En dépit de la participation de trois candidats à la course présidentielle, ce qui a permis aux autorités d'annoncer la première élection du chef de l'État avec une possibilité d'alternative, nul ne doute de la victoire du président sortant Bachar al-Assad, écrit jeudi le quotidien Kommersant.
Moscou considère l'élection syrienne comme libre et démocratique tandis que Washington la qualifie de "honte".
Le vote a définitivement entériné la division du pays entre la Syrie "du président Assad" et de larges régions contrôlées par l'opposition armée, qui n'ont pas participé au vote.
La présidentielle syrienne, à laquelle ont participé les habitants des régions contrôlées par les autorités (40% du territoire, où vivent plus de 60% des citoyens), a été de facto un référendum de confiance pour Bachar al-Assad dans la partie du pays qui n'est pas soumise au contrôle de l'opposition. Lorsqu'Assad a décidé de participer à l'élection en rejetant les exigences de démissionner formulées par l'opposition et l'Occident, les organisateurs ont tout fait pour présenter le vote comme libre et démocratique. Assad était donc en lice avec deux autres candidats – le communiste Maher al-Hajjar et le libéral Hassan al-Nouri.
Ce dernier a été l'un des premiers à parler d'une élection" démocratique et transparente" en sortant du bureau de vote. "La Syrie devient un pays où s'enracine le pluralisme et les opinions divergentes sont permises", a expliqué Hassan al-Nouri.
A son tour, le chef de la Haute commission judiciaire des élections, le juge Hicham al-Chaar, a rapporté un taux de participation très élevé qui a forcé les organisateurs à prolonger le vote de cinq heures. La présence d'observateurs internationaux devait également contribuer à la légitimité de la présidentielle. Des représentants de 30 pays ont suivi le déroulement du scrutin, notamment des députés russes, iraniens, brésiliens, vénézuéliens, nord-coréens, tadjiks, philippins et ougandais. Tous ont donné une très haute appréciation à cette élection, la décrivant dans un communiqué commun comme un "grand pas vers la stabilité et l'entente nationale" en Syrie.
Les jugements occidentaux sont diamétralement opposées. La porte-parole du département d'État américain Marie Harf a qualifié l'élection de "honte" et y voit une "perpétuation de l’héritage familial de 40 années de répression brutale". Le secrétaire général de l'Otan Anders Fogh Rasmussen a été tout aussi catégorique. "Ce vote ne répondait pas aux normes internationales. Aucun pays de l'Otan ne reconnaîtra son résultat", a-t-il déclaré.
Dans le même temps, ce scrutin a non seulement fixé le statu quo établi après trois ans de guerre, mais a également tiré un trait sur les efforts diplomatiques initiés par Moscou et Washington à Genève. La réélection d'Assad rend impertinentes toutes les exigences antérieures, posant sa démission comme une condition préalable à la réconciliation nationale, point sur lequel insistait l'opposition dans le cadre du processus de Genève.
La démission de l'émissaire spécial de l'Onu et de la Ligue arabe Lakhdar Brahimi, qui considère la présidentielle syrienne comme "un obstacle à la réconciliation nationale", confirme la nature obsolète de l'ancien format des accords de Genève.