La Russie a écouté très attentivement son Président qui, tout récemment, a promis qu’il allait veiller à la défense des intérêts russes un peu partout à travers le monde. Cette déclaration nous fait réviser nos classiques pour revenir à l’époque flamboyante d’une Union soviétique qui tenait la dragée haute à l’agression américaine. Décidément l’heure est au retour à la bonne vieille norme intrinsèquement liée aux besoins géostratégiques de la Russie. Les avatars de ces dernières années nous en apprennent long sur l’agressivité de l’OTAN à l’égard des pays du pourtour méditerranéen et, un peu plus loin en Afrique si on pense notamment au Mali.
Et la Russie que fait-elle pour endiguer les démarches militaristes de l’Alliance Transatlantique ? Elle dépêche sa flotte en Méditerranée en faisant croiser ses navires le long de la côte syrienne. En revanche, le très gros problème russe réside en manque des bâtiments de guerre à l’échelle de la flotte américaine ce qui tranche cruellement avec l’ère communiste où de 30 à 50 unités de combat présentes entre l’Italie et la Turquie battaient le pavillon rouge frappé à la faucille et au marteau et la croix de Saint-André, drapeau de la marine nationale.
Et c’est dans ce cadre-là que devient clair le nouvel objectif du déploiement des Mistrals russes présentement en chantier en France. Nous avons eu vent de l’éventuelle utilisation de ces navires pour asseoir la présence russe entre Chypre et les côtes israélo-syriennes. Il se trouve que ces Mistrals sont devenus une pierre d’achoppement pour la Défense russe. Le contrat a été mis dans l’escarcelle par l’ancien ministre tombé en disgrâce et obligé de s’expliquer au Tribunal pour les affaires véreuses liées à l’immobilier militaire russe. D’aucuns se demandaient même si les Russes ne voulaient pas annuler les contrats. En fait les Mistrals sont des bâtiments difficiles à utiliser pour la marine russe. Ces navires ne sauraient naviguer dans les conditions du grand froid arctique avec la mer démontée des latitudes de l’Océan Arctique. Ils deviennent non-opérationnels si le thermomètre chute au-delà de moins 7 degrés centigrades. La superficie de la coque et son architecture sont telles que les bâtiments ne résistent pas au vent. Or la façade septenrionale russe est sans cesse balayée par des ouragans venant de l’Arctique doublés de températures allant jusqu’à moins 40 ce qui requiert l’utilisation des brise-glaces. La banquise polaire et les icebergs y mettent aussi leur contribution en rendant la navigation des Mistrals en ces eaux un pari difficile à tenir. Et comme la silhouette des navires et les éléments de base resteront toujours les mêmes, les promesses des chantiers navals de renforcer la coque ne sauraient les mettre à l’abri de tous ces inconvénients et rendre leur exploitation moins périlleuse. Qui plus est, il s’est avéré que les Mistrals ne sont que très peu dotés des systèmes de défense actifs : pas de missiles ni armement lourd en quantité nécessaire pour protéger le navire en cas d’attaque aérienne ou maritime.
En revanche toutes ces tares tournent en avantages si on décide d’utiliser les bâtiments de conception française en Méditerranée. Certes, le navire restera toujours aussi exposé à l’agression mais les Russes pensent déjà à étoffer sa défense à l’aide de 24 conteneurs avec 96 missiles « Calibre NK » localisés à bâbord et à tribord.
Et les Mistrals tombent à pic pour l’escadre russe dans la Mare Nostrum, car les autres bâtiments inclus dans le dispositif commencent déjà à dater. Il y en a des pièces vieilles de plus de 40 ans. On pense notamment au destroyer « Smetlivy ». Et même la pièce maîtresse de la collection le croiseur lance-missiles « Moskva » a soufflé ses trente bougies tout récemment. Les nouveaux navires sont déjà en gestation, à ne citer que la frégate « Amiral Essen » qui larguera ses amarres cette année ou encore le sous-marin « Novorossiysk » destiné à rejoindre la flotte russe de la Mer Noire. En attendant les Mistrals peuvent bien faire l’affaire et servir de centre de prise de décision et de projection de force héliportée pour la réalisation des missions ponctuelles le long de la côte africaine.
Reste le problème de la base navale parce que l’Ukraine pourrait s’opposer fermement à leur mouillage à Sébastopol, base russe mais sous la souveraineté de Kiev. Le port de Novorossiysk ne saurait accueillir un si gros calibre ce qui les renvoie automatiquement à Sotchi où il y a une rade spéciale destinée à des navires de tirant considérable et protégée des vents du large. Cette partie du port est en plus sous-exploitée par le secteur civil.
Ainsi tout est bien qui finit bien ! Les bateaux français semblent avoir trouvé un preneur, la Flotte de la Mer noire et une mission à remplir – montrer le pavillon russe en Méditerranée. Et le système français de transmission SENIT 9 permettra aux Russes de rester en permanence en contact avec les bâtiments de l’OTAN.