Le président abkhaze Alexandre Ankvab a annoncé hier sa démission, écrit lundi le quotidien Kommersant.
Dans son allocution, il a accusé l'opposition d'être liée avec la criminalité et a averti que les conséquences de ce changement de gouvernement pourraient être désastreuses pour la république.
La démission d'Alexandre Ankvab a été annoncée hier matin, puis démentie dans l'après-midi par le premier ministre Leonid Lakerbaïa selon qui le président n'avait pas encore pris sa décision. Cependant, les hauts fonctionnaires et les députés abkhazes ont affirmé que le président n'avait plus le choix: le parlement a fixé samedi la présidentielle anticipée pour le 24 août.
"Les décisions du parlement sont constitutionnelles", a expliqué le chef du comité juridique au parlement, Valeri Agrba. "Le parlement avait suggéré au président de démissionner mais il a refusé. Nous nous sommes alors référés à l'article 66 de la Constitution, qui prévoit la destitution du président due à l'impossibilité d'exercer ses fonctions: c'est ainsi qu'on peut interpréter l'absence du président à son poste de travail. Le parlement transfère normalement ses pouvoirs au vice-président mais cela fait six mois que nous n'en avons plus. Le premier ministre pourrait devenir président par intérim mais le parlement a procédé à un vote de défiance contre lui. Il ne reste plus qu'une solution: le président du parlement Valeri Bganba sera nommé président par intérim et une présidentielle anticipée sera organisée", a déclaré Valeri Agrba. D'après lui, 24 des 35 députés ont voté pour cette décision.
Les partisans du président, y compris le premier ministre et le chef du Service de sécurité nationale, contestent la légitimité de cette décision du parlement. Selon un homme politique qui a souhaité garder l'anonymat, la procédure de destitution du président est illégitime: "Le parlement ne pouvait pas avoir recours à cet article de la Constitution car seule la Cour suprême peut établir que le président n'est pas apte à remplir ses fonctions. Mais personne ne s'est adressé à elle".
"Cela fait presque une semaine qu'Ankvab ne vient pas travailler, il se trouve à la base russe de Goudaouta. En fait, il se trouve sur le territoire d'un autre Etat en dehors de la juridiction de l'Abkhazie. Il n'est pas à même de remplir ses fonctions. Le gouvernement étant incapable de diriger le pays, nous avons délégué au peuple le pouvoir d'en choisir un autre", a exposé le député d'opposition Aslan Kobakhia.
Alexandre Ankvab a été victime de six tentatives d'assassinat. "Derrière ces attentats se trouvent des forces qui soutiennent activement l'opposition, moralement et financièrement. L'un des objectifs du coup d'Etat vise à libérer les terroristes en détention dans le cadre de cette affaire", a déclaré hier Ankvab. Il a expliqué sa démission par la nécessité de "maintenir la paix civile" et "d'empêcher l'effusion de sang parmi les civils".
Selon les experts, le changement de gouvernement à Soukhoum pourrait déboucher sur une intégration plus profonde entre l'Abkhazie et la Russie. "A deux semaines de ces événements, les représentants de la diaspora abkhaze à Moscou ont évoqué le besoin d'établir des relations d'association entre l'Abkhazie et la Russie. Le gouvernement abkhaz y a réagi très durement", a déclaré Asker Sokht, chef de l'association Adyge Khase. Selon lui, il est possible qu'on pousse ainsi la société abkhaze vers l'idée d'une adhésion à la Russie.
Cependant, certains députés ont déclaré hier: "L'indépendance abkhaze a été gagnée dans le sang, et nul n'a l'intention de reculer d'un pouce".