L’avenir de l’Europe

L’avenir de l’Europe
S'abonner
Le livre de Thierry Gobet, prix Renaissance 2011, intitulé France : les véritables enjeux a attiré l’attention en France et maintenant en Russie par une vision des réalités mondiales aussi inédite que lucide. C’est en fait une des premières tentatives de faire le bilan des conséquences de ce que M. Gobet qualifie de « mondialisation débridée ».

Notre monde change en effet mais ce processus devient de plus en plus imprévisible et donc incontrôlable. Le terme « mondialisation » semble condamné à servir de justification universelle de tous les avatars de notre monde, de la bêtise de nos dirigeants et de la convoitise souvent irrationnelle des banquiers et des hommes d’affaires.

Nous parlons d’une communauté internationale censée garantir une coexistence harmonieuse à tous les peuples de notre planète, mais Thierry Gobet s’insurge contre ce terme aussi démagogique que spéculatif. La communauté internationale n’existe pas, affirme-t-il. Nous vivons au sein d’un système international et nous devons sortir de ce système pour renouer avec la puissance. Or, pour le faire M. Gobet considère qu’il faut renouer avant tout avec notre passé, nos traditions et nos affinités qui nous permettaient jadis d’être conscients de nos identités nationales et de la souveraineté de nos Etats. Il appelle à mieux cerner les véritables enjeux de la France et de l'Europe, dans un monde où les cartes de la puissance sont en train d'être redistribuées.

Sans tomber dans la conspirologie facile Thierry Gobet appelle les choses par leur nom pour constater que depuis la dernière guerre mondiale notre existence et surtout celle de l’Europe et du monde musulman est modelée selon les intérêts et la volonté d’une seule puissance. Pourtant à une certaine époque l’Europe et notamment la France restaient suffisamment puissantes pour être à l’abri des prétentions géopolitiques des Etats-Unis.

En évoquant ce passé Thierry Gobet se garde bien de donner des recettes mais il ne nous invite pas moins à réétudier la formule de Charles de Gaulle qui parlait à plus d’une reprise de l’axe Paris – Berlin – Moscou appelée à devenir une sorte d’épine dorsale « d’une Europe de l’Atlantique à l’Oural ». C’est précisément à ce sujet que nous avons questionné Thierry Gobet dans une interview qu’il a donnée à La Voix de la Russie ».

LvdR : M. Gobet, en dehors d’autres thèses de votre ouvrage je me suis intéressé surtout à celle où vous préconisez la formation de l’axe géopolitique Paris – Berlin – Moscou. Quels sont les facteurs essentiels, selon vous, qui créent la nécessité d’une telle solidarité et qui pourraient contribuer éventuellement à la réalisation de cette idée ?

T.G. : La Russie et la France nous sommes sur la même terre, sur le même continent et nous sommes une même civilisation. A l’heure de l’émergence des nouvelles puissances, de ce qu’on appelle puissance émergentes de civilisations différentes nous avons intérêt à nous unir. C’est très, très important, et pour pouvoir s’unir il faut avoir des points de convergence. La Russie est européenne, elle a hésité entre l’Europe d’un côté et l’Asie de l’autre, elle a eu une parenthèse communiste pendant trois quarts de siècle, mais mon désir, mon souhait – et ce n’est pas d’ailleurs celui des Américains.

La hantise des géopoliticiens américains et cela depuis le XIXe siècle est que cette union de l’Europe occidentale avec la Russie qui constituerait un pôle géopolitique et économique le plus puissant du monde. C’est une nécessité aujourd’hui à l’heure de l’émergence des grandes civilisations des grandes puissances géopolitiques, économiques et militaires comme la Chine et le monde musulman et face à l’affaiblissement des Etats-Unis sur divers points, la fin d’un empire qui pour moi n’avait jamais été allié d’Europe mais dont nous avons été les arceaux. Moi, je ne veux pas être la paille de qui que ce soit, je veux être indépendant, d’où le regard des Occidentaux des Européens vers la Russie à une époque où l’Europe est en grande décadence, décadence géopolitique, décadence morale, mentale, économique et démographique. L’Europe est aujourd’hui l’homme malade du monde.

Or, en ce qui concerne la Russie je voudrais rappeler également qu’elle fait partie de la civilisation chrétienne et que la religion orthodoxe a hérité de l’empire gréco-romain de Constantinople. Pierre le Grand s’est tourné vers l’Europe et depuis la Russie est européenne. Les Etats-Unis ont essayé de lutter contre cette alliance. Alliance ne veut pas dire envie d’une guerre contre l’autre. Alliance veut dire entente.

LvdR : Merci, M. Gobet.

Fil d’actu
0
Pour participer aux discussions, identifiez-vous ou créez-vous un compte
loader
Chat
Заголовок открываемого материала