L’Allemagne perd l’Ukraine !

L’Allemagne perd l’Ukraine !
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Nous avons assisté à un meeting de François Hollande avec la chancelière allemande où il était surtout question de l’Ukraine.

Pour commencer un peu d’histoire. L’Ukraine pratique plutôt des drôles de relations avec l’Allemagne. On lit dans le Wikipédia : « La république populaire d'Ukraine signe un traité séparé avec l'Allemagne à Brest-Litovsk le 9 février 1918. L'Allemagne joue la carte du séparatisme ukrainien pour mettre la main sur les richesses du pays, alors essentielles pour leur victoire. L'armée allemande envahit le pays et la République soviétique d'Ukraine est balayée en avril 1918. Les Allemands contribuent à l'instauration de l'hetmanat, en la personne de Pavlo Skoropadsky. Ce dernier mène une politique réactionnaire. Il est contraint de se réfugier en Allemagne en décembre 1918». Comme on le voit, Angela Merkel a toutes les raisons de se soucier de l’Ukraine. Pour elle c’est un peu comme si la France parlait de l’Algérie, mais à une seule différence près : le peuple habitant l’Ukraine fait partie d’un grand ensemble des peuples habitant aussi bien l’Ukraine que la Fédération de Russie.

Nous avons interviewé là-dessus Richard Labévière qui est rédacteur en chef de la page cors@ir consacrée à la Défense.

Voix de la Russie. Un sujet qui intéresse tous les hommes politiques qu’ils soient occidentaux ou russes : l’Ukraine ! On voit les gens combattre dans la rue, sur la place Maïdan qui est pour Kiev ce que la place de la Concorde est pour Paris. On sait que les victimes sont nombreuses, mais elles ne se comptent pas par des centaines tout de même mais par des dizaines. Il y a également cette intervention de François Hollande qui s’est prononcé après son sommet avec Angela Merkel en appelant à une politique énergique vis-à-vis des événements à Kiev. Il réclamait une prise de position et des sanctions à l’encontre du gouvernement ukrainien. La question qu’on est en train de se poser : la France a-t-elle vraiment besoin de l’Ukraine ? Qu’est-ce qui a poussé le Président de la République de se prononcer d’une telle façon ? Ne doit-on pas discuter du droit à l’ingérence dans les affaires respectives d’un tiers pays ? D’après vous, cela est-il justifié ou non ? Quelles est votre approche ?

Richard Labévière. Sans appréciation trop personnelle ou trop réaliste, je dirais que si l’on reprend le souhait du Général de Gaulle qui parlait d’une Russie allant de l’Atlantique à l’Oural, il est clair que dans l’absolu et compte tenu des relations bilatérales des deux Etats, la France a non seulement besoin de l’Ukraine, elle a aussi beaucoup besoin de la Russie. Elle aurait beaucoup besoin d’avoir d’autres relations qu’elle n’a aujourd’hui avec la Russie.

Pourquoi aujourd’hui le Président Hollande a-t-il ce positionnement ? C’est qu’il a encore plus besoin de Madame Merkel et de l’Allemagne par rapport à la situation politique et économique française. Ce qui fait qu’aujourd’hui on est sur un logiciel français qui continue à privilégier l’Union Européenne, sa logique de libre échange et de dérégulation c’est-à-dire ses trois étapes : les droits de l’Homme comme discours et récit d’une conception purement européenne néolibérale portant sur la dérégulation. Et sur le troisième plan, il s’agit de favoriser l’OTAN et l’Alliance Atlantique. Nicolas Sarkozy a fait revenir la France dans le commandement intégré de l’OTAN. Aujourd’hui non seulement François Hollande hérite de ce choix qui est une politique très otanienne, mais en plus il essaie de la diversifier. Il y a une espèce de cynisme un peu réaliste qui fait qu’aujourd’hui la France ne peut pas avoir de politique libérale et indépendante de l’UE. Ce qui fait que de plus en plus et Madame Merkel et François Hollande s’en remettent à Catherine Ashton qui développe les arguments que l’on connaît pour gérer le monde !

VDLR. "Faire en sorte que l’opposition et le pouvoir puissent se parler." Ce sont les paroles de Dominique de Villepin, ancien ministre des Affaires étrangères, qui s’est rendu sur Europe 1 évoquer la situation en Ukraine, alors que Laurent Fabius a menacé le président ukrainien Ianoukovitch de sanctions. Faut-il laisser les deux parties se justifier pour que cela ne soit pas unilatéral? Qu’en dites-vous ?

Richard Labévière. Il faut que les gens se parlent au lieu de se taper sur la gueule. Tout le monde est à peu près d’accord ! Mais la question est justement d’avoir le courage pour nouer un dialogue politique qui doit découler du choix du format politique adapté. Il est clair que l’UE aurait dû concevoir les rapports avec l’Ukraine avec le plan parallèle sinon principal avec la Russie. Maintenant il est clair que quand Laurent Fabius et d’autres responsables européens parlent des sanctions, on sait très bien à quoi correspondent ces sanctions et quel pourrait en être le résultat. On l’a vu en Irak et en Iran et ailleurs. On sait très bien que ces sanctions, même personnalisées, sanctionnent d’abord les peuples avant les appareils d’Etat. Les discours sur les sanctions font partie de la même approche et logique droits de l’hommiste qui en parlant des sanctions évitent justement le courage politique de l’ouverture des vraies négociations politiques et de l’élaboration d’un format pertinent !

Or là dans le cadre de la crise ukrainienne, le format pertinent n’est pas l’UE – Ukraine mais l’UE – Russie. Toute personne connaissant un peu la région sait que l’Ukraine pour les élites politiques, sécuritaires, culturelles et économiques russes est vraiment très importante. Alors c’est une véritable provocation que de s’en remettre pleinement à une politique des sanctions en considérant que le format approprié est celui de l’UE et l’Ukraine ! Il y a une réalité géographique et continentale et j’en reviens à la volonté du Général de Gaulle parlant d’une Europe de l’Atlantique à l’Oural dans la mesure où le Général savait très bien que la géographie dicte la politique étrangère !

Commentaire de l’Auteur. Il est tout à fait notoire que la France se retrouve en position du fameux dindon de la farce qui suit les autres sans avoir aucun gain personnel à tirer du jeu. L’Allemagne a embarqué la France dans son tour de passe-passe diplomatique pour avoir le concert des nations européennes derrière elle et pas seulement les satellites germaniques comme les pays Baltes. Mais la France que peut-elle bien chercher à Kiev ? A-t-elle l’intention de voir la déferlante des Ukrainiens s’abattre sur l’Europe occidentale ensemble avec les Bulgares, les Roumains et les Moldaves que l’Europe s’est déjà mise sur le dos ? Pour moi, le mystère demeure entier.

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