La décision de l’Autriche de retirer son contingent des hauteurs du Golan est une mauvaise surprise pour l’ONU. Vienne justifie sa démarche par l’aggravation de la situation dans la région. Premièrement, de violents combats entre les rebelles et l’armée de Bachar al-Assad se poursuivent dans la partie syrienne du Golan et, deuxièmement, l’UE a levé l’embargo sur les livraisons d’armes à l’opposition syrienne malgré les protestations de Vienne.
« Dans ce contexte, le président Poutine a déjà proposé d’envoyer les soldats de la paix russes dans la zone de désengagement entre la Syrie et Israël sur le Golan. La proposition en question a été transmise à tous les membres du CS », rapporte le représentant permanent de la Russie auprès de l’ONU Vitali Tchourkine.
Les membres du CS ont pris note de l’initiative de Moscou mais elle ne pourra être mise en œuvre qu’avec l’accord de toutes les parties intéressées. D’autre part il faudra statuer sur la forme juridique d’une telle décision : une résolution ou d’autres décisions officielles du CS.
Les soldats de la paix du contingent international ont pour mission de veiller au respect de l’armistice entre la Syrie et Israël. Or, le contingent ne se compose plus en ce moment que de militaires philippins et indiens. La Croatie, le Canada et maintenant l’Autriche ont déjà rapatrié leurs troupes. Cela signifie que la situation peut devenir incontrôlable notamment parce que le sénateur Jonh McCain, « le faucon » en titre de la politique extérieure américaine, appelle à lancer en Syrie une opération militaire internationale.
« Nous ne devons pas forcément détruire toutes les batteries anti-aériennes ou y envoyer des milliers de soldats pour renverser la situation sur le terrain. On peut se limiter à des frappes ponctuelles de missiles de croisières contre l’aviation et les batteries de missiles d’al-Assad. Nous pouvons même créer pour le gouvernement provisoire une zone sécurisée protégée par des batteries de missiles Patriot. Nous pouvons aussi lancer une opération à grande échelle visant à entraîner et à équiper l’opposition syrienne. »
Il faut tout faire pour empêcher la reprise du vieux conflit entre la Syrie et Israël. N’oublions pas que le Golan est un territoire litigieux au Proche-Orient. Cette région faisait jusqu’à 1967 partie intégrante de la Syrie mais a été annexée par Israël pendant la Guerre des Six Jours. Un accord d’armistice et de désengagement de troupes existe entre la Syrie et Israël, mais Damas pose le retour du Golan dans son giron comme préalable à la conclusion d’un traité de paix avec Israël, tandis qu’Israël considère officiellement le Golan comme une partie intégrante de l’Etat hébreu et a même consacré son statut dans sa Constitution.
En vertu de l’accord de cessez-le-feu de 1974 entre la Syrie et Israël, les militaires des pays membres permanents du CS de l’ONU, et notamment la Russie, les États-Unis, la Chine, la France et la Grande-Bretagne, ne peuvent pas faire partie du contingent de soldats de la paix. En fait, si les membres du CS se sont vu accorder le droit de veto, ils ont été en revanche privés de la possibilité de participer aux opérations de maintien de la paix, note Viktor Nadeïne-Raevski, analyse à l’Institut de l’économie mondiale et des relations internationales :
« Cette disposition semble quelque peu désuète en ce moment car les membres du CS sont privés des droits que possèdent les autres. Pour changer cette situation, il faut modifier en conséquence les modalités de formation des forces de paix. Reste à savoir si la communauté internationale et l’ONU, elle-même réputée pour son conservatisme, sont prêtes à donner leur feu vert. »
Des exceptions sont possibles au moins concernant le Golan, a reconnu le diplomate britannique Marc Grant, président actuel du CS.
« Tous les membres du CS ont exprimé leur préoccupation face à l’aggravation de la situation dans la région et se sont déclarés sûrs que la mission de paix sur le Golan devait se poursuivre malgré la raréfaction du contingent. Le département des opérations de la paix de l’ONU doit établir les quotas par pour combler le vide laissé par le départ des Autrichiens. Les membres du CS se sont réjouis de l’initiative russe que nous allons examiner à côté des autres scénarios possibles. Mais c’est impossible sans le consentement d’Israël et de la Syrie dans le contexte de l’accord actuel. »
Les experts supposent qu’Israël et la Syrie donneront leur accord à la participation de la Russie à l’opération de maintien de la paix. En effet, Moscou est un important médiateur dans le processus de paix au Proche-Orient, mais les soldats de la paix russes ne seront admis sur le Golan qu’après des consultations qui peuvent prendre plusieurs semaines. T