Par Mikhaïl Cheïnkman
Thémis, la déesse de la Justice, a donc fermé les yeux sur le passé en décidant que ce geste n'était pas répréhensible si l'individu qui le reproduisait exprimait son opinion personnelle sans propager les idées du national-socialisme. Elle semble avoir oublié qu'au départ, le livre d'Adolf Hitler Mein Kampf était également un "avis personnel". Quoi qu'il en soit, cette décision annule le verdict prononcé en première instance à l'encontre d'un néonazi suisse pour avoir effectué le salut hitlérien devant deux cents personnes pendant une manifestation.
Ces dix dernières années, l'extrême droite a régulièrement perturbé les activités consacrées à la Fête nationale suisse en arborant ouvertement des symboles nazis. Désormais, ils pourront le faire sous couvert de la loi. Il est étrange que la jurisprudence locale ne soit pas parvenue à cette décision plus tôt: il fallait simplement ne pas voir l'aspect politique dans le geste du bras tendu! Car pour tout le monde, il est évident et naturel de s'étirer en tendant les bras. Mais quand on parle de l'apparition des laboratoires d'Auschwitz ou des chambres à gaz de Majdanek, ce n'est plus de la casuistique juridique, mais de l'éducation. Or le Code pénal suisse ne contient pas un tel article.
Il s'agit d'un précédent. De facto, on a prescrit l'indulgence juridique et la protection contre les vestiges de Nuremberg. Tout cela dans le pays qui est à la tête de l'Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE) et dont le président Burkhalter profite de son statut pour imposer à l'Ukraine une feuille de route pour sortir de la crise.
N'ira pas jusqu'à dire que la Suisse a littéralement autorisé le salut hitlérien. Mais elle l'a accepté dans le langage des signes. Ce qui pourrait être encore plus insidieux, en dépassant toutes les frontières indépendamment de l'origine ethnique. Jusqu'à présent, le salut nazi demeure un crime poursuivi au pénal en Allemagne, en Autriche et en République tchèque. Mais on le pardonne déjà dans les pays baltes. Et au nom des valeurs européennes il accompagne les "nettoyages" en Ukraine. Evidemment, l'Occident ne verra pas dans cette décision juridique une réhabilitation du fascisme. Il lave simplement les mains de ceux qui sont prêts à les lever. Y compris pour tuer.
L’opinion de l’auteur ne coïncide pas forcément avec la position de la rédaction