Les Etats-Unis proposent d'installer des missiles THAAD (Terminal High Altitude Area Defense) en Corée du Sud, écrit vendredi le quotidien Nezavissimaïa gazeta.
Officiellement, ce système est appelé à la protéger d'une attaque de la Corée du Nord. En réalité, comme le soulignent les experts, les Américains mettent progressivement en place un bouclier antimissile (ABM) en Asie afin de neutraliser le potentiel balistique nucléaire de Pékin.
En fin de semaine se tiendra la réunion entre les ministres de la Défense des USA, du Japon et de la Corée du Sud dans le cadre d'une conférence internationale à Singapour. Selon le Wall Street Journal, le Pentagone cherchera à persuader ses alliés de soutenir l'installation de l'ABM des Américains en Asie-Pacifique.
Le Japon participe à ce projet depuis longtemps. Son territoire abrite des radars connectés aux navires munis du système de combat Aegis et aux systèmes d'interception terrestres. Cependant, les Américains ne parviennent toujours pas à pousser Séoul vers une coopération plus étroite avec Tokyo. Le litige territorial autour d'une île déserte ne s'apaise pas entre le Japon et la Corée du Sud. De plus, la mémoire historique pèse sur l'attitude des Sud-coréens envers les Japonais – la Corée était une colonie du Japon de 1910 à 1945.
Et voici que les USA accouchent d'un plan destiné à influencer la position de Séoul. Ils proposeront de déployer en Corée du Sud des missiles d'interception du système THAAD. Le complexe mobile THAAD est destiné à protéger des bases militaires et des sites stratégiques contre des ogives de missiles de courte et de moyenne portée.
Ce système permet d'intercepter un missile dans un rayon de 200 km et jusqu'à 150 km d'altitude. L'an dernier, les Etats-Unis ont déployé un tel complexe sur l'île de Guam. Son installation serait appelée à protéger les bases américaines contre des missiles nord-coréens.
La Corée du Sud a informé les Américains qu'elle ne souhaitait pas participer à l'ABM américano-japonais et préférait elle-même organiser sa défense. C'est ainsi qu'est née l'idée de séduire Séoul matériellement. Le plan consiste à déployer d'abord le complexe THAAD à titre provisoire en Corée du Sud. Puis les Américains permettront à Séoul de l'acheter.
L'amiral James Winnefeld, vice-président du Comité des chefs d'États-majors interarmées, a expliqué que le Japon et la Corée du Sud devaient surmonter leurs différends, car ils ont besoin de l'ABM régional et de l'alliance USA-Japon-Corée du Sud. Par ailleurs, les experts américains ne cachent pas que l'idée de l'ABM asiatique est progressivement mise en œuvre également pour neutraliser le potentiel balistique nucléaire de la Chine.
Pékin a depuis longtemps deviné ces intentions. Le porte-parole du ministère chinois des Affaires étrangères Qin Gang s'est exprimé au sujet du plan américain dans des termes très diplomatiques, déclarant que le déploiement de systèmes d'ABM dans la région ne contribuerait pas à maintenir la stabilité et l'équilibre stratégique. Toutefois, il a averti que la Chine n'admettrait pas l'exacerbation de la tension ou du chaos devant ses portes.
Il est à noter l'intérêt du complexe militaro-industriel américain pour accélérer la course balistique en Asie. Les Etats-Unis dépensent pour les fins militaires des sommes bien plus conséquentes que la Chine. Le budget militaire des USA s'est élevé en 2013 à 630 milliards de dollars, contre 150-160 milliards pour la Chine.