La Voix de la Russie : Bonjour et merci de répondre aux questions de La Voix de la Russie, présentez-vous s’il vous plait.
Nicolas Megrelis : Je m’appelle Nicolas Megrelis, je suis français. Je suis né à Enghien-les-Bains, près de Paris il y a 45 ans. Je suis marié à une Américaine, Maria, qui m’a offert la joie d’avoir 5 enfants, Theodore, 14 ans, Sophie, 12 ans, Alexandre, 10 ans, Nicholas, 4 ans et Helena, 1 an.
J’ai fait des études classiques : bac C puis école d’ingénieur. Entrepreneur depuis la sortie de mon école d’ingénieur, je suis arrivé en Russie en Novembre 1993 pour ne plus repartir. J’ai fait d’abord de l’importation de biens de grande consommation (chocolat, gâteaux, …), puis distributeur pour les parfums NINA RICCI pour ensuite me consacrer à la création de mon propre réseau de magasins de cosmétiques et accessoires pour le sauna et le bain DLIA DOUCHA DOUCHI, suivi de plusieurs masters franchises dont AU NOM DE LA ROSE. Aujourd’hui je dirige une entreprise qui regroupe plusieurs activités et ou travaillent plus de 400 personnes. Nous comme toujours à la recherche de nouveaux challenges et de nouvelles idées.
Nommé Conseiller du Commerce Extérieur de la France depuis maintenant neuf ans, j’en ai été élu président durant deux ans de 2010 à 2012. Administrateur de la chambre de Commerce depuis 2010, je suis de très près toutes les questions économiques et politiques franco-russe. De plus, étant membre du conseil presbytéral de l’église protestante de Moscou, je m’intéresse aux relations œcuméniques, m’occupe d’une soupe populaire, et fait partie d’un programme de mise en place d’une ferme biologique sociale.
Et pour compléter, je suis devenu délégué de l’UMP en Russie depuis 2011 car j’avais envie de découvrir un nouveau challenge et j’ai rencontré des hommes politiques qui m’ont intéressé et qui m’ont convaincu de me lancer dans cette nouvelle aventure.
Aujourd’hui, je poursuis cette aventure en voulant relever le défi des conseillers consulaires.
LVdlR : Pourquoi est-ce un défi de devenir conseiller consulaire ?
Nicolas Megrelis : Car c’est une nouveauté. Donc cette élection consulaire est en effet un nouveau challenge pour nous tous puisqu’elle crée un nouveau poste, le conseiller consulaire. Jusqu’à présent nous avions les délégués de l’AFE mais la taille des zones géographiques qu’ils couvraient ne permettait pas le rôle de proximité que va avoir un conseiller consulaire. Y participer pour moi est primordial car ici il s’agit de façonner un premier rôle de ce conseiller consulaire. Pour moi un conseiller consulaire va être un élu local au service des Français de l’Etranger, un peu comme un maire est au service des administrés de sa commune.
LVdlR : Et pourquoi faire d’une élection que vous décrivez comme locale une élection politique en faisant référence à l’UMP ?
Nicolas Megrelis : D’abord l’UMP défend les valeurs républicaines françaises les vertus républicaines de l’honneur, du travail, de l’auto-discipline, du dévouement et de l’amour de la patrie qui m’avaient été enseignées il y a 30 ans.
Le fait d’être sous une étiquette politique me permet d’affirmer mes idées et à ce titre d’être identifiable et reconnu auprès des acteurs politiques français de tout bord !
Ensuite il ne faut pas confondre une élection à dimension politique avec une élection politique !
Par ailleurs, je vous rappelle que ces conseillers consulaires sont les futurs grands électeurs qui à leur tour vont voter pour les sénateurs représentant les Français de l’étranger. Or au moment où le retour du Sénat à droite n’est pas exclu, d’où l’enjeu politique de cette élection, il y a tout intérêt de revendiquer une appartenance à une famille politique. C’est cet élément qui nous différencie des autres listes. On ne politise pas le débat mais on le place en perspective.
LVdlR : Selon vous, pensez-vous comprendre les besoins des Français en Russie ?
Nicolas Megrelis : Je suis moi-même expatrié depuis 21 ans en Russie, j’y suis arrivé comme célibataire, j’y ai fondé une famille binationale puisque ma femme est américaine avec cinq enfants qui ont la double nationalité et dont trois sont en âge d’être à l’école française.
J’ai créé plusieurs sociétés, j’ai perdu mon premier business du jour au lendemain sans avoir de planche de salut et j’en ai reconstruit deux à partir de zéro.
Donc oui, je pense savoir quels sont les besoins des Français en Russie.
Mais de toute façon je suis toujours prêt à les écouter car les choses changent tellement vite qu’il peut y apparaître des nouveaux besoins qui n’étaient pas identifiés aujourd’hui.
Et j’ai l’intention de faire un sondage au sein de la communauté française pour mieux définir les points clefs des différents profils d’expatriés à faire remonter aux députés et sénateurs français car il me semble évident qu’un couple avec trois enfants installé à Moscou n’a pas les mêmes attentes qu’un expatrié célibataire de Rostov-sur-le-Don. Mais en tant que conseiller consulaire, je me dois de les assister tous les deux.
LVdlR : Quel est votre programme ?
Nicolas Megrelis : Tout d’abord mon programme est inspiré du programme de l’UMP pour les Français de l’Etranger et le rayonnement de la France à l’étranger. Pour simplifier il s’agit de :
1) Définir le statut des Français de l’Etranger, précisant leur place dans la nation, leurs droits et leurs devoirs pour qu’on arrête de considérer les Français de l’étranger comme des évadés fiscaux qu’il faut punir mais comme ce qu’ils sont réellement, à savoir ceux qui connaissent le mieux la mondialisation et ses réalités et qui peuvent aider à la compétitivité de la France sur la scène mondiale. Il faut aussi inclure dans cette définition du statut des Français de l’étranger le respect des conventions bilatérales ou multilatérales et les notions de réciprocité notamment pour les visas ou les permis de travail.
2) Favoriser l’accès à l’enseignement français à l’étranger, à savoir :
- Accroître les capacités d’accueil des établissements, surtout à Moscou où il faut résoudre le problème d’une école éclatée sur trois sites car cela crée des surcharges aux parents d’élèves qui doivent payer 24000 roubles / enfant / trimestre pour la navette instaurée entre le site de Leninski et celui de l’IDF, génère des disparités entre les élèves, certains sites organisant des sorties scolaires alors que d’autres ne le font pas et, ce qui est peut-être le plus grave, empêche l’enseignement de certaines disciplines comme l’EPS pourtant nécessaire au un bon développement psychologique des enfants.
- Poursuivre l’extension de la prise en charge des frais de scolarité et en maintenir les crédits destinés aux bourses.
- Assouplir la gestion du réseau d’enseignement français et faciliter la réalisation d’un programme d’investissement ambitieux qui permettrait d’assurer la même qualité d’enseignement aux enfants d’expatriés à Krasnodar qu’à ceux d’expatriés à Moscou. En effet, on ne peut malheureusement pas ouvrir des écoles françaises dans toutes les villes de Russie. Mais il faudrait imaginer un pensionnat ou, grâce aux technologies modernes, une école virtuelle via internet, assurée par des professeurs qualifiés dépendant du lycée français de Moscou par exemple.
3) Adapter le service public consulaire et diplomatique aux attentes des citoyens pour le rendre plus accessible au citoyen tel que par exemple un « e-consulat » offrant l’ensemble des services consulaires et un service consulaire mobile navigant de ville en ville en Russie pour traiter de visu les dossiers.
4) Garantir un traitement fiscal équitable aux Français établis hors de France principalement en leur permettant de bénéficier, pour une résidence possédée en France, d’un traitement fiscal équivalent à celui des résidences principales en ce qui concerne taxation des plus-values, les droits de mutation, l’abattement dans le calcul de l’ISF, les impôts locaux.
5) Protéger les Français de l’étranger en cas de rupture professionnelle en leur permettant de recevoir à l’étranger les allocations chômage même s’ils sont salariés dans leur pays d’établissement du moment qu’ils ont acquis des droits à l’assurance-chômage en France, sous réserve qu’ils justifient auprès de l’administration consulaire d’une recherche d’emploi effective.
6) Moderniser la protection sociale et là il y a beaucoup à faire.
En effet il faudrait :
- Supprimer la rétroactivité pour les adhésions à la CFE et encourager l’adhésion immédiate des assurés.
- Améliorer la coordination entre l’assurance maladie française et les systèmes étrangers.
- Alléger les contraintes administratives imposées aux retraités vivant à l’étranger.
- Créer un système d’affiliation volontaire au régime général de l’assurance vieillesse, piloté par la CFE.
- Enfin, il y a un point crucial qui concerne les enseignants français de Moscou pris en contrat local car ils n’ont pas de couverture, retraite, accident du travail ou maladie prise en compte par l'employeur. Et ils doivent souscrire à leur propre assurance qui leur impose un délai de carence d'un an, ce qui veut dire travailler la première année sans aucune protection, voire les années suivantes car le cout d'une telle souscription par rapport à leur salaire fait que beaucoup ne souscrivent pas. Et de plus, le lycée leur demande pour l'année scolaire de signer une décharge pour assumer leur métier d'enseignant s’ils n'apportent pas la preuve de souscription à une assurance.
7) Faciliter le déroulement des carrières à l’international aussi bien pour les jeunes sortant du système scolaire grâce à la reconnaissance internationale des diplômes délivrés en France et en faisant du VIE, un moyen d’insertion internationale pour tous les jeunes actifs quel que soit leur niveau scolaire, y compris au niveau bac.
Il faut s’appuyer sur les réseaux d’anciens élèves de l’enseignement français à l’étranger pour développer l’influence de la France et ainsi l’insertion des Français dans des entreprises locales.
Et on peut imaginer de créer un VIE senior conçu sur le modèle du VIE actuel mais destiné aux salariés expérimentés, développer l’apprentissage à l’étranger, dans le cadre de contrats de compagnonnage international, en faisant appel aux entreprises françaises et créer une bourse de l’emploi à l’étranger, accessible en ligne dans le cadre du service public de l’aide à l’expatriation et au retour en France.
LVdlR : Et quel plan d’action pour le réaliser ?
Nicolas Megrelis : La première étape sera de remonter aux députés et sénateurs français les attentes clefs des Français de Russie et Biélorussie grâce à une enquête auprès de notre communauté pour comprendre les besoins de chacun et cerner les points clefs de chacun des profils qui constituent la mosaïque que nous sommes.
Ensuite pour la gestion quotidienne et l’aide au jour le jour à apporter à mes compatriotes, je prévois la création de permanences pour l’étude de leurs besoins et dossiers personnels.
Ensuite je mettrais en place des permanences pour pouvoir les rencontrer, traiter les dossiers spécifiques au cas par cas.
Ces permanences seront à la fois matérielles puisque l’Etat est tenu de mettre à disposition des conseillers consulaires des locaux : je compte exploiter cette opportunité au maximum.
Pour pouvoir assurer des permanences dans les villes autres que Moscou, à savoir Ekaterinbourg, Saint-Pétersbourg et Minsk en priorité, je compte faire des déplacements dans chacune de ces villes pour trouver une personne qui serait intéressée à devenir mon représentant sur cette ville.
Mais ces permanences seront aussi « virtuelles » grâce aux moyen technologiques actuels à savoir Skype, un site internet avec possibilité de chat on-line, voire une page Facebook et un compte Twitter.
Pour favoriser le développement des carrières des français en Russie et Biélorussie, je prévois, avec l’appui de la CCIFR et des conseillers du commerce extérieur, de renforcer les liens entre les entreprises françaises et les acteurs locaux et l’aide à l’implantation des entreprises françaises.
Pour les points nécessitant une action plus efficace de l’ensemble des acteurs sociaux je voudrais organiser des réunions régulières avec les autorités françaises telles que l’ambassade, l’école française, hors des réunions générales de l’assemblée des conseillers consulaires
Et je tiendrai informés mes compatriotes des changements obtenus et de la situation locale grâce aux outils technologiques d’aujourd’hui (site internet, newsletter, ..).
LVdlR : Une dernière question, un peu plus personnelle : quelle est votre relation avec la Russie ?
Nicolas Megrelis : Depuis 21 ans que j’y suis, j’ai appris à aimer beaucoup de choses.
Tout d’abord j’aime la façon dont le business est conduit même si parfois il devient stressant car cela ne permet pas toujours de construire du solide sur du long terme : il est rapide, cela bouge énormément et cela correspond à mon tempérament puisque, si j’en crois certains de mes amis, je suis monsieur 100 000 volts avec plus d’idées à la minute qu’il y a de temps dans la vie pour les réaliser.
Ensuite j’aime les relations au sein de la communauté française car les gens sont plutôt sympas les uns envers les autres, il y a un certain niveau d’entraide qu’on ne trouve pas forcément en France, même si, on peut regretter que le fait que beaucoup ne viennent que pour une durée limitée rend certaines relations superficielles.
Ensuite la Russie par rapport à la France c’est un peu comme le Canada Dry par rapport au whisky : elle n’est pas si éloignée de nous mais en fait c’est différent. En effet géographiquement ce n’est qu’à quatre heures de la France, le système éducatif est proche du système français, quand on lit du russe pour la première fois on reconnaît des lettres, quand on l’entend on reconnaît des mots, mais en fait on n’y comprend rien.
Enfin j’aime l’exubérance russe : les Russes vivent un peu comme si aujourd’hui était toujours leur dernier jour et ils savent faire la fête sans retenue. Mais les lendemains de fête à la russe sont souvent très difficiles. N