L’assassinat de Sarajevo vu par la presse européenne de l'époque

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En entrant dans une polémique avec Berlin et Vienne, qui voient dans l'assassinat de Sarajevo en 1914 la conséquence d'un complot remontant tantôt à Belgrade, tantôt à Saint-Pétersbourg, la presse parisienne, avec des titres souvent à tendance politique opposée, continue d'insister de manière unanime sur le fait que le drame de Sarajevo est une conséquence logique d’une série d’événements.

Le meurtre de Sarajevo a détruit l’inspirateur et l’organisateur de l'annexion, qui a mis fin aux aspirations nationales des Serbes. Ce meurtre a été commis un jour de fête nationale serbe, ce qui a d’autant plus suscité le ressentiment et l'oppression nationale. Voici ce qu’écrit le journal Jurnal: « L’inspirateur et le créateur du système utilisé envers la Bosnie opprimée a été tué ».

« En attendant la terreur, on ne peut ne pas voir dans le meurtre de François-Ferdinand des avertissements menaçant le système d'oppression, dont jouissait l’Autriche en tant que la composante la plus forte de l’empire. Le système du régime militaire, des dénonciations et des poursuites administratives est devenu obsolète », écrit le journal Radical. Le quotidien modéré La France précise : « Ces oppressions, commises par la volonté du défunt ont été vengées. Tel est le triste résultat de la politique agressive de conquêtes, incarnée par François-Ferdinand. »

« Rien d’étonnant si ces jeunes têtes ont décidé de se venger », écrit le sénateur Henri Bérenger sur les pages du journal Action. « On ne peut pas les justifier, mais on peut toutefois les comprendre. Le drame qui se joue est un élément supplémentaire de l’épopée de la lutte des peuples slaves contre les oppresseurs allemands…».

Dans le journal L'Humanité, Jean Jaurès s'exclame : « La loi internationale n’existe plus ! Le système de poing blindé exalte les passions, provoquant la violence et les meurtres, des compagnons constants de l’injustice, de l'oppression et du despotisme. L’archiduc s’est fixé pour but d’apprivoiser toute une nation. Il réfléchissait à la destruction de la Serbie. Et maintenant, on essaie de rejeter l’exaltation de deux jeunes gens sur l'ensemble de la nation. Une silhouette de « l’affaire de Zagreb », un sosie du « complot serbe » se dessine déjà à l’horizon. Il donnera à la clique cléricale-militantiste un prétexte pour régler ses comptes avec la Serbie. Que l’Autriche réfléchisse bien avant de s’engager sur la voie des nouvelles répressions ! Qui sème le vent récolte la tempête. Que la justice et la liberté arrêtent ces explosions passionnées. »

Le journal serbe Balkan donne à l'attentat de Sarajevo une importance globale mondiale. François-Ferdinand a menacé le monde européen. Il a créé l'Albanie pour la conquérir, a provoqué le conflit serbo-bulgare, et il a été tué. Le journal italien La Stampa, écrit que François-Ferdinand a dû payer pour les péchés de la politique générale de l’Autriche, pour le régime de persécution et de répressions. A Rome, on attendait un changement de cap radical dans la politique autrichienne. Ils espéraient arrêter la politique agressive de Trieste dans la région, où l'archiduc soutenait les Croates au détriment des autres nationalités.

La presse turque parle de l’attentat de Sarajevo comme d’un signe du « début d’un combat monumental entre deux races - les Slaves et les Allemands ». Le malheur de l’Autriche, c’est que son avenir est étroitement lié à la personnalité de son dirigeant. Le journal Tanin souligne : « L'assassinat de l'archiduc provoquera une fracture dans l'ensemble de l’espace politique autrichien. Il est clair qu’en ayant une population composée de slaves à 3/4, la mise en place d’une politique « allemande » est impossible. L’assassinat de l'héritier – c’est le résultat de cette politique erronée ».

Et la Première Guerre mondiale fut la conséquence de cette politique.       N

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