Le premier ministre japonais Shinzo Abe a suggéré de modifier la Constitution pour renforcer l'armée et pouvoir combattre aux côtés de l'Amérique partout dans le monde, écrit jeudi 19 septembre le quotidien Nezavissimaïa gazeta.
La Chine et la Corée du Nord y voient une renaissance du militarisme mais la Russie, pour sa part, ne perçoit pas le Japon en tant qu'ennemi potentiel. Lors de son discours à Tokyo devant le conseil consultatif pour la défense le chef du gouvernement japonais Shinzo Abe a appelé à modifier la Constitution du pays, qui restreint la possibilité d'utiliser les forces armées nationales. Cette mesure permettrait à Tokyo, dès novembre, d'utiliser la force militaire pour la légitime défense collective.
En clair: Abe souhaite renforcer la puissance militaire du pays et il lui est donc nécessaire de revoir la Constitution, qui interdit l'utilisation de la force sauf pour protéger l'Etat directement.
Cependant, la révision de la Constitution suscite des débats et une telle démarche demanderait des années, souligne le Wall Street Journal. C'est pourquoi le premier ministre a concentré ses efforts sur un changement d’interprétation officielle de la Constitution, afin de lever l'interdiction d'aider les alliés du Japon victimes d'une agression.
Le chef du gouvernement affirme que ces changements sont urgents car la situation internationale en Asie se complique. Par ailleurs, les politiciens japonais pointent généralement le réarmement rapide de la Chine et le risque d'une attaque nucléaire de la Corée du Nord.
Valeri Kistanov, directeur du Centre d'études japonaises à l'Institut de l'Extrême-Orient, note que de cette manière Abe cherche en réalité à renforcer son alliance militaire avec les Etats-Unis. D'après le traité de sécurité nippo-américain, les USA ne protègent le Japon qu’en cas d'agression majeure et si elle est de faible envergure, ce dernier doit se défendre lui-même.
De son côté, le Japon ne peut pas venir en aide aux Américains s'ils étaient attaqués. Tout au plus il lui est permis d'envoyer des navires de soutien logistique pour les bâtiments américains dans l'océan Indien qui ont participé à l'opération en Afghanistan. Abe souhaiterait transformer le Japon en pays normal, avec une armée normale. Autrement dit, élargir sa sphère d'activité afin qu'il puisse venir en aide aux USA partout dans le monde.
Les USA ne sont pas emballés par cette perspective. A leurs yeux le Japon a de l'importance en tant qu'allié subordonné, mettant des bases à leur disposition qui servent d'appui pour la dissuasion de la Chine, le contrôle de la péninsule coréenne et même les opérations au Moyen-Orient. Selon Valeri Kistanov, les Américains estiment que leur présence militaire au Japon sert de bouchon pour retenir dans la lampe le génie du militarisme japonais.
Evidemment les forces de sécurité russes surveillent la croissance de la puissance militaire du Japon. Mais contrairement à Pékin et Pyongyang, Moscou n'évoque pas la remilitarisation du pays. "Au niveau officiel, la Russie n'exprime aucune inquiétude à ce sujet", conclut l'expert.
Washington mène un double-jeu suite à l'aggravation du conflit sino-japonais autour des îles Senkaku (Diaoyu). Le département d'Etat appelle son allié à faire preuve de prudence mais les généraux tiennent un autre discours. Le chef des Marines à Okinawa, John Wissler, a déclaré hier que les avions hybrides américains Osprey pourraient être projetés sur les îles litigieuses en cas de besoin.