« Ce que le jour doit à la nuit » ou le rendez-vous avec l’Algérie dans le théâtre Bolchoï (Partie 1)

© © Photo : Hervé Koubi« Ce que le jour doit à la nuit » ou le rendez-vous avec l’Algérie dans le théâtre Bolchoï (Partie 1)
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La scène du théâtre le plus connu de la Russie devient pour un moment la plateforme où se déroulera un spectacle vraiment hors du commun et unique dans son genre.

Le théâtre Bolchoï n’accueille pas souvent des troupes comme celle-ci. C’est que l’équipe du chorégraphe français Hervé Koubi y dansera le hip-hop ! C’est ainsi qu’Hervé Koubi a mis en scène l’œuvre de l’écrivain algérien célèbre Yasmina Khadra qui s’appelle Ce que le jour doit à la nuit. C’est déjà la deuxième fois que le Bolchoï accueille Hervé Koubi avec ses troupes. En 2009 c’était « Un rendez-vous en Afrique », spectacle auquel participaient les danseurs de Côte d’Ivoire et qui a été présenté non seulement à Moscou mais à Lipetsk et Ielets. Aujourd’hui c’est la troupe algérienne qui danse devant le public russe.

Hervé Koubi a présenté son nouveau spectacle qui est un peu autobiographique lors d’une conférence de presse organisée à cette occasion.

Hervé Koubi : Quand j’ai commencé la danse, je dois vous avouer, que je n’avais même pas osé rêver pouvoir un jour me produire au théâtre du Bolchoï. Les danseurs avec qui je travaille depuis 4 ans maintenant viennent d’Algérie. Ce ne sont pas des danseurs classiques, ce sont des danseurs de hip-hop, des acrobates. Ceci dit ce n’est pas un spectacle que de danse hip-hop. Effectivement je remercie Tatiana d’avoir dit que ça ne ressemble pas à ce qu’on a l’habitude de voir. Ce projet-là est un projet de partage entre l’Occident et l’Orient. C’est à ce titre, par exemple, qu’on aura dans la musique qui accompagne le ballet la passion de Bach et des musiques qui viennent de la tradition d’Orient. Ce spectacle a été primé plusieurs fois. Il a reçu le premier prix du Festival international de danse contemporain à Alger et le prix d’honneur au Festival de danse de Palestine. Concernant l’œuvre littéraire de Yasmina Khadra qui s’appelle Ce que le jour doit à la nuit ce n’est pas une adaptation du roman au sens narratif du terme. J’ai eu la chance de rencontrer Yasmina Khadra qui m’a offert très volontiers son autorisation d’utiliser ce titre. Ce roman situe son histoire justement à cheval sur la Méditerranée entre la France et l’Algérie. J’ai découvert très tardivement mes origines algériennes. Je résumerais ainsi que quand on lit le livre, j’ai l’impression de lire l’histoire par moment de mon arrière-grand-père, par moment celle qui m’est racontée par mon grand-père ou encore celle de mon père. Et enfin comme moi je suis allé en Algérie, le héro finit par aller en France pour comprendre aussi son histoire. Il y avait énormément de similitudes. Donc au départ la démarche de cette pièce est une quête des origines, de l’identité aussi. C’est important de savoir, tout simplement, d’où on vient pour mieux savoir où on va. Et je pense que c’est une question à la fois très personnelle mais que nous partageons tous, j’en suis convaincu. Alors je suis né en France mais quand j’ai su enfin en petit peu plus sur mon histoire, je me suis empressé d’aller en Algérie. J’avais choisi de consacrer ma vie à la danse. Donc tout naturellement je suis parti à la recherche à la fois de mes origines mais aussi des danseurs pour m’aider à retrouver mon histoire.

 

Il y a 12 danseurs sur scène : 11 qui viennent d’Algérie et un danseur qui vient du Burkina Faso. Ce sont des danseurs qui ont été sélectionnés par Hervé sur 250 participants d’une audition. Ces danseurs nous montreront la danse moderne, le hip-hop qui est très populaire en Algérie en ce moment. Hervé Koubi explique son choix en ces termes :

 

Hervé Koubi :Je n’ai pas choisi des danseurs classiques peut-être parce qu’en Algérie je n’ai simplement pas eu le choix. Je n’aurai pas dévoilé trop ni faire de grands promesses, je préfère créer la surprise. Moi j’ai été formé d’ailleurs dans une école de danse à Cannes très réputée, l’école Rosella Hightower. Donc mon monde n’est pas celui de danse hip-hop à la base. Mais je vois un point en commun extraordinairement flagrant important, fort entre la danse hip-hop et la danse classique. Il y a une virtuosité, il y a un rapport au corps qui pour moi dans le fond est tout à fait similaire. Vous verrez, je pends un exemple, quand on est formé dans une école de danse classique les danseurs, surtout les garçons, apprennent à faire des rotations, à tourner en pirouettes, des tours en l’air. C’est quelque chose de technique qu’il faut savoir faire le mieux, le plus possible. Ça vous fera peut-être sourire mais les danseurs hip-hop ont la tête en bas quand ils tournent mais ils tournent et l’enjeu est tout à fait le même.

 

L’Algérie est un pays méditerranéen dont on rêve, assure Hervé Koubi. C’est un pays qui se situe dans une région extrêmement particulière et très riche, celle de la Méditerranée où se rencontrent des différents courants culturels et des différentes civilisations même.

 

Hervé Koubi :Que représente la Méditerranée pour moi, c’est une question terriblement vaste. Je pourrais répondre déjà en tous cas que moi je suis l’un des fruits de cette culture puisque je suis un enfant de la Méditerranée, évidemment, même si je suis en France. Mais il y a quelque chose qui m’a influencé dans mon spectacle. J’ai regardé la Méditerranée dans l’Histoire en remontant le plus loin possible dans l’Histoire. Et c’est ainsi que je me suis beaucoup inspiré des échanges entre ces deux grands empires que sont l’empire Byzantin et l’Empire hellénique qui, au premier abord, ont fait la guerre, mais surtout ont fait des mariages culturels finalement dont nous sommes héritiers aujourd’hui. Je suis convaincu que la plus grande partie du monde est appuyée et debout sur ces origines-là, sur cette rencontre qui s’est faite il y a trois mille ans, à la fois en terme d’esthétique, de pratique d’art, de science et puis un peu plus tard aussi de religion. Tout se passe à cet endroit-là. Et c’est après que les choses ont voyagé mais même celui qui vit aujourd’hui aux Etats-Unis, en Russie, en Afrique est de près ou de loin concerné par cette histoire qui se situe en Méditerranée. Etre un enfant de la Méditerranée c’est une chance parce que c’est une source inépuisable d’inspiration pour un artiste.

 

Je suis presque sûre que le nouveau ballet d’Hervé Koubiaura du succès auprès du public russe. J’en suis convaincue surtout parce que la première expérience du chorégraphe en Russie avec « Un rendez-vous en Afrique » a été réussie. Guillaume Gabriel, assistantchorégraphique d’Hervé Koubiet créateur des costumes, s’en souvient :

 

Guillaume Gabriel :Ce qui était très touchant à Lipetsk et à Ielets, c’est que c’était des rencontres humaines, ce n’était pas juste le spectacle qui était présenté et le public ravi. Mais il y a eu vraiment un échange avec les gens de ces régions. Je me souviens qu’à Ielets ils ont passé toute l’après-midi à faire une découverte des cultures de la région, ils ont assisté aux cours de danse avec les danseurs et les danseuses des classes. Et à la fin de la représentation on a eu le droit à un petit spectacle privé d’enfants qui voulaient montrer justement ce qu’ils faisaient eux aussi. Cela avait donc plus de sens que le spectacle « Un rendez-vous en Afrique », c’était un rendez-vous en Afrique. Les danseurs avec qui on avait travaillé, on les avait rencontrés en Côte d’Ivoire. C’était vraiment une photo de la vie en Afrique. Du coup on a eu pour ces danseurs un rendez-vous en Russie avec cette visite de sa culture. Quand on a parlé de roue à double sens entre les échanges, ça prend tout son sens, en fait. Nous on arrive et on leur donne à partager et on reçoit quelque chose qu’ils nous ont fait aussi.

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