Le programme de l'ESA Cosmic Vision prévoit le lancement de trois projets de classe L (large) dans l'espace de 20 ans. Le coût d'un projet avoisine le milliard d'euros. Le premier est la mission JUICE qui étudiera Jupiter et ses satellites et qui partira pour l'espace en 2022. La Russie pourra y participer avec son appareil d'atterrissage sur Ganymède.
Ensuite les dirigeants de l'ESA ont, apparemment, décidé de changer de sujet et de passer des affaires planétaires à l'astrophysique. Fin octobre le directeur des programmes scientifiques de l'Agence, Alvaro Gimenez, a rendu publiques les recommandations à l'intention du comité de l'ESA pour le programme scintifique concernant le choix des missions. Ce comité devra faire le choix définitif entre les projets présentés au concours. Beaucoup convergent sur le fait que la décision est déjà prise.
En effet, réuni les 28 et 29 novembre, le comité a approuvé deux thèmes : « Univers chaud et dynamique » (projet d'un observatoire à rayons X de génération nouvelle) et « Univers gravitationnel » (observation des ondes gravitationnelles).
Par la suite le protocole prévoit la déposition de projets dans le cadre de ces deux thèmes. Pour les L2 les propositions pourront être déposées au début de 2014 et pour les L3, un peu plus tard. Cependant des surprises ne sont pas non plus attendues et le feu vert devra être donné aux équipes qui ont proposé ces thèmes. Ils s'agit des projets ATHENA+ ( Advanced Telescope for High Energy Astrophysics) et eLISA ( evolved Laser Interferometer Space Antenna). Le premier est proposé par l'Institut de physique extraterrestre et le second, par l'Institut de physique gravitationnelle, les deux faisant partie de la société Max-Planck pour le développement des sciences (Allemagne).
Les concepteurs de l'observatoire à rayons X ATHENA+ cherchent la réponse à deux questions : comment la matière visible a-t-elle constitué de grandes structures (amas et superamas de galaxies) et comment évoluaient les trous noirs et quelle était leur impact sur l'Univers.
Le projet eLISA est intéressant, entre autres, par ses aspects techniques. Il est prévu de placer dans l'espace trois appareil à une distance d'un million de kilomètres. Les appareils dotés de lasers mesureront la distance entre eux au fur et à mesure de leur évolution sur orbite. Les changements de distances permettront d'établir les ondes gravitationnelles venant des grands objets lointains, en premier lieu des trous noirs.
Les partisans des études planétaires critiquent l'ESA pour son penchant pour l'astrophysique. Jupiter est l'unique planète dans la liste de grandes missions de l'Agence pour ces prochaines décennies . Des planètes ne figurent presque pas parmi les candidats aux missions de classe M (moyen) d'un coût inférieur à 500 millions d'euros. Au total, Cosmi Vision prévoit 6 missions de ce genre. Les deux premières sont déjà sélectionnées et en février 2014 la troisième sera choisie ( lancement avant 2024). Cinq projets se disputent le financement, dont un, MarcoPolo-R, vise à transferer sur Terre des prélèvements faits sur un astéroïde circumterrestre.
Il ne s'agit que du programme Cosmic Vision qui ne comprend pas, notamment, le projet ExoMars. Mais Mars ne suffit pas à ceux qui voudraient étudier la périphérie du système solaire : les satellites de Saturne ou Uranus et Neptune peu étudiés. D'autre part les astrophysiciens estiment que le choix d'ATHENA+ était important pour assurer la continuité des observatoires à rayons X. A l'heure actuelle l'ESA dispose de deux instruments orbitaux à rayons X (XMM-Newton et INTEGRAL), mais les deux restent fonctionnels depuis plus de dix ans et il est temps de réfléchir à leur remplacement.
Quoi que ce soit, le choix est fait et il paraît impossible de dire aujourd'hui si nous piétinons ou, au contraire, développons des technologies nouvelles. L'ESA et Cosmic Vision ne sont pas les seuls acteurs des études spatiales et une mission vers d'autres planètes peut être organisée en dehors du programme européen à condition d'avoir des moyens et des possiblités. Mais la communauté spatiale mondiale, dispose-t-elle de ces moyens et possiblités ? A l'en juger d'après la réduction du budget de la NASA, la réponse peut être négative.