Lors de la conférence de presse à l’occasion du Festival, en présence du Métropolite Hilarion de Volokolamsk et d’autres invités maestro Spivakov s’est exprimé sur la nécessité de ce genre de festivals :
« Monseigneur, chers amis ! Je veux vous dire que pour moi ce festival (Festival de Noël) fait partie de ma vie, il m’est très cher. Toute l’année durant mes pensées vont à cet événement. Ce festival est devenu une manifestation emblématique pour le Palais de la musique de Moscou, très attendue par les organisateurs, mais aussi par le nombreux public fréquentant les concerts de musique sacrée. Votre excellent livre, que j’ai lu, Monseigneur, contient beaucoup de pensées remarquables. L’une d’elle m’a touché de près : elle concerne l’inharmonie de l’âme humaine. Vous rappelez justement qu’à présent, lorsque le monde est au seuil de la négation générale et des fois le franchit, après que l’économie de marché eut fait son entrée dans notre existence, cette inharmonie est apparue, et le système des valeurs a changé. Au grand regret, de nombreux vouent leur culte à l’argent. Dans de telles conditions, des impressions et des manifestations, comme ce festival, sont indispensables. Avec fierté je peux dire qu’il n’y a pratiquement pas de pareils dans le monde. En général, il me paraît avoir une dimension œcuménique, parce qu’il y a de la place pour tous. L’univers de tout être humain comprend un espace pour ses sentiments religieux. A mon avis, chaque concert de ce festival est un événement, vu qu’il est l’œuvre, bien réfléchie et de qualité, de grands professionnels. »
Première attendue du Festival de Noёl de la musique sacrée, l’ensemble vocal de Notre-Dame de Paris est arrivé à Moscou avec des chants grégoriens du XIII-XIV siècles. Composé de 39 personnes dont la plupart les enfants du Chœur de Notre-Dame, l’ensemble sous la direction de Sylvain Dieudonné a fait découvrir aux mélomanes russes le patrimoine musicale de l’Europe.
Ecoutons l’interview que Sylvain Dieudonné en compagnie de son manager Catherine Terrier ont accordée à la Voix de la Russie :
« C’est une grande chance pour nous de pouvoir faire connaitre à Moscou et à la Russie ce qui est notre patrimoine musicale de l’Europe occidentale. Je pense que toutes les rencontres sont toujours positivement fructueuses. J’ai déjà eu l’occasion à Paris de faire des concerts alternés entre musique orthodoxe et musique catholique, c’était vraiment très intéressant. Nous, les catholiques et les orthodoxes, on est proches mais c’est à la fois deux cultures bien spécifiques ».
De quels instruments allez-vous jouer ce soir ?
« Moi je vais jouer de la vièle médiévale à archet. C’est un instrument qui est assez proche du violon mais ce n’est pas vraiment un violon : la conception de l’instrument est différente. Mais c’est un instrument à cordes frottées comme le sera violon beaucoup plus tard. Il y aura également d’autres instruments : diverses percussions de type tambour sur cadre, une harpe médiévale, diverses flutes, cornet à bouquin et cornemuse ».
Comment les enfants peuvent-ils entrer dans votre chœur ?
« Ils ont une audition qui permet de définir s’ils ont un bon profil, s’ils ont la capacités pour pouvoir progresser et chanter pour les offices et les concerts. La Maitrise de Notre-Dame de Paris est en effet composée d’enfants, de jeunes adolescents et d’adultes qui sont déjà les chanteurs en formation professionnelle. Les enfants par rapport au répertoire grégorien et du Moyen Age ont un abord qui est beaucoup plus spontané et direct. La Maîtrise est gérée par une association qui s’appelle « Musique sacrée de Notre-Dame de Paris » et qui est financée par l’Etat français, la ville de Paris et le diocèse de Paris. C’est donc un partenariat qui est original et totalement unique en France. »
Comment trouvez-vous Moscou ?
« Ce matin nous sommes allés à la Place Rouge. Et nous avons visité aussi la Cathédrale du Christ Sauveur qui était fermée mais on a pu aller dans la crypte. Ce qui est le plus surprenant pour nous, c’est la profusion des images, des icônes qui sont absolument extraordinaires. On sait qu’en France au Moyen Age les églises étaient peintes, il y avait également énormément de peintures. Mais elles sont toutes effacées aujourd’hui, on ne les a pas refaites.
L’expérience qu’on a eu ici est passionnante parce que Moscou est une ville magnifique, parce qu’on va jouer dans un pays des mélomanes. On sait que les Russes aiment la musique. Les musiciens français qui jouent en France de la musique classiques, en général se disent qu’il n’y a pas de public meilleur que les Russes parce qu’ils ont une écoute, un vrai sens de la musique. Là on va découvrir ce que ça donne avec la musique médiévale qui n’est effectivement pas connue ici, à mon avis. Il y a plein de passes achetées, les gens donc ont envie de découvrir, c’est ça qui est intéressant.
Mais si on nous invite, on revient avec un autre programme, on ne revient peut-être qu’avec des adultes. Ce répertoire médiéval grégorien est absolument gigantesque ! Gigantesque et très varié. Les couleurs instrumentales sont beaucoup plus variées que dans l’orchestre moderne. Même de vièles médiévales différentes ce n’est pas toujours le même instrument, à chaque fois c’est un instrument différent. De même, on alterne entre la monodie et la polyphonie. C’est à Notre-Dame de Paris qu’est apparu pour la première fois le rythme, la musique mesurée, les premières polyphonies occidentales, la musique qui a un rythme très libre, très prosodique, la musique rythmée. Cela donne donc un éventail sonore extrêmement riche. Et on vient d’achever le grand jubilé de 850 ans de la Cathédrale Notre-Dame. Donc il y a eu plein d’événements de toute sorte, en particulier, d’événements musicaux. Nous avons aussi fêté 850 ans de l’Ecole de Notre-Dame qui est justement cette école de composition polyphonique, de chant mesuré qui est apparu il y a 850 ans.»