Le pop art dépressif ou les origines du non-conformisme soviétique

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Le nom d’Oscar Rabine, l’un des leaders du non-conformisme soviétique, reste très connu dans l’histoire de l’art officieux de cette période.

Alors que le réalisme soviétique était le seul langage en vigueur en URSS, Rabine a créé son propre style distinct et facilement reconnaissable.

« En regardant les photos officielles des artistes soviétiques, je ressentais instinctivement que je ne pourrais jamais peindre de cette manière. Pas parce que ce style ne me plaît pas, mais parce que j’admire l’habileté avec laquelle ils le font et je les envie. Leurs œuvres ne me touchaient pas, me laissaient indifférent. Il leur manquait quelque chose, me semble-t-il », se souvient Rabine.

Le musée multimédia de Moscou vient d’inaugurer une exposition consacrée aux premières œuvres d’Oscar Rabine. Cette exposition se tient à l'occasion du 85e anniversaire de l'artiste.

Le style de Rabine s’est formé dans les années 1950-1960. Les premiers graphiques présentés à l’exposition permettent de retracer la manière dont s’est formé le style de l’artiste. Dès ses premiers travaux, on voit apparaître des symboles qui deviendront incontournables pour les œuvres de Rabine : la vodka, le hareng, les journaux, les casernes de la banlieue de Moscou ...

Formellement, les œuvres d’art de Rabine appartiennent au pop art – un mouvement artistique apparu dans les années 1950 aux États-Unis. Les artistes qui pratiquaient le pop art utilisaient dans leurs œuvres d’art des produits courants : des articles ménagers, des photographies, des reproductions, des extraits de publications. Mais si les artistes américains s’inspiraient des images des magazines, de la télévision, ou de la publicité, et le pop art était selon Richard Hamilton « populaire éphémère, spirituel », sa version soviétique était toute autre: sombre et déprimante.

« Je ne subissais aucune influence et ne changeais pas ma manière de faire les choses,se souvient Oskar Rabine. Je pouvais transmettre la diversité de la vie russe par un symbole : le hareng sur le journal Pravda, avec une bouteille de vodka et un passeport. Tout le monde comprenait ces symboles. Ou alors je peignais l’image du cimetière de Lianozovo et l’appelais Cimetière de Leonardo da Vinci. Il n’y avait rien de nouveau dans mon art, rien de qui faisait +tendance+».

« Ce que nous montrons aujourd'hui – ce sont des grands classiques », raconte Olga Sviblova, directrice du musée. « Nous présentons une exposition très spéciale d’Oscar Rabine pour son 85e anniversaire. Nous montrons ses graphismes qui n’ont jamais été montrés auparavant. C’est un laboratoire de travail où nous pouvons voir comment il créait ses tableaux célèbres ».

L’une des œuvres centrales de l'exposition, Pomoïka 8 (Tas d’ordures 8) est devenue symbolique dans la biographie de l'artiste. Un article très critique publié dans le journal Moskovski Komsomolets le 29 septembre 1960 était consacré à cette œuvre. Son auteur, Roman Karpel, a critiqué l’art de Rabine, le qualifiant de « dégoûtant » et « schizophrène », ajoutant que l'artiste n’avait pas sa place en URSS, car son art ne pouvait être compris dans ce pays. A la fin, le journaliste a suggéré à Rabine d’immigrer en Occident.

Au début des années 1970, Rabine a été contraint d'émigrer en France, où il vit aujourd'hui. Bien qu’on le qualifie comme un classique du 20e siècle en Russie, Rabine ne revient pas souvent dans son pays natal et a décidé de ne pas venir à l’ouverture du vernissage qui lui est consacré, prétextant qu’il fait trop chaud à Moscou. Mais les organisateurs promettent que l’artiste viendra au début de l’automne pour la fin de l’exposition. Elle fermera ses portes le 8 septembre.   N

 

© Photo: Multimedia Art Museum
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