Le film est d’actualité. Il traite un problème compréhensible à toute société, et pour l’opinion russe bien sensible –les relations entre les citoyens et la police. La crainte, la suspicion que tous les agents de l’ordre sont corrompus, se couvrent les uns les autres, sont soudoyés par des structures criminelles. Certains éprouvent même de la répulsion pour les policiers. Et cette animosité est d’ailleurs mutuelle. Dans le film de Bykov cette confrontation va au paroxysme. Le protagoniste est un officier de police, dont la femme est en train d’accoucher et qui, fou de joie, se précipite à la maternité, mais en route heurte de plein fouet un petit garçon qui traverse un passage clouté. Les collègues se dépêchent de venir en aide au major, en cherchant à trouver des justifications au coupable et à le sauver de la prison. Tout commence par une falsification des faits et se termine par des morts en série, un vrai enchevêtrement sanglant. Et voilà que le major est déjà prêt à assumer n’importe quelle peine, pourvu que ce mécanisme effroyable s’arrête. Mais une fois en marche, on ne peut pas le stopper… « Ce film nous dit qu’on ne peut pas vivre ainsi ! », - dit le réalisateur Youri Bykov.
De simples normes existent, qui ont été élaborées par l’humanité au fil des siècles et des millénaires, et voilà que nous nous mettons à agir à leur mépris, parce qu’il faut survivre. Mais c’est faux ! Pour moi ce film appelle à cesser de ne plus prendre en compte la morale humaine universelle – le devoir civique et humain est beaucoup plus important que les intérêts de clans, de famille. En dépit de toutes les nuances, les policiers n’y sont pas présentés comme des monstres sans âme, ni compassion, mais comme de simples gens, réfléchissant, se tourmentant, qui ne sont pas enclins à se justifier, dignes de respect. Et cela en rajoute aux émotions dans le film. Dans l’idéal, la loi doit être l’unique critère pour tous. Le film de Bykov Le Major nous conduit vers cette pensée, bien qu’il n’en dise un mot. C’est en cela que consistait, sans doute, la grande idée des auteurs de ce film.