Quand on n'a pas le droit de fléchir... Maria Chalaeva dans Je serai près de toi

Quand on n'a pas le droit de fléchir... Maria Chalaeva dans Je serai près de toi
Quand on n'a pas le droit de fléchir... Maria Chalaeva dans Je serai près de toi - Sputnik Afrique
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Le programme de la compétition du festival KINO, Films de Russie et d’ailleurs qui se déroule actuellement à Genève et à Lausanne comprend entre autre Je serai près de toi (I’ll be around) de Pavel Rouminov, une œuvre représentative du cinéma russe d’aujourd’hui et hautement apprécié dans son pays.

La preuve : Grand prix au 23-e festival Kinotavr à Sotchi. Tourné en 2011, ce film raconte l’histoire d’une jeune mère, dynamique et pleine d’humour. Le plus important dans sa vie est son fils de six ans, Mitya, qu’elle élève seule. Mais soudainement, un drame survient, cruel et imprévisible : Inna, l’héroïne, est atteinte d’une tumeur incurable. Se sachant condamnée elle est prête à tout pour trouver le couple parfait qui adoptera son petit garçon. Voilà le sujet de l’histoire. En espérant que ce film, très émouvant trouvera son spectateur en Occident, et notamment en Suisse, nous avons rencontré Maria Chalaeva, interprète du rôle principal. Jeune actrice, elle a dû jouer tout un destin. Comment a-t-elle fait pour approcher son héroïne?

Maria Chalaeva. La première chose que j’ai rejetée, c’est de jouer la maladie. Il y a évidemment le costume et le maquillage, les attributs extérieurs, mais mon but principal était de construire les rapports entre la mère et l’enfant, ainsi que la situation où la mère réalise qu’elle doit mourir, qu’elle doit quitter son enfant et lui trouver des parents adoptifs. Nous avons cherché à la présenter forte et courageuse. Tant que son fils reste avec elle, elle n’a pas le droit de fléchir. Elle a un but bien précis, elle doit s’assurer que lorsqu’elle ne sera plus près de son enfant, celui-ci vivra dans l’amour.

M. C. Ensuite, il y a le passage à l’étape finale, ses derniers jours. Elle meurt et alors tout est différent. Je me suis beaucoup renseignée auprès des médecins et auprès des personnes qui ont eu un cancer – nous avions dans notre équipe de tournage des bénévoles, des jeunes femmes qui avaient passé par un traitement anticancéreux – et bien, ce qu’elles racontaient c’est que l’effet des médicaments est très puissant. Ils peuvent beaucoup porter sur l’état d’esprit. Ce sont soit des états euphoriques, soit des états dépressifs, en tout cas des états très instables. Bref, les patients ont des réactions variées qui influent sur leur comportement. Cela m’a beaucoup appris.

M. C. Est-ce que le rôle est intervenu dans ma propre vie et que je m’en sens affectée? Cela non. Je dis toujours que ma profession ne diffère pas beaucoup de celle d’une serveuse de restaurant, d’une femme de ménage ou d’une concierge. Regardez les médecins. Ils effectuent des opérations ultra-sophistiquées. Ils ne peuvent pas s’identifier à leurs patients, se mettre dans la peau de quelqu’un dont le cœur vient de s’arrêter. Ce serait grave. Je suis une actrice quand même.

VdlR. Vous entendez Maria Chalaeva, actrice russe qui a joué le rôle principal dans le film Je serai près de toi de Pavel Rouminov. Mère elle aussi, Maria a un fils et une fille, elle a beaucoup puisé dans son expérience personnelle en construisant les rapports avec Mitya, son enfant dans le film. Même si le cinéma et la vie personnelle de l’actrice font deux, son public, voire son entourage personnel n’y croient pas toujours…

M. C. Mes proches ont du mal à me voir sur l’écran. Ils se sentent dérangés parce qu’ils me connaissent. Ils ne peuvent pas rester objectifs. Surtout que dans plusieurs de mes films, je meurs. Cela les affecte. Évidemment, ils peuvent comprendre que je joue mais ils croient en ce qu’ils voient. Tandis que pour moi c’est un métier, le métier qui consiste à transmettre des sentiments de quelqu’un, de répondre à une tâche, de construire une action.

M. C. Le message de notre film? Il est dommage que Pavel, le réalisateur, ne soit pas là. Pour lui c’est un projet très important et très personnel. Il a mis huit ans pour réaliser le scénario. Ses deux parents sont morts d’un cancer et pour lui, je pense, le film était une sorte de psychothérapie pour gérer la situation. En général, Pavel est quelqu’un… Je le compare souvent à Lars von Trier parce qu’il approche très près son spectateur. Ce n’est pas quelqu’un qui raconte une histoire avec du recul, en regardant de côté. C’est un homme qui est à l’intérieur de vous, qui essaye de toucher votre cœur. Et je pense que c’est l’unique message du film, il est de faire ainsi que nous puissions tous nous sentir l’un l’autre.

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