Mais il est bien connu qu’il vient toujours le temps du paiement des dettes. Et l’Etat français en est conscient. C’est pour cette raison qu’auprès du Premier ministre français il était institué en 1999 par le Décret n°99-778 la Commission pour l’indemnisation des victimes de spoliations intervenues du fait des législations antisémites en vigueur pendant l’Occupation (CIVS).L’objectif de la Commission est de rechercher et de proposer les mesures de réparation, de restitution ou d’indemnisations appropriées. L’Article I du décret dit :« Il est institué auprès du Premier ministre une commission chargée d’examiner les demandes individuelles présentées par les victimes ou par leurs ayants droit pour la réparation des préjudices consécutifs aux spoliations de biens intervenues du fait des législations antisémites prises, pendant l’Occupation, tant par l’occupant que par les autorités de Vichy ». Ce qui est important c’est que l’indemnisation concerne tous les Juifs, quelle que soit leur nationalité, victimes de spoliations réalisées sur un territoire où s’exerçait la souveraineté française.
Chaque année la CIVS sort un rapport public de son activité qu’on peut trouver sur son site. Cette année on vient de recevoir le rapport de la Commission pour l’année 2012. Voilà les chiffres qu’il donne. Depuis le début de ses travaux en 2000 jusqu’à la fin de 2012, la Commission a enregistré 28 194 dossiers dont 18 747 concernaient des spoliations matérielles et 9 447 des spoliations bancaires.
Ces dernières années le nombre de requêtes de la part des familles victimes des législations antisémites a diminué. En 2012, la CIVS a enregistré 396 dossiers contre 532 en 2011. Mais cette baisse est due plutôt au fait que les victimes directes de spoliations ne comptent aujourd’hui que pour moins de 2 % des attributaires d’indemnisations alors qu’en 2000 elles représentaient 11 %, les filles et fils de victimes directes ne représentant plus que 38 % des attributaires contre 69% en 2000.
L’éloignement progressif des faits conjugué а la relève des générationsrend l’instruction des demandes plus complexe, notamment celles concernant des spoliations intervenues sur le sol tunisien, dont la population juive s’élevait а 90.000 personnes en 1939 et subissait les effets des lois antisémites de 1940 à 1943.
Plus loin donc on est de la seconde guerre mondiale, plus il y a de changements dans la spécificité du travail de la Commission. « L’exercice 2013 de la CIVS s’est donc ouvert sur un double constat : un rythme de décrue d’activité en voie de stabilisation autour de 35 nouvelles requêtes reçues chaque mois ; une accélération sensible de la liquidation des parts réservées. Le « cœur » de la mission assignée par les pouvoirs publics continue donc de constituer une part significative, mais désormais non exclusive de l’activité de la Commission ». La CIVS ouvre désormais des champs nouveaux : d’une part, la recherche et l’identification des attributaires qui а ce jour ne se sont pas manifestés, d’autre part, le groupe de travail sur les recherches d’origine des œuvres d’art MNR (« Musées Nationaux Récupération ») en déshérence. En mars 2013 notamment six tableaux de la collection Neumann identifiés dans le répertoire des MNR, œuvres issues de la spoliation artistique et confiées aux musées de France, ont été solennellement rendus à leurs propriétaires.
Au niveau international la Commission mène également une activité très intense. Au 31 décembre 2012, 49 896 personnes (requérants, ayants droit) avaient eu un contact direct avec la CIVS. Parmi elles, 38 084 vivent en France et 11 812 а l’étranger. De même, la CIVS participe à des conférences internationales comme celle, par exemple, qui s’est tenue à Prague en 2009 et qui était consacrée au sort des biens des victimes de l’Holocauste. La réunion a accueilli le processus d’indemnisation des Juifs européens. Une délégation de la CIVSa aussi participé en novembre 2012 au symposium à La Haye portant sur la spoliation des œuvres d’art en Europe durant la Seconde Guerre mondiale organisé par l’homologue néerlandais de la Commission.
Le champ de la mission de la Commission pour l’indemnisation des victimes de spoliations est vraiment vaste. Aujourd’hui elle cherche à centraliser les bases de données et d’harmoniser les pratiques au niveau européen, le processus de l’indemnisation des spoliations de toute nature générées par l’antisémitisme allant bon train dans toute l’Europe.