Assassinat de Sarajevo : 2 visions opposées dans la presse de l’époque

© © Photo: en.wikipedia.orgAssassinat de Sarajevo : 2 visions opposées dans la presse de l’époque
Assassinat de Sarajevo : 2 visions opposées dans la presse de l’époque - Sputnik Afrique
S'abonner
Les médias européens ont fait des commentaires contradictoires par rapport à l’attentat de Sarajevo de 1914, car les points de vue des médias étaient influencés par la politique des différents pays. Les journaux austro-hongrois et allemands défendaient un point de vue, et les journaux français et russes, membres de l’Entente, occupaient une position diamétralement opposée.

Le journal Rousskie vedomosti écrivait après le massacre des Serbes que l’empire des Habsbourg avait montré « au monde civilisé les atrocités suscitées par la psychologie humaine dans un contexte de lutte nationale effrénée. En Autriche, les intérêts de cette lutte ont été mis depuis longtemps au-dessus de tous les autres intérêts de la vie publique. Les nationalités se sont déclarées une guerre éternelle sans répit ; leurs accords sont soit des complots de deux pays contre un troisième, soit des traités de paix temporaires avant le début d’une nouvelle phase de guerre. Il y avait un espoir que la réforme démocratique de la loi électorale permettrait d’affaiblir l’antagonisme national, déplaçant la lutte parlementaire vers les intérêts économiques de la population. Mais ces espoirs ne se sont pas réalisés. Au contraire, les mouvements nationalistes ont attaqué de nouvelles positions. »

Le quotidien Rousskoïé Slovo qualifie l'archiduc François-Ferdinand de nationaliste autrichien convaincu, d’antisémite clérical, et d’organisateur des persécutions des Slaves en Bosnie-et-Herzégovine, dont l’accession au trône était attendue avec inquiétude. « C'est un désastre, la conséquence de la politique « nationale » de l’Autriche. Une persécution systématique par des chauvins impériaux autrichiens des peuples qu’ils « protègent », des persécutions de la culture « indigène », de leurs écoles, de leur langue. En d’autres termes, c’est un nationalisme militant, qui continue à se développer tel un ulcère de cet empire uni. Voilà l’atmosphère dans laquelle cette tragédie horrible s’est produite. »

Qu’écrivait-t-on dans la presse autrichienne et allemande ? La presse de ces pays avait un ton hostile envers la Serbie et les slaves. Le journal Berliner Tgb écrivait: « Ce crime fut généré par la haine des Serbes envers l’Autriche. Le couple archiducal a été victime de l'hostilité passionnée, cultivée au sein du peuple serbe par la politique autrichienne au cours de ces dernières années. »

Les journaux viennois expliquaient que la Serbie soutenait une série d’attentats en Bosnie par le biais d’un parti organisé. Le journal Reichspost va même plus loin : « Il ne faut pas oublier que Belgrade était manipulé par la Russie dans toutes ses manifestations ouvertes et secrètes. Ces accusations n'ont pas été appréciées à Saint-Pétersbourg. Les cercles dirigeants font savoir que peu importe l'ampleur du malheur en Autriche, la presse allemande ne devrait pas outrepasser les limites de l’acceptable. »

Un journal militaire viennois Danzer’s Armee-Zeitung appelle les ennemis de l’Autriche à se réjouir : « Vous avez de la chance. Vous avez réussi à écraser notre foi en l’avenir. Vous le saviez mieux que nous, les Autrichiens, que François-Ferdinand était votre ennemi, qu'il vous aurait chassé comme un troupeau de moutons, et vous aurait inspiré la peur. C’est pour cela que vous l’avez tué. Tuer tous les éléments déloyaux, et repeupler le pays. Et prendre en compte la Serbie, l’inspirateur moral de ce complot ! »

Le journal allemand Vossische Zeitung écrit que le seul espoir, la seule chance parmi des millions, s'évapore. « Il savait à qui confier la gestion du pays et le contrôle de l'armée, il connaissait les besoins de l'État. Maintenant, tout est brisé. La mort du prince héritier s’est transformée en une tragédie terrible, car à l’exception de François-Ferdinand, personne ne peut apporter une accalmie relative en Autriche. On entend seulement le sifflement malveillant émanant de ceux qui se sont sentis visés par ce coup.» Le journal du parti agricole allemand Tageszeitungse se sent obligé de souligner que l’avenir de l’Autriche et de la Hongrie est relativement flou. La situation de l’empire est endeuillée par l'angoisse et l'incertitude.

Quant au journal hongrois Magyar Hizlaga, il reconnaît : « Nous n'avons jamais appartenu à ceux qui exigeaient des scorpions pour les Serbes et ne se sont jamais prononcés en faveur d’une campagne contre la Serbie. Mais face à cette catastrophe, nous sommes obligés de reconnaître qu’un dilemme se pose devant nous. La solution à ce dilemme ne laisse aucune hésitation : soit nous arriverons à forcer la Serbie à nous respecter, soit notre empire va mourir. »

Cette propagande médiatique des deux clans dont les positions sont diamétralement opposées a contribué à l’éclatement d’une guerre sanglante qui a suivi l’attentat de Sarajevo.     N

Fil d’actu
0
Pour participer aux discussions, identifiez-vous ou créez-vous un compte
loader
Chat
Заголовок открываемого материала