La Voix de la Russie : Votre magazine a qualifié la technologie d'impression en 3D comme l'une des dix percées dans ce domaine. Parfois, ce sont des armes à feu qui sont « imprimées » sur ces dispositifs. Quelle est votre position sur ce sujet ?
Jason Pontin : La science n’est pas en tant que telle une mesure de bien. Les connaissances n’ont pas de face sombre, et les technologies sont en elles-mêmes neutres. En revanche, la science peut être utilisée pour le bien ou pour le mal de l’humanité, en fonction des objectifs fixés. Par exemple, l’énergie nucléaire est écologiquement pure et on peut équiper le monde entier avec cette technologie. En revanche, on peut aussi créer une bombe nucléaire et tout détruire. En se servant d’une technologie concrète, il faut donc toujours penser aux conséquences, positives ou négatives, et se mettre d’accord sur la manière d’utiliser cette technologie. Et il est préférable de mener ce genre de négociations à l’aide d’un média, par exemple La Voix de la Russie ou le magazine MIT Technology Review, et sur des forums comme Open Innovations 2013. Dans l’idéal, après ces discussions il faut édicter des lois ensemble et formuler des directives.
C’est la même chose pour l’impression en 3D. On peut s’en servir pour une fabrication rapide des prototypes, qui peuvent permettre aux entreprises de mener des expériences sur leur production. Et à l’avenir, on pourra créer des marchandises plus compliquées, dont la fabrication nécessite beaucoup de moyens. Dans le même temps, comme vous l’avez remarqué, il est possible de copier des armes sur ce type d’imprimantes. Mais dans ce cas là, on ne pourra pas surveiller son déplacement. Je suis persuadé que les criminels se servent de ce procédé pour cette raison. Toutefois, je tiens à rappeler qu’il s’agit d’une histoire classique. Il est important de discuter de ces choses là, d'attirer l’attention de la presse et de prendre les mesures nécessaires. Et de ne pas oublier de mettre en œuvre des lois qui régissent ces procédés.
LVdlR : Etes-vous d’accord avec l’affirmation selon laquelle les nouvelles technologies sont toujours un nouveau défi ?
J.P. : Les nouvelles technologies, c'est à la fois un nouveau défi et de nouvelles opportunités. Avec l'aide de ces technologies, l'humanité accède à de nouveaux sommets. Dans le même temps, de nouvelles opportunités ont toujours un danger potentiel. Nous avons l’habitude de dire à la rédaction qu’ « une révolution a toujours des perdants ». Lors de n’importe quelle révolution il y a toujours des perdants. Ces transitions peuvent causer beaucoup de dégâts. À mon avis, l'une des principales tâches du gouvernement consiste à concilier les gens avec les changements qui s’opèrent, de leur faire accepter tout le bien que ces changements apportent et d'amortir le choc de tout ce que ces changements apportent de négatif. Seule la jeune génération est capable d’amortir ce choc. Les jeunes vont aider la génération des personnes âgées, celles qui ne sont pas capables d’inventer quelque chose de nouveau pour une quelconque raison, et celles qui ne trouvent pas leur place au sein de la société. Par ailleurs, l’Etat doit réguler la manière dont on utilise les nouvelles technologies. Ces défis sont toujours positifs, car ils apportent de nouvelles opportunités. Mais ils ont aussi un « côté sombre », sur lequel on peut mettre le projecteur, en régulant l'utilisation de ces technologies. Cela peut se faire par exemple lors des rencontres comme ce Forum-exposition Open Innovations 2013, créé justement dans ce but. /N