LVdlR : Selon vous, qu’est ce qui est particulièrement important pour les pays d’Amérique latine et asiatiques dans ce rapport au sujet des drogues ? Qu’est ce qui n’est pas mentionné ?
Viktor Ivanov: Je voudrais attirer votre attention sur le fait que la présentation de ce rapport coïncide avec la Journée internationale contre l’abus et le trafic illicite de drogues. Il s’agit évidemment d’un document fondamental contenant une quantité significative de faits qui reflètent la situation dans le monde. Cependant le problème de la production phénoménale de drogues en Afghanistan n’est pas clairement identifié. Elle est évoquée comme un problème parmi d’autres, sans mettre l’accent sur l’ampleur de la production de drogue dans ce pays. A mon sens, cela ne permet pas de indiquer plus précisément la nécessité d’actions spécifiques sur la base de résolutions quant à un problème lui aussi spécifique. Nous voyons des actions vis-à-vis de la production de drogues en Afghanistan qui ne sont pas proportionnelles à ce qui se fait dans l’hémisphère l’ouest : en Colombie et au Mexique. Là-bas on détruit tous les jours plus de la moitié des plantations de coca, contre environ 2% en Afghanistan. C’est une situation tout à fait inadéquate.
LVdlR : D’aucuns estiment qu’après le retrait des troupes d’Afghanistan, la situation pourrait empirer, en particulier pour la Russie.
Viktor Ivanov: Elle ne peut pas empirer parce que la production a atteint une telle ampleur que pas plus de 30 % de la production annuelle est réalisée. Il y a un processus d’accumulation des drogues dans des entrepôts cachés sur le territoire afghan.
LVdlR : L’orientation thématique du rapport concerne les nouvelles substances psychotropes. Que peut-on en dire ?
Viktor Ivanov: C’est un problème qui concerne l’humanité entière puisque les technologies chimiques et pharmacologiques ont atteint des niveaux élevés, on utilise les possibilités des nanotechnologies moléculaires, que les criminels qui s’efforcent de synthétiser de nouvelles substances psychotropes sont parvenus à maîtriser. On constate donc une hausse vertigineuse de la synthèse de nouvelles substances psychotropes. Elles apparaissent à la fréquence d’une fois par semaine. Ce qui exige des actions rapides et adéquates de l’Etat et de la société, pour que ce processus soit sous contrôle.
LVdlR : Est-ce que la Russie participe à la formation des policiers anti-drogue ?
Viktor Ivanov: Il est nécessaire d’élaborer un nouveau paradigme de la politique anti-drogue. Ce doit être une approche équilibrée entre la résolution du problème de la toxicomanie et le trafic illégal de stupéfiants. On en parle de plus en plus aujourd’hui tandis que certains pays, qui connaissent depuis longtemps un véritable fiasco en la matière, essaient de nous imposer la question de la légalisation. Nous considérons que ce serait une erreur. Les personnes ayant une formation professionnelle appropriée doivent remplir les fonctions policières de lutte contre le trafic illégal de stupéfiants. Aujourd’hui les criminels utilisent les nouvelles technologies, les moyens techniques comme Internet pour propager les stupéfiants, ils utilisent des méthodes sophistiquées pour l’acheminement de la drogue sur le marché. Les trafiquants ont déjà dépassé les terroristes, les délinquants, les assassins dans la sophistication de leurs méthodes de diffusion de leurs produits avec des bénéfices faramineux. Et donc, bien sûr, la question de la formation des policiers anti-drogue constitue une partie importante du travail. T