Trois milliards de dollars. Ce chiffre a fait parler de lui dans les médias russes, chinois et ukrainiens mercredi. Il s'agit du montant du crédit que la Chine a octroyé à l’Ukraine en échange de la livraison de céréales. Toutefois, selon le nouveau Premier ministre d'Ukraine Arseni Iatseniouk, Pékin reclamerait cette somme pour non respect du contrat.
L’information a été vite démentie par l’Ambassadeur de Chine en Ukraine Zhang Ziyun, qui à l’issue de son entretien avec le ministre par Intérim des Affaires étrangères de l’Ukraine Viktor Maïko, a fait part de la volonté de Pékin de continuer la réalisation de ce contrat. En confirmation, le porte-parole du ministère chinois des Affaires étrangères Hua Chunyin a indiqué le même jour que la Chine était prête à développer « le partenariat stratégique entre la RPC et l’Ukraine ».
Pour confirmer cette intention, la visite du président de la China National Commodity Exchange Center (CCEC), structure qui s’occupe de l’import-export des produits de consommation entre la RPC et l’étranger, est attendue à Kiev en vue d’une nouvelle étape de négociations avec la Commission ukrainienne des produits alimentaires et des céréales.
La Chine et l’Ukraine ont signé un contrat cadre sur la coopération dans le domaine de l’agriculture en 2012. Ce contrat prévoyait l'octroi par Pékin d'un crédit de 3 milliards de dollars à Kiev en échange de l’exportation de céréales pendant 15 ans. Or, jusqu’à présent la RPC n’aurait reçu que 180.000 tonnes de denrées ukrainiennes, l'équivalent de 153 millions de dollars, selon les documents de la douane ukrainienne, diffusés par les députés de la Verkhovna Rada (Parlement ukrainien).
Une déclaration publique qui fait des vagues
Le vice-président du comité de la Rada chargé des questions de lutte contre le crime organisé et la corruption Guennadi Moskal, membre de Batkivchtchina (Patrie), parti d'Arseni Iatseniouk, a indiqué mercredi qu’une partie du prêt chinois aurait été utilisée par l'Ukraine « pour fournir des céréales à d’autres pays, notamment l’Ethiopie, Monaco, l’Iran, le Kenya, ou encore des groupes d’opposition en Syrie ». La Chine a donc tout à fait le droit de déposer plainte contre l’Ukraine auprès de la Cour d’arbitrage internationale à Londres (LCIA) pour non-respect du contrat, a-t-il conclu, ajoutant qu’une enquête sera menée sur les dépenses du gouvernement de Nikolaï Azarov entre 2010 et 2013.
La Commission ukrainienne des produits alimentaires a nié toute accusation de fraude, indiquant que les affirmations de Moskal ne correspondaient pas à la réalité.
« L’utilisation de ces fonds se fait par tranches avec un contrôle du côté ukrainien et chinois », précise le communiqué de l’organisation. La première partie du prêt chinois de 1,5 milliard de dollars a été virée par la Banque d'import-export de la Chine (Exim Bank of China) au début de 2013. Le reste du crédit, qui prévoit un échange des céréales ukrainiennes contre des biens de consommation chinois, nécessite des négociations avec la RPC, explique la Commission.
La Commission ukrainienne des produits alimentaires et des céréales prépare une requête auprès du procureur général d'Ukraine et du ministère des Affaires étrangères pour mettre fin à toutes les spéculations autour de ce thème. Quant à l’information sur la disparition des 3 milliards de dollars, elle a été effacée du site officiel de Guennadi Moskal.
Un projet de coopération agricole avec la Chine suscite la polémique
En septembre 2013, la Chine a conclu avec l’Ukraine un accord d’investissement qui lui permettrait de bénéficier de la production agricole issue des terres ukrainiennes pour une période de 50 ans sur une superficie de 3 millions d’hectares. Les experts ont vu dans cet accord, passé entre le groupe chinois Xinjiang Production and Construction Corps (XPCC) et la société ukrainienne KSG Agro une volonté du coté ukrainien « de vendre ses terres en échange des technologies ».
Suite à cette polémique, KSG Agro a démenti l'information dans un communiqué, assurant qu’il s’agit d’une « lettre d’intention » sur la coopération agricole et non pas d'une vente des terres. N