Cet argent a servi pendant deux ans à attirer ceux qui appuyaient sur le bouton « j’aime » dans les pages du serveur du Bureau des programmes internationaux du Département d’État. Selon les experts, les résultats de ce gaspillage de fonds publics ont été décevants.
Acheter les « like » ne pose pas de problèmes et les offres des particuliers et des sociétés bien implantées sur le marché ne manquent pas. Ceux qui souhaitent gagner un peu de sous rejoignent les groupes des « likers » qui appuient sur le bouton désigné. Pourquoi se donner cette peine? Mais pour impressionner, par exemple, les copains sur Facebook par un grand nombre de références à ses photos ou posts. Il suffit de faire une demande payante après quoi votre cote de popularité grimpe vers le ciel du jour au lendemain. Le Bureau des programmes internationaux du Département d’État est une organisation sérieuse, c’est pourquoi il faut tout de suite écarter l’idée qu’il voulait, disons, produire une bonne impression sur les supérieurs. Plus probablement, l’achat des « like » devait rehausser son prestige aux yeux de ceux qui lisent ses communiqués de presse.
« Je pense que le cas échéant, le département d ‘état voulait s’informer de l’attitude envers la politique extérieure des États-Unis et, d’autres part, manipuler l’opinion pour se donner une certaine image positive. Or, pour ce faire, il faut toujours une référence. A quoi fait-on généralement référence? Mais aux études sociologiques et on peut accessoirement se servir des réalisations techniques les plus récentes », explique Vilen Ivanov, directeur de l’Institut d’études sociales et politiques.
Les prix sur le marché des « like » varient fortement. Pour produire une bonne impression sur les amis, on peut acheter à une grande société une centaine de références électroniques positives moyennant 10 dollars. Les tarifs des particuliers sont beaucoup plus modestes. En deux ans, le Département d’État est passé de 100 000 à 2 millions d’abonnés. Si on divise la somme dépensée de 630 000 dollars entre les nouvelles recrues, cela fait plus de 30 dollars pour cent « likers ». C’est extrêmement cher. On pourrait supposer que leurs références positives étaient d’une grande qualité, mais c’est complètement faux parce que les experts sont certains qu’il s’agissait la plupart du temps de « bots » ou robots électroniques fonctionnant en régime automatique. Selon les estimations, seulement 2 % des abonnés discutaient réellement des publications. Le système des « like » était une bonne idée en son temps mais il n’inspire plus aucune confiance, note l’expert en technololgies IT Mikhaïl Zonenachvili :
« La valeur réelle des « like » s’est dépréciée parce qu’il est désormais possible de les acheter. C’est l’histoire du serpent qui se dévore lui-même. 630 000 dollars pour les « like », c’est beaucoup. Je doute de l’efficacité de cette dépense. Cela relève soit du gaspillage, soit de la bêtise pure et simple. »
La nouvelle sur le gaspillage des fonds budgétaires a provoqué l’indignation aux États-Unis. Nick Gillepey, rédacteur en chef de Reason.com et observateur du site Internet Daily Beast, a notamment dit dans un entretien avec le journaliste Nick Yang dans le bureau de Washongton de La Voix de la Russie :
« Les gens ont besoin de s’informer mais je doute que le département d’état dispose d’une stratégie déterminée concernant les réseaux sociaux. Tout cela me fait penser à un village à la Potemkine en régime on-line. Les communiqués de presse guindés qui dissimulent la moitié de l’information n’intéressent personne. Le département d’état a montré qu’il ne comprenait pas du tout son public ciblé aux États-Unis pas plus qu’à l’étranger. Il ignore également tout ce qui se passe dans le cyberespace ».
Et pourtant, l’opération d’acquisition des « like » a l’air assez inoffensive sur le fond des révélations scandaleuses de l’ex-agent de la CIA Erward Snowden. Le cas échéant, il n’y a aucune entorse aux principes démocratiques ou aux droits de l’homme. Il est permis de se servir des différentes techniques en matière de publicité. L’expérience a échoué mais elle a eu l’avantage d’amuser la galerie. T