aime beaucoup Angelina Nikonova avec son film « Portrait aux crépuscules » J’ai bien aime le film de Micha Segal que j’ai vu hier. Et j’aime bien, bien sûr, les maîtres actuels du cinéma russe : Zviaguinsev, Lounguine, Sokurov…

LVdlR. J’ai eu l’occasion de voir « La Ritournelle », film de Marc Fitoussi, que nos auditeurs auront plus de chance de voir en France que les films russes…. C’est toujours un problème de distribution… Une leçon que j’en ai tirée : l’amour triomphe de tout ! Est-ce votre impression aussi ?

Laurent Danielou. Tout à fait ! C’est, d’ailleurs un très beau film. La même histoire que « Madame Bovary», en plus, qui se passe dans le même village, Yvetot. C’est une comédie, un peu décalée peut-être pour la Russie, parce qu’on y voit les fermiers éleveurs de vaches qui vivent plus comme des grands bourgeois. Je suppose que les fermiers vivent en Russie différemment. C’est décalé, mais c’est ça qui est intéressant aussi.

LVdlR.Et quel est votre idéal dans la vie ?

Laurent Danielou. C’est de découvrir ici…

LVdlR . Non… Plus. Dans la vie ? L’amour ? La carrière ?

Laurent Danielou. L’amour, évidemment !

Fil d’actu
0
Pour participer aux discussions, identifiez-vous ou créez-vous un compte
loader
Chat
Заголовок открываемого материала