La décision du roi de Kartl-Kakhétie Héraclius II, qui avait choisi l'union militaro-politique sous la protection de la couronne russe, était tout à fait argumentée. Trois siècles après l'écroulement de l'Empire Byzantin, la Transcaucasie, coupée du reste du monde chrétien, était l'arène de la lutte entre la Turquie et la Perse pour la domination de la région. La Géorgie, ruinée, pouvait sortir de cette situation très difficile seulement avec l'aide de l'Empire russe qui avait remporté à cette époque beaucoup de victoires militaires et diplomatiques brillantes. Le traité de Gueorguievsk fut un événement remarquable, jetant les bases de la préservation de la nation géorgienne, affirme le chef du Centre des problèmes de la mondialisation Alexandre Tchatchiya.
« Au moment de la signature du traité, dans le royaume de Kartl-Kakhétie, il y avait, d’après les estimations des savants, pas plus de 250 000 habitants. En Géorgie Occidentale, partagée en royaume d’Iméréthie et en principautés : abkhaze, megrele, gourienne, vivaient de l'ordre d’un demi-million d’habitants. Mais quelques 150 ans plus tard, la population de la Géorgie était déjà de 5,5 millions d'habitants. En réalité, les Géorgiens frisaient la disparition. Si la situation en Géorgie s'était prolongée encore pendant 30-40 années, nous n’aurions pas pu parler aujourd'hui de la nation géorgienne comme d’un phénomène culturel et historique existant ».
Les négociations minutieuses sur les conditions du traité étaient menées depuis décembre 1782, lorsque le roi géorgien avait adressé à Catherine II une demande de protection. Le document signé par les représentants des deux pays dans la forteresse de Gueorguievsk ne prévoyait pas l'entrée de la Géorgie dans l'Empire russe. Cela est arrivé deux décennies plus tard, après le nouvel appel du roi de Kartl-Kakhétie, cette fois déjà, au roi russe - Alexandre Ier, explique le directeur de l'Institut des pays de la CEI Konstantin Zatouline.
« Deux fois, la demande a été déclinée car cela demandait de grands efforts, des moyens financiers et des pertes de vies humaines de la part de l'Empire russe. Mais les circonstances liées à la religion commune, la compassion chrétienne à la position de la Géorgie qui avait subi en 1796 une invasion persane destructrice, ont pris le dessus. Et au début du XIXe siècle, le royaume de Kartl-Kakhétie est devenu une partie de l'Empire russe. En raison de cela, tous les princes géorgiens avaient des droits égaux aux princes russes. Le nombre de nobles dans le pays, à la suite de l'entrée de la petite Géorgie, a donc doublé ».
L'entrée du royaume de Kartl-Kakhétie dans l'Empire russe était raisonnable du point de vue historique, selon le chef du Centre des problèmes de la mondialisation Alexandre Tchatchiya.
« Héraclius II était un grand roi, mais il a laissé après lui une loi désastreuse, selon laquelle toute sa descendance immense, tous ses petits-fils avaient droit d'hériter du trône, chacun pouvait donc arracher un morceau et se proclamer roi local. Ce processus pouvait engendrer des querelles épouvantables. En fin de compte, cela aurait pu s'achever par l'annexion du côté de l'Iran ».
Après le royaume de Kartl-Kakhétie, l’Iméréthie, la Mégrelie, la Gourie et l'Abkhazie se sont jointes à la Russie, leurs territoires faisant partie de l'espace commun. Les idées du traité de Gueorguievsk ont servi non seulement à la préservation de l'identité nationale des peuples de la Géorgie, mais ont défini en fin de compte son vecteur européen de développement. /N
